La Première ministre britannique Theresa May a entamé mardi une visite en Arabie saoudite où existe, selon elle, « un énorme potentiel d’investissements pour doper l’économie » de son pays en passe de quitter l’Union européenne.
Certes, des questions de défense, de sécurité et de contre-terrorisme seront évoquées, mais l’économie dominera cette visite et le Yémen, où l’Arabie saoudite mène depuis deux ans une campagne militaire controversée, « n’est pas à l’ordre du jour », a déclaré son porte-parole.
« Nous soulèverons la question humanitaire » au Yémen, a toutefois indiqué à la BBC Theresa May, ajoutant n’avoir aucun problème à aborder « des sujets difficiles » pendant ses voyages à l’étranger. Elle est cependant restée évasive sur les droits de l’Homme en Arabie saoudite.
Alors que les opposants à l’intervention saoudienne au Yémen et aux ventes d’armes britanniques sont très actifs en Grande-Bretagne, le chef de la diplomatie de Londres, Boris Johnson, s’est excusé avant la visite pour « l’agression » dont a été victime un haut gradé saoudien lors d’un séminaire jeudi à Londres, ont indiqué les autorités à Ryad.
Le général Ahmed Assiri, porte-parole de la coalition arabe au Yémen, a été la cible d’un jet d’oeuf et violemment critiqué par des manifestants pour le nombre élevé de victimes civiles depuis l’intervention saoudienne en 2015.
Jeremy Corbyn, leader de l’opposition travailliste, a exigé « l’arrêt immédiat » des exportations d’armes britanniques vers l’Arabie saoudite, qui ont totalisé 3,86 milliards d’euros depuis deux ans.
Theresa May, qui se projette comme un modèle pour les femmes du Moyen-Orient, a été reçue mardi par la présidente de la Bourse de Ryad, Sarah al-Suhaimi, a rapporté un photographe de l’AFP.
Elle doit aussi rencontrer la princesse Reema bent Bandar, la plus haute responsable du sport féminin en Arabie saoudite, royaume ultra-conservateur qui cherche à se réformer mais où les femmes n’ont toujours pas le droit de conduire.
Mardi, la Première ministre britannique s’est aussi entretenue avec le prince héritier Mohammed ben Nayef de « la coopération conjointe pour combattre l’extrémisme et le terrorisme », a indiqué l’agence saoudienne SPA. Une audience avec le roi Salmane est prévue mercredi. « Une grande partie » de la visite de Mme May, qui venait de Jordanie, a trait aux « relations d’affaires entre le Royaume-Uni et l’Arabie saoudite », a dit son porte-parole.
Mme May a elle-même souligné « l’immense potentiel d’investissements saoudiens pour doper l’économie » du Royaume-Uni qui est « déterminé à se construire un avenir resplendissant dans le monde au moment où il quitte l’UE ».
L’Arabie saoudite est actuellement le plus important partenaire commercial du Royaume-Uni au Moyen-Orient, les exportations britanniques de biens et de services ayant totalisé 7,70 milliards d’euros en 2015.
La région du Golfe a beaucoup occupé l’agenda étranger du gouvernement britannique ces derniers mois dans le contexte du « Brexit » et des lourdes incertitudes économiques entourant son départ de l’UE. En décembre, Mme May avait été la première femme à participer au sommet annuel des dirigeants des pétromonarchies du Golfe à Bahreïn.
Face aux « actions déstabilisatrices » de l’Iran, elle avait souligné que son pays était prêt à contribuer au renforcement de la sécurité des nations arabes de cette région qui, en échange, s’étaient engagées à établir « les relations commerciales et économiques les plus étroites possibles » après le « Brexit ».
Dans sa quête d’argent frais, Londres a déjà obtenu des résultats, le Premier ministre du Qatar ayant annoncé le 27 mars que son pays allait investir 5,8 milliards d’euros supplémentaires au Royaume-Uni dans les trois à cinq années à venir, notamment dans les infrastructures et les services. Cependant, les pays du Golfe sont eux-mêmes sous pression et présentent des budgets en déficit en raison de la chute des revenus pétroliers. Dans ce contexte, leurs investissements pourraient ne pas être à la hauteur des attentes britanniques, estiment des experts.
D’autres pensent que Mme May a un coup à jouer à Ryad qui a adopté l’an dernier un ambitieux programme appelé « Vision 2030 » visant à diversifier l’économie saoudienne encore trop dépendante de l’or noir.
La visite de Theresa May est intervenue après une étape en Jordanie, dominée par la coopération militaire dans la lutte contre les jihadistes du groupe Etat islamique.
AFP