Les prix du pétrole accentuaient leur hausse mardi jusqu’à des niveaux plus vus depuis les sommets atteints début mars, galvanisés par l’annonce de l’Union européenne parvenant finalement à un embargo sur l’essentiel du pétrole russe, après des semaines de négociations.
Vers 09H50 GMT, le baril de Brent de la mer du Nord pour livraison en juillet, dont c’est le dernier jour de cotation (le graphique du site représente déjà le prix du Brent livré au mois d’Août, car il a plus de volume), prenait 1,59% à 123,60 dollars, après un pic à 124,10 dollars.
Le baril de West Texas Intermediate (WTI) américain pour livraison le même mois, grimpait de 3,31% à 118,84 dollars, après être monté à 119,43 dollars, également un plus haut depuis début mars.
Les dirigeants des 27 pays de l’UE ont trouvé un accord lundi qui devrait permettre de réduire de quelque 90% leurs importations de pétrole russe d’ici la fin de l’année afin de tarir le financement de la guerre menée par Moscou en Ukraine.
Selon l’accord, les achats de pétrole acheminés par voie maritime seront interrompus, « tandis que les approvisionnements par oléoducs seront progressivement abandonnés », explique Ipek Ozkardeskaya, analyste de la banque Swissquote.
« Ainsi, l’Europe réduira les deux tiers de ses importations de pétrole en provenance de Russie, ce qui coûtera à la Russie environ 10 milliards de dollars en manque à gagner », estime l’analyste.
Cette exemption pour le pétrole acheminé par oléoduc permet à la Hongrie, pays enclavé et fortement dépendant du pétrole russe, de continuer à recevoir du brut de Moscou.
Un compromis salué mardi par le Premier ministre hongrois Viktor Orban, qui bloquait depuis plusieurs semaines le projet d’embargo européen, parlant de « bombe atomique » lancée sur son économie.
L’Union européenne importait encore 3,4 millions de barils de pétrole brut et de produits pétroliers par jour de Russie en avril, selon l’Agence internationale de l’énergie.
« En d’autres termes, il faudra trouver de nouveaux fournisseurs pour environ 3 millions de barils par jour dans les mois à venir. Cette perspective fait grimper les prix » de l’or noir, explique Carsten Fritsch, analyste chez Commerzbank.
Selon l’analyste, l’UE chercherait « intensément des fournisseurs en Afrique de l’Ouest », mentionnant une augmentation des expéditions de pétrole depuis le Nigeria, l’Angola et le Cameroun vers l’Europe.
« Les livraisons de pétrole de l’Afrique du Nord vers l’Europe ont également grimpé en flèche », indique M. Fritsch. Les livraisons en provenance des Emirats arabes unis devraient également bondir cet été.
La nouvelle suggère également « que la situation de l’inflation en Europe, et en Occident, pourrait empirer avant de s’améliorer », met en garde Ipek Ozkardeskaya.
Le taux d’inflation dans la zone euro a d’ailleurs battu un nouveau record en mai, à 8,1% sur un an, a annoncé Eurostat mardi.
« Même si les chiffres de l’inflation américaine se sont quelque peu détendus au début du mois, la pression haussière incessante sur les prix du pétrole est très préoccupante outre-Atlantique également », poursuit l’analyste.
Reste une inconnue dans l’équation: « la réaction de la Russie au boycott unanime de l’UE », souligne Tamas Varga, analyste chez PVM Energy.
Si le président russe Vladimir Poutine « décide de riposter et d’interrompre les exportations par gazoducs et les expéditions de gaz naturel vers l’Europe, il sera possible de revenir sur les sommets atteints en mars », prévient l’analyste. « La guerre économique entre la Russie et l’Europe s’intensifie. »
Le gazier russe Gazprom a annoncé avoir suspendu mardi les livraisons de gaz au fournisseur néerlandais GasTerra face à son refus de payer en roubles.
AFP