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Loi de finance 2020 : Un lourd déficit et de graves conséquences sociales

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Le projet de loi de finance pour 2020 a passé la formalité de l’Assemblée Nationale, ce jeudi 14 novembre 2019, avec une facilité déconcertante. Très peu d’amendements ont été proposés par les députés en majeure partie composés de militants des partis FLN et RND. Il passera très certainement avec aisance l’épreuve du Sénat pour finir avec la signature du chef de l’État par intérim ou celle du futur président de la république, si le scrutin du 12 décembre parvient évidemment à se tenir.

Cette loi de finance mettra entre les mains du Gouvernement un budget consistant de 64,3 milliards de dollars, en dépit d’une baisse d’environ 9% par rapport au budget précédent. L’État qui vit nettement au-dessus de ses moyens a besoin d’un budget aussi important pour payer une pléthore de fonctionnaires, garantir les transferts sociaux et financer la construction d’infrastructures publiques et de millions de logements sociaux pour maintenir un minimum de croissance et la paix sociale.

Ce léger déclin budgétaire résulte d’une promesse de réduction des frais de fonctionnement des ministères et institutions publics (-1,2%), mais aussi, et surtout, des dépenses d’équipement réduite de 20%. Des mesures d’austérité qui risquent d’exacerber les tensions sociales et de paralyser l’économie sans toutefois changer grand-chose au déficit du collectif budgétaire qui se maintiendra au niveau excessif d’environ 7% du produit intérieur brut. Un déficit qui ouvrira quasi-automatiquement la voie à un rebond de l’inflation et à une nouvelle dérive du dinar.

Le déficit en question résulte en grande partie d’un net ralentissement de l’économie qui s’est négativement répercuté sur les recettes attendues de l’activité économique (impôts et taxes sur les activités et les revenus) ayant chuté d’environ 6 milliards de dollars (56,1 milliards de dollars en 2019 contre seulement 51,7 milliards en 2020). C’est un déficit qui résulte de la mauvaise gouvernance du pays durant le règne d’Abdelaziz Bouteflika, mais qui pose aujourd’hui un grave problème de la solvabilité financière d’un État – pris dans la tourmente d’une révolution qu’il gère tout aussi mal – et auquel il est incapable proposer ne serait-ce qu’une solution pour juguler ce déficit en évitant les fuites en avant.

Pris à la gorge et sans aucun recours possible (le fond de régulation des recettes d’hydrocarbures a été épuisé, l’emprunt obligataire de 2016 détourné de son objectif), il ne reste à vrai dire au Gouvernement qu’une seule variable structurelle à utiliser, qui est celle de la parité du dollar, monnaie de compte des ventes d’hydrocarbures, par rapport au dinar qui est celle du budget de l’État. Plus le dinar sera faible, plus le budget exprimé en dinar sera important et plus le déficit budgétaire sera, en conséquence, plus faible. Il ne lui reste à notre sens que ce moyen, à moins que le Gouvernement renie son engagement de ne plus recourir à la planche à billets.

Il faut donc s’attendre cette année, sans doute plus que les années antérieures, à une dérive du dinar sans précédent. On évoque déjà une dévaluation minimum  de 40 à 50% pour seulement contenir le déficit prévisionnel de 2010, qui a atteint le niveau déjà inquiétant de 7%.

Avec un tel niveau de dévaluation, il faut évidemment s’attendre à une envolée des prix à la consommation, puisque l’essentiel des denrées et inputs manufacturés sont importés en devises fortes. En résultera une inflation à deux chiffres qui perturbera les bourses des ménages, mais aussi tous les calculs économiques, à commencer par les pouvoirs d’achats, les business plans et les projets d’investissements en cours et à venir.

Un tel niveau de déficit budgétaire pose également la question de l’emprunt, qui s’imposera dès l’entame de l’année 2020, ne serait-ce que du fait que ce déficit structurel survient en même temps que dégringole le niveau de nos réserves de change, qui ne représenteront pas beaucoup à cette échéance si, évidemment, le prix du baril de pétrole reste aussi bas qu’aujourd’hui.

Solliciter le concours du FMI pour solvabiliser ces emprunts n’est pas du tout à écarter. Des ajustements structurels seront, comme de tradition, exigés par tous les bailleurs de fonds, au nom de l’orthodoxie financière. C’est évidemment le peuple qui, comme dans les années 1990, en payera les conséquences en termes de chômage, de fermeture d’entreprises et de mise en berne de l’investissement.

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