La croissance dans la zone euro a accéléré au quatrième trimestre et l’inflation s’est approchée en janvier de l’objectif de la BCE, ce qui la met davantage sous pression pour réduire sa politique interventionniste.
A ces deux données économiques publiées mardi par l’Office européen des statistiques, Eurostat, s’ajoute une troisième: le taux de chômage a poursuivi sa décrue en décembre, s’affichant à 9,6% –au plus bas depuis mai 2009–, contre 9,7% en novembre. « La reprise est solide pour la cinquième année de suite (…) mais elle est encore insuffisante pour créer tous les emplois dont nous avons besoin », a commenté le commissaire européen aux Affaires économiques, Pierre Moscovici, interrogé par l’AFP.
Au quatrième trimestre, la croissance dans la zone euro a pris de la vigueur, s’établissant à 0,5%, contre 0,4% au troisième trimestre.
Ce chiffre est un peu meilleur qu’attendu par les analystes interrogés par le service de données financières Factset, qui tablaient sur 0,4%. Sur l’ensemble de l’année 2016, la croissance a néanmoins ralenti: +1,7%, contre 2% en 2015.
Quant à l’inflation dans les 19 pays de la monnaie unique, elle a bondi à 1,8% en janvier, contre 1,1% en décembre.
Ce taux –supérieur aux attentes des analystes interrogés par Factset, qui tablaient sur 1,5%– s’approche de l’objectif « proche de 2% » de la Banque Centrale Européenne, considéré comme signe de bonne santé de l’économie. « La BCE va regarder cette flopée de données avec des sentiments contrastés », a estimé Bert Colijn, analyste de la banque néerlandaise ING.
Cela va « probablement pousser les faucons de la BCE à hausser la voix » pour qu’elle abandonne sa politique monétaire de soutien marqué à la croissance, a-t-il ajouté, faisant allusion à l’Allemagne, première économie de la zone euro.
Depuis des mois, l’institut basé à Francfort maintient en effet ses taux d’intérêt à des niveaux historiquement bas et effectue des rachats massifs d’actifs pour injecter de l’argent bon marché dans le système et ainsi stimuler prêts et investissements, et par ricochet redynamiser la machine économique européenne.
Mais en Allemagne, pays où les retraités sont nombreux et l’épargne reine, les appels à un changement de politique de la BCE se sont amplifiés après les premiers signes d’accélération de l’inflation en décembre.
En réponse, le président de la BCE Mario Draghi avait appelé mi-janvier à la patience, ne voyant pour l’heure pas de progrès « convaincants » sur le front de l’inflation.
Une analyse partagée par M. Moscovici mardi: « Il y a des facteurs sous-jacents qui ne permettent pas encore de remplir les objectifs fixés par la BCE », a-t-il dit.
En effet, l’accélération de l’inflation dans la zone euro est avant tout conditionnée par la hausse des prix de l’énergie: ils ont bondi en janvier, à +8,1%, contre +2,6% en décembre.
L’inflation sous-jacente (hors énergie, produits alimentaires, boissons alcoolisées et tabac) –plus révélatrice de la tendance car elle ne comprend pas les produits les plus volatils– est d’ailleurs restée stable à 0,9%.
La tâche de la BCE est rendue particulièrement difficile par les évolutions encore contrastées entre les 19 pays de la zone euro, comme le montrent les chiffres du chômage.
L’Allemagne est en effet au plein emploi avec le taux de chômage le plus bas de la zone, à 3,9%, ce qui incite la population à réclamer une augmentation des salaires. Mais ce n’est pas le cas de la majeure partie des autres pays de la zone euro, qui peinent à retrouver les niveaux d’emplois d’avant la crise financière de 2007-2008.
En Grèce et en Espagne, qui affichent les niveaux les plus élevés, le taux de chômage était de respectivement 23% (en octobre, dernier chiffre disponible) et de 18,4%. La France était pile dans la moyenne de la zone euro à 9,6%.
AFP