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Liban : La rue contraint le Parlement à renoncer l’examen d’une loi

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Le Parlement libanais a dû renoncer mardi, pour la deuxième fois, à l’examen d’une proposition de loi d’amnistie accusée de vouloir absoudre des cas de corruption, un des fléaux dénoncés par le mouvement de contestation au Liban depuis plus d’un mois.

« La séance a été reportée à une date qui sera déterminée ultérieurement », a annoncé un responsable du Parlement, Adnane Daher. Il a évoqué l’absence de quorum et « les conditions exceptionnelles actuelles, en particulier sécuritaires ».

Son annonce est intervenue après une matinée marquée par la présence de centaines de manifestants autour du Parlement, mobilisés pour empêcher les députés de rejoindre l’hémicycle. Quelques heurts ont éclaté avec les forces de l’ordre, dans un climat de tension dans le centre-ville de Beyrouth.

Après le report, les protestataires ont exprimé leur satisfaction. « C’est un nouvel accomplissement pour la révolution », a dit Mohamed Ataya, 28 ans. Cette séance du Parlement ne pourra se tenir « tant que le peuple contrôle la rue avec cette énergie »., « A bas le pouvoir voyou, le peuple est la ligne rouge », a lancé au mégaphone un autre manifestant, son slogan repris en coeur par des contestataires le poing levé et brandissant des drapeaux libanais.

Les accrochages limités avec les forces de l’ordre, équipées de casques et de boucliers, ont notamment eu lieu lorsque les protestataires ont essayé à plusieurs reprises d’arracher les fils barbelés et les barrières en fer bloquant les rues et avenu

Des tirs de semonce ont qui plus est été entendus au passage d’un convoi, selon des images diffusées par la télévision privée LBC. Des manifestants les ont imputés à la sécurité d’un député cherchant à se frayer un passage jusqu’au Parlement.

Plusieurs partis avaient eux annoncé qu’ils boycotteraient la séance, prévue à huis clos et déjà reportée il y a une semaine.

Fustigeant un Parlement « illégitime », Tracy, 24 ans, a accusé les responsables de vouloir une amnistie « pour échapper aux (accusations) d’évasion fiscale et lâcher dans la rue les criminels ».

Le Liban est secoué depuis le 17 octobre par un soulèvement inédit réclamant le départ d’une classe dirigeante jugée corrompue et incompétente.

Dans ce contexte, l’examen de plusieurs propositions de loi controversées, notamment une loi d’amnistie générale qui engloberait des milliers de personnes, a suscité le courroux populaire.

Les manifestants assurent que cette loi pourrait exonérer des personnes condamnées ou soupçonnées d’implication dans des affaires d’évasion fiscale ou encore de crimes environnementaux.

Techniquement, cela serait possible car l’amnistie concerne tous les crimes sauf ceux nommément exclus, a assuré à l’AFP l’ONG spécialisée dans les questions juridiques Legal Agenda. Cette loi représente « un grand danger » car elle inclut selon l’ONG « les crimes des corrompus au pouvoir ».

La séance parlementaire devait également examiner une proposition de loi concernant la création d’un tribunal spécialisé dans les crimes financiers ou liés à la gestion des fonds publics.

Le texte prévoit que les juges soient nommés par le Parlement, ce qui met en question leur indépendance et porte atteinte à la séparation des pouvoirs, selon Legal Agenda.

Après plus d’un mois de crise au Liban, aucune solution politique n’est en vue: sous la pression de la rue, le Premier ministre Saad Hariri a démissionné le 29 octobre et les consultations parlementaires indispensables pour former un nouveau gouvernement n’ont pas encore été lancées.

Mardi, le président Michel Aoun s’est dit ouvert à un cabinet incluant des représentants de la contestation. « Le nouveau gouvernement sera politique et inclura des spécialistes et des représentants du mouvement » de contestation, a-t-il dit lors d’une rencontre avec le coordinateur spécial de l’ONU pour le Liban, Jan Kubis.

Les manifestants réclament un gouvernement formé exclusivement de technocrates totalement indépendants des partis au pouvoir.

Dans un pays qui ploie sous la dette publique et les difficultés économiques, les banques ont rouvert, après une semaine de grève des employés. Ceux-ci protestaient contre des incidents avec des clients irrités par les restrictions sur les retraits.

Depuis le début du mouvement, des manifestants ont souvent empêché les banques d’ouvrir pour dénoncer un système bancaire jugé comme une équation du problème.

Afp

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