Le ministre français des Affaire étrangères, Jean-Noël Barrot, a effectué, ce dimanche 6 avril, une visite officiel à Alger, pour renouer le dialogue entre l’Algérie et la France, après huit mois de crise inédite entre les deux pays. Le chef de la diplomatie française s’est d’abord entretenu avec le ministre des Affaires étrangères Ahmed Attaf. Ensuite, il a été reçu par le président de la République, Abdelmadjid Tebboune.
Cette visite du MAE français intervient suite à l’appel téléphonique entre les présidents algérien et français le 31 mars dernier, au cours duquel ils ont décidé de renouer le dialogue après plusieurs mois de tensions. Les relations entre Paris et Alger, déjà compliquées ces dernières années, se sont fortement dégradées en juillet 2024 quand le président français Emmanuel Macron a provoqué la colère des autorités algériennes en reconnaissant un prétendu plan d’autonomie marocain pour le Sahara occidental occupé.
« J’ai tenu à honorer cette invitation dans les plus brefs délais, moins d’une semaine après l’appel téléphonique entre les présidents Macron et Tebboune et leur communiqué conjoint. Nous avons vécu ces derniers mois une période de tension inédite qui ne sert pas les intérêts des Algériens, ni ceux des Français », a déclaré M. Barrot, à l’issue de l’audience que lui a accordée le président Abdelmadjid Tebboune.
« Nous avons certes des divergences, nous ne pouvons pas les occulter, mais les liens humains, historiques et culturels qui nous unissent doivent nous conduire à reprendre le dialogue et à réinstaurer la coopération. Nos relations institutionnelles doivent être à la hauteur des relations humaines entre nos deux pays. Je suis venu à Alger pour porter le message du président de la République. La France souhaite tourner la page des tensions actuelles pour reconstruire un partenariat d’égal à égal, serein et apaisé avec l’Algérie. Elle souhaite retrouver les voies de la coopération avec l’Algérie, dans notre intérêt mutuel, et retrouver toutes les voies de la coopération dans un souci d’efficacité et de résultats pour nos compatriotes », a-t-il continué.
« Avec le président Tebboune et le ministre Attaf, nous avons mis sur la table avec franchise l’ensemble des sujets qui nous ont préoccupé ces derniers mois, afin de décliner les principes posés par les deux présidents lors de leur dernier entretien téléphonique di 31 mars, et de retrouver la dynamique et l’ambition fixées par les deux chefs d’Etat dans la Déclaration d’Alger de 2022. Nous avons décidé de le faire avec sérieux, discrétion, efficacité, en réactivant dès aujourd’hui l’ensemble des mécanismes de coopération dans tous les secteurs », a encore déclaré le MAE français, et d’ajouter : « Nous revenons à la normale. Et pour reprendre les mots du président Tebboune : ‘Le rideau se lève' ».
« Nous revenons à la normale«
Et de préciser : « Les contacts entre les services de renseignement reprennent. Une réunion des plus hauts responsables de la sécurité de nos deux pays et désormais acté et, de même, nous aurons un dialogue stratégique sur le Sahel ». « Dans le domaine de la coopération judiciaire, j’ai confirmé au président Tebboune la visite du Garde des Sceaux. Elle s’accompagnera d’une reprise du dialogue judiciaire entre nos deux pays. Nous avons beaucoup d’enjeux de coopération, notamment sur l’exécution des commissions rogatoires, sur le dossier sensible des biens mal acquis », a annoncé le MAE français, et de faire état de « l’invitation par les services en charge du parquet national financier à leur homologues algériens de juridiction compétente à se rendre à Paris pour étudier tous les dossiers. »
« Dans les champs des mobilités, les deux présidents sont convenus de la reprise sans délais de la coopération migratoire, ce qui m’a été confirmé par le président Tebboune. Dans le détail, réadmissions, visas, ces questions seront traitées dans le cadre des accords existants, via les procédures normales et fluides de la coopération consulaire », a-t-il indiqué, et d’ajouter : « Le président Tebboune qu’il était favorable à une rencontre prochaine entre les Consuls algériens en France et les Préfets. Nous allons maintenant l’organiser avec le ministère algérien des Affaires étrangères. » « Nous sommes convenus de travailler au contenu des accords qui régissent notre relation sur le plan des mobilités et le plan migratoire, et d’identifier les enrichissements nécessaires pour les rendre plus », a-t-il annoncé.
Le MAE français a également abordé les relations économiques algéro-françaises. « J’ai eu l’occasion de rappeler les difficultés apparues ces derniers mois s’agissant du développement de nos échanges particuliers dans les secteurs agroalimentaire, automobile ou du transport maritime. Le président Tebboune m’a assuré de sa volonté de leur donner une nouvelle impulsion », a aussi indiqué Jean-Noël Barrot, annonçant que le patron du Medef (patronat français) recevra également son homologue algérien du Conseil du renouveau économique algérien (CREA) le 9 mai prochain, et la tenue avant l’été prochain, d’une réunion du comité mixte économique algéro-français (COMEFA).
Sur le plan mémoriel, Jean-Noëm Barrot a indiqué que les contacts ont repris entre les historiens algériens et français de la commission mixte. « Je m’en suis assuré personnellement et le président Tebboune m’a confirmé que l’historien (français, ndlr) Benjamen Stora est invité à Alger pour poursuivre le travail sur les restitutions d’objets culturels », a-t-il dit, assurant que « tout cela, sera suivi à mon niveau et à celui de mon homologue (Ahmed Attaf). » « Nous actons la repris du dialogue entre nos deux diplomaties et les secrétaires généraux de nos deux ministères se rencontrerons dans les prochains jours », a-t-il ajouté.
Pour finir, le chef de la diplomatie française a eu un mot pour l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal, condamné à cinq ans de prison ferme en Algérie. Il a appelé une a « un geste d’humanité au vu de son âge et de son état de santé ».