AccueilActualitéNationalCour des comptes : Près des deux tiers des communes du pays...

Cour des comptes : Près des deux tiers des communes du pays sont classées « pauvres »

Date:

- Advertisement -

Le rapport annuel 2022 de la Cour des comptes publié jeudi dernier, a révélé que près des deux tiers, soit 958 sur 1.541 communes du pays sont classées « pauvres », alors que les communes riches ne dépassent pas les 7%.

Dans son rapport, la Cour des comptes a a examiné les conditions d’octroi des subventions et de suivi de leur l’exécution au titre de la période 2015 à 2020, par la Caisse de solidarité et de garantie des collectivités locales (CSGCL), qui est un établissement public à caractère administratif, sous tutelle du ministère de l’intérieur, des collectivités locales et de l’aménagement du territoire, chargée de mettre en place une solidarité financière inter-collectivités locales à travers l’attribution des dotations globales de fonctionnement et d’équipement au profit des wilayas et des communes les moins dotées en ressources.

Cet examen a mis en évidence le rôle peu efficace de ce support technique de l’administration centrale dans la mise en œuvre des différentes actions de soutien et concours financiers accordés dans le cadre du fonds de solidarité des collectivités locales.

En dépit de la refonte de son statut, en 2014, tendant à élargir ses prérogatives et à améliorer son mode d’intervention, la CSGCL demeure « confrontée à de multiples contraintes ayant trait, principalement, à l’insuffisance de ses moyens organisationnels et humains eu égard à ses nouvelles missions statutaires, d’une part, et à l’inachèvement du dispositif réglementaire permettant un meilleur encadrement de ses interventions financières, d’autre part », relève le rapport, qui précise que « ces contraintes ne sont pas sans effets sur la qualité et les conditions de prise en charge des missions dévolues à cet établissement en matière d’octroi et de suivi des dotations aussi bien de fonctionnement que d’équipement et d’investissement. »

Concernant les dotations de fonctionnement, il a été notamment relevé « l’absence de paramètres fiables et actualisés pour une répartition plus équitable de l’attribution de la péréquation, le recours excessif des communes à la subvention exceptionnelle d’équilibre, le financement d’actions non éligibles au fonds de solidarité des collectivités locales ainsi que la faible maitrise des subventions destinées à la formation, études et recherche. »

S’agissant des dotations d’équipement et d’investissement, le contrôle a mis en exergue outre « le défaut de critères fiables et précis pour l’octroi des subventions d’équipement qui, au demeurant sont surtout orientées sur les actions d’aménagement et d’équipement urbain ainsi que sur les réseaux divers et la voirie, la prise en charge d’opérations d’équipement n’entrant pas dans le cadre du dispositif de soutien financier du fonds et la réaffectation non réglementaire des reliquats dégagés sur les dotations d’équipement. »

Près des deux tiers des communes du pays sont classées « pauvres »

Selon la Cour des comptes, les pouvoirs publics ont accordé une attention particulière à la solidarité inter-collectivités locales, « visant essentiellement l’équilibre des budgets locaux, l’atténuation des disparités et déséquilibres de développement entre les collectivités locales, l’apaisement des pressions locales et ainsi l’amélioration du cadre de vie des citoyens. »

L’exploitation des documents mis à la disposition de la Cour des comptes par le ministère de l’intérieur, des collectivités locales et de l’aménagement du territoire font ressortir que « près des deux tiers, soit 958 sur 1 541 communes du pays sont classées « pauvres », alors que les communes riches ne dépassent pas les 7%, ce qui nécessite impérativement l’intervention de l’Etat afin d’assurer la pérennité de leur fonctionnement et la contribution à leur développement socio-économique. »

« La mise en œuvre de cette politique de solidarité s’est concrétisée, notamment, à travers la création de deux comptes d’affectation spéciale (CAS), à savoir : le compte n°302-020 intitulé « Fonds de solidarité des collectivités locales » et le compte n°302-130 « Fonds de garantie des collectivités locales » et la mise en place d’un outil institutionnel, dénommé « Caisse de solidarité et de garantie des collectivités locales», par abréviation : CSGCL », rappelle-t-on.

Le rapport de la Cour des comptes note que le montant global des soutiens financiers accordés à travers la CSGCL, particulièrement, au titre du Fonds de solidarité des collectivités locales, pour la période 2015 à 2020, s’élève à 1 990,047 milliards de dinars, soit 1 242,579 milliards de dinars (62,44%) pour le fonctionnement et 747,468 milliards de dinars (37,56%) pour l’équipement et l’investissement. 

A l’issue de ses investigations, la Cour a relevé que le réaménagement du statut de la Caisse, visant à corriger les insuffisances tant sur le plan organisationnel que sur les modes de répartition des dotations, « n’a pas apporté les effets escomptés, en raison, de multiples contraintes et insuffisances ayant caractérisé l’organisation et le fonctionnement de la Caisse dont les principales ont été déjà signalées par la Cour des comptes à l’occasion d’un contrôle sur l’ex-FCCL2. »

En effet, poursuit le rapport, « l’inadéquation des moyens organisationnels et humains avec les prérogatives et le rôle assignés à l’établissement, n’a pas permis à la Caisse de remplir pleinement ses missions statutaires, en tant que support technique au service de l’administration centrale, notamment, en matière de solidarité inter collectivités locales. »

Régression des dotations budgétaires de fonctionnement allouées à la Caisse

Concernant les organes de pilotage et de gouvernance interne, le rapport indique que l’examen des conditions de fonctionnement de ces organes de gestion a révélé « une multitude d’anomalies et de défaillances », à savoir : le rôle limité du conseil d’orientation; insuffisante activité du comité technique; une organisation et des moyens inadaptés; insuffisances relevées dans l’organisation administrative de la Caisse; une organisation partiellement mise en place et vacance des postes structurels.

