Le Parc National de Gouraya (PNG), situé à Béjaïa (à 220 km à l’est d’Alger), est un trésor naturel et historique niché entre mer et montagne, un lieu où se côtoient biodiversité exceptionnelle, vestiges historiques et panoramas époustouflants.
Ce parc, classé réserve naturelle, abrite des sites d’une grande importance, dont le Fort de Yemma Gouraya, le Pic des Singes, Cap Carbon, les merveilleuses falaises de Cap Bouak et des Aiguades, autant de lieux qui attirent chaque jour des centaines voire des milliers de visiteurs.
Cependant, notre visite du 23 août 2024 a révélé des défis en termes de gestion de l’environnement et de l’aménagement touristique, malgré des efforts pour redonner vie à ce site d’exception.
Créé en 1984, le Parc National de Gouraya est inscrit au patrimoine national en raison de sa grande biodiversité et de son importance écologique. Il a été classé réserve de biosphère par l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (Unesco) en 2004.
Il s’étend sur une superficie d’environ 2 080 hectares, avec une altitude culminant à 660 mètres au sommet de la montagne de Gouraya, offrant des vues spectaculaires sur la Méditerranée.
Ce parc est une réserve naturelle protégée, abritant de nombreuses espèces animales et végétales, certaines rares ou endémiques. Parmi elles, les célèbres macaques de Barbarie qui peuplent le Pic des Singes, et diverses plantes méditerranéennes qui parsèment les collines rocheuses.
Le Fort de Yemma Gouraya
Outre son importance écologique, le parc est riche en histoire. Le Fort de Yemma Gouraya, érigé au XVIe siècle par les Espagnols, est un monument militaire stratégiquement situé sur le mont Gouraya.
Ce fort jouait un rôle défensif essentiel en surveillant la baie de Béjaïa contre les invasions maritimes. Son nom fait référence à Yemma Gouraya, une figure légendaire vénérée par les habitants locaux, considérée comme la protectrice de la ville.
Yemma, qui signifie « mère » en berbère, est un symbole maternel et sacré pour la population locale. Selon la légende, Gouraya était une sainte femme qui veillait sur Béjaïa, et son tombeau, situé à proximité du fort, est un lieu de pèlerinage et de dévotion.
Le chemin menant vers le Fort de Yemma Gouraya, récemment restauré, est une promenade magnifique, agrémentée d’éclairages solaires. Mais en dépit de ces aménagements modernes, l’expérience est ternie par des problèmes d’hygiène et de gestion des visiteurs.
Les bas-côtés du chemin sont jonchés de déchets : des bouteilles en plastique, des sachets, et des papiers défigurent cette belle ascension. L’absence de poubelles et de barrières de sécurité exacerbe ce problème.
À l’arrivée au fort, les visiteurs sont confrontés à un amoncellement de déchets plastiques juste avant de franchir les marches menant à ce monument historique.
Une ascension merveilleuse entravée par des défis écologiques
Le fort, rouvert il y a une dizaine de jours après des travaux de restauration qui ont démarrés en mars 2023, conserve son allure majestueuse mais manque cruellement de panneaux explicatifs et de signalétique en plusieurs langues.
Seule une plaque en français offre des informations aux visiteurs, ce qui limite l’accessibilité à une partie du public. De plus, aucune présence d’agents de sécurité ou de guides n’encadre les visiteurs, ce qui rend l’expérience incomplète pour ceux qui souhaitent en apprendre davantage sur l’histoire et la structure du fort.
Les visiteurs se contentent d’admirer la vue spectaculaire qu’offre le sommet avant de redescendre. Selon les statistiques officielles, le parc accueille quelque 1,2 million de visiteurs par an, notamment en période estivale.
Le Pic des Singes (430 mètres d’altitude), un autre joyau du parc, est non seulement un point de vue imprenable sur la baie de Béjaïa, mais aussi un habitat pour les macaques de Barbarie (Macaca sylvanus), également appelé magot ou macaque berbère, une espèce menacée.
Malheureusement, ce lieu est aussi touché par les mêmes problèmes de gestion des déchets, mettant en péril l’environnement naturel fragile de la montagne. Les macaques, attirés par les déchets laissés par les visiteurs, risquent leur santé en interagissant avec des matériaux non adaptés à leur régime alimentaire.
En direction des Aiguades, un autre site populaire du parc, les visiteurs sont confrontés à des parkings sauvages et non réglementés, avec des individus réclamant 100 dinars pour stationner en bord de la route escarpée et étroite, faute de parking officiel.
Bien que la plage rocheuse aménagée offre une expérience plus sécurisée avec des commerces et des restaurants et des promenades en kayak et en barques, les sentiers taillés à même la roche qui permettent d’accéder et d’admirer les falaises de Cap Carbon et Cap Bouak sont dépourvus d’infrastructures comme des poubelles ou des points d’information.
Le Parc National de Gouraya reste une destination incontournable pour quiconque souhaite découvrir la beauté sauvage et l’histoire de Béjaïa.
Cependant, pour que ce site continue à prospérer, il est impératif de relever plusieurs défis. L’installation de poubelles, la sensibilisation des visiteurs au civisme, et l’encadrement touristique avec des guides sont des mesures essentielles pour assurer la préservation de ce joyau naturel et historique.
Malgré ces défis, des projets prometteurs sont en cours pour améliorer l’accessibilité et la gestion du Parc National de Gouraya. L’une des initiatives est la réalisation d’un téléphérique, qui relierait le centre-ville de Béjaïa au sommet de Gouraya.
Ce projet vise à faciliter l’accès des visiteurs tout en limitant l’impact environnemental lié aux déplacements dans le parc. Un téléphérique permettrait d’améliorer l’expérience touristique tout en réduisant l’empreinte écologique.