Dans cet entretien, l’expert dans le domaine de l’automobile, Mohamed Yaddadene, s’exprime sur les dernières mesures prises par le ministère du Commerce concernant la distribution des quotas aux concessionnaires pour l’importation des véhicules neufs. Mr Yaddadene considère cette distribution surprenante et décevante, en argumentant cela par le fait que l’impact serait lourd sur l’emploi au sein de l’activité des concessionnaires. Beaucoup de postes d’emploi vont disparaîtrais, selon lui.
Algérie-Eco : Les quotas pour les importations de véhicules viennent d’être dévoilés par le ministère du Commerce. Certains concessionnaires ont bien accueillie la décision, d’autres ont été choqués. Quel commentaire faites-vous dans ce sens ?
Je pense que les concessionnaires n’ont pas eu le nombre adéquat de véhicule à importer pour pouvoir continuer leurs activités sur le marché. Hyundai, Peugeot, Nissan, ont eu des quotas minimes, c’est surprenant et décevant pour la majorité des concessionnaires. A mon avis, cette attribution de quotas va contribuer à perturber d’avantage le marché de l’automobile en Algérie. C’est comme si on demandait à certains concessionnaires de mettre la clé sous le paillasson. Quand on donne un quota de 7000 véhicules à Peugeot Algérie, et 3100 à Hyundai, pour Peugeot c’est seulement deux mois de vente par an et Hyundai c’est un mois de vente.
Quelle conséquence d’une telle situation sur le marché de l’automobile ?
Tout simplement, il y aura beaucoup de chômage dans ce secteur. Ceux qui n’ont pas eu de quotas car sur les 80 concessionnaires seulement 40 ont obtenu des quotas d’importation, vont certainement mettre beaucoup de gens en chômage alors que d’autres vont certainement fermer leurs boites.
Le ministère de l’Industrie avait annoncé au début un contingent de 152.000 véhicules à importer. Le ministère du Commerce a porté ce nombre à 83.000 véhicules. Comment expliquer cela ?
A mon avis, c’est comme si on demandait aux gens de mettre la clé sous le paillasson ou plutôt de changer d’activité et de s’orienter à investir dans des usines de fabrication de véhicules. Pour moi, il y a une précipitation dans cette action. Du côté du ministère de l’Industrie c’était bien réfléchi, alors que du côté du ministère du Commerce, sa décision est un peu floue. Je répète aussi qu’un nombre d’emploi assez important va disparaître. Par exemple Peugeot Algérie à un large réseau de distribution soit entre 45 et 50 distributeurs qui emploient chacun une trentaine de personnes. Donc imaginez le nombre de postes qui vont disparaître.
Certains concessionnaires se demandent pourquoi Renault Algérie a obtenu le plus grand quota c’est-à-dire 15.000 véhicules. Qu’en pensez-vous ?
Ce quota peut s’expliquer par rapport à deux facteurs. Le premier est que Renault a été le premier à monter une usine de montage en Algérie c’est un avantage pour lui. Le deuxième c’est Renault Algérie a deux marques actuellement Renault et Dacia. Les deux marques représentaient plus de 70.000 unités importées en 2015. Donc ça a été une faveur pour cette entreprise et elle a gagné des points pour son usine de montage.
Certains spécialistes estiment que ce genre de mesure permettrait de développer l’industrie locale de l’automobile. Est-ce que vous partagez cet avis ?
Je suis tout à fait d’accord car à mon avis le montage doit constituer une étape qu’il faut abréger afin de passer à de vraies usines de fabrication. Il faut surtout opter pour des choix prédéfinis pour obliger les constructeurs à s’investir dans ce sens. Si on doit se limiter au montage, autant continuer à importer des véhicules comme cela se faisait jusqu’à maintenant.
Aussi, la politique industrielle doit favoriser l’émergence d’une vraie industrie de fabrication alors que la période du montage ne doit être, à mon avis, qu’une étape ou un passage qui mènera l’industrie mécanique vers une nouvelle ère. Cette orientation va contribuer au développement de l’industrie mécanique avec un élargissement vers la sous-traitance.
Entretien réalisé par Imène A.