Selon le même rapport, les moyens financiers et humains ne reflétent pas l’importance du rôle dévolu à la CSGCL. En effet, les subventions de fonctionnement attribuées à la Caisse ont été revues à la baisse.

« L’examen de la situation financière de la CSGCL, pour la période sous revue, a permis de constater que les dotations budgétaires de fonctionnement allouées à la Caisse ont connu une régression de 2015 à 2020. Elles passent de 74 millions de DA en 2015 à 50 millions de DA en 2020, soit une baisse de 32,43 % », indique le rapport.

Et de préciser que parallèlement à cette baisse des subventions reçues, la Caisse « n’a pas consenti suffisamment d’efforts pour l’utilisation des crédits y afférents pour couvrir les dépenses de fonctionnement des services, dont les taux d’exécution ont oscillé entre 40 et 97% », notamment pour les rubriques relatives aux : chapitre 1 « frais de missions et de déplacement », chapitre 6 « frais d’hébergement et de restauration des membres du conseil d’orientation et du comité technique », chapitre 8 « organisation des séminaires et des journées d’études » et le chapitre 9 « formation et perfectionnement des personnels ».

Pour ce qui est de la gestion des moyens humains, le rapport de la Cour des comptes indique que l’examen de la structure du personnel et son évolution révèle que « les moyens humains, dont dispose la Caisse sont loin de répondre à ses besoins et d’assurer un fonctionnement normal de ses structures. » La Cour a constaté « une tendance haussière de la vacance des postes budgétaires disponibles, qui est passée de 42% en 2015 à 56% en 2020. »

« En raison des mesures de gel des recrutements décidées par les pouvoirs publics, la Caisse n’a pas pu entreprendre de recrutements en vue de pourvoir les postes vacants. Ainsi, l’effectif réel (y compris les contractuels) a accusé une tendance baissière, passant de 29 postes pourvus sur 50 postes d’emploi ouverts en 2015 à 22 postes sur 50 postes budgétaires ouverts en 2020. Face à cette situation, la direction générale des collectivités locales (DGCL) a été amenée à mettre à la disposition de la Caisse six (06) fonctionnaires afin de lui permettre de mener à bien ses missions », précise le rapport.

En sus des constatations caractérisant l’organisation interne de la CSGCL, d’autres contraintes exogènes ont réduit l’efficacité de la Caisse en matière de mise en œuvre du dispositif de soutien financier des collectivités locales, selon le document, qui souligne que ces contraintes portent essentiellement sur le défaut d’un encadrement réglementaire de certaines missions confiées à la Caisse.

Le nombre des communes déficitaires ne cesse d’augmenter

A ce propos, le rapport cite l’intermédiation bancaire au profit des collectivités locales, dévolue à la Caisse « n’a pas reçu une prise en charge adéquate afin de permettre à certaines communes, dépourvues de ressources financières suffisantes, de tirer profit de ce dispositif en initiant des opérations ou des projets d’investissement productifs de revenus par le biais d’emprunt bancaire. »

Aussi, l’arrêté fixant les modalités de gestion et de remboursement des concours temporaires accordés aux collectivités locales n’est intervenu qu’en 2017. Et que les procédures et les modalités de gestion des concours définitifs n’ont pas été également définies par arrêté du ministre de l’intérieur. Il en est de même pour les subventions exceptionnelles diverses, dont le montant global, accordé au profit des collectivités locales, s’élève à 209,304 Mrds de DA pour la période 2015 à 2020.

En raison des déficits budgétaires post péréquation enregistrés, la Cour a relevé « le recours récurent des collectivités locales à solliciter des subventions exceptionnelles d’équilibre en raison de leurs situations financières particulièrement difficiles et leur incapacité à prendre en charge entièrement leurs dépenses obligatoires sur la seule attribution de la péréquation qui est destinée exclusivement à cet effet. » La même source signale que « l’absence d’un texte fixant les modalités d’octroi et de gestion de ces dotations a favorisé cette situation qui ne cesse de s’accentuer d’année en année. »

En effet, l’examen des bilans et situations établis par la CSGCL, pour la période 2016 à 2020, fait ressortir que « le nombre des communes déficitaires ne cesse d’augmenter en passant de 74 communes en 2016 à 291 communes en 2020, soit une évolution de plus de 293%. »

Parallèlement, le montant des subventions exceptionnelles d’équilibre a évolué de 2,044 milliards de dinars en 2016 à 8,26 milliards de dinars en 2018 pour atteindre 8,021 milliards de dinars en 2020, soit un accroissement, respectivement, de 304,10% et 292,41% par rapport à 2016. 

Concernant le montant global accordé aux wilayas, il s’établit à 60 milliards de dinars, à raison de dix (10) milliards de dinars par an. Le nombre de wilayas bénéficiaires de l’attribution de la péréquation varie entre 34 et 36 wilayas annuellement.

La Cour des comptes recommande de renforcer les capacités managériales de la Caisse afin de lui permettre d’assurer convenablement ses missions statutaires en tant que support technique du ministère de l’intérieur ; veiller au respect de la nomenclature des opérations éligibles au financement du CAS n° 302-020 « Fonds de solidarité et de garantie des collectivités locales » dans l’affectation des dotations. 

- Advertisement -
Articles associés

Derniers articles