AccueilBanques-FinancesInterview du Directeur de la BFI Société Générale Algérie à l'occasion de...

Interview du Directeur de la BFI Société Générale Algérie à l’occasion de la remise des prix BraveHill du financement

Date:

- Advertisement -

La 1ère édition des « rendez-vous de l’entreprise » du FCE qui se sont déroulés le 28 janvier au Méridien d’Oran, a été marquée par la remise des prix BraveHill du financement, qui vont chaque année récompenser les acteurs qui ont le plus œuvré à l’innovation financière en Algérie. Pour l’ensemble de l’année 2015, trois acteurs ont été récompensés :

  • La Banque Exterieure d’Algérie, représentée par M. Semid, qui a reçu le grand prix du jury pour l’ensemble des dossiers Project Finance gérés par la banque.

Prix BEA_2011

  • La Société Générale Algérie, représentée par M. Wormser, M. Vacarie et M. Sid, qui ont reçu le prix du Financement 2015.

Prix SGA

  • Maître Mustapha Hamza qui a reçu le prix du montage juridique 2015.

Prix Maitre Hamza

A cette occasion, Algérie Eco a réalisé une interview de M. Fouaz SID, Directeur de la division Banque de Financement et d’Investissement de Société Générale Algérie. Dans cet entretien, M. Sid nous explique les grands principes qui régissent le Project Finance.

 

Pouvez-vous nous expliquer les grands principes du Project Finance et les cas où ce type de financement est applicable ?

Le « Project Finance » est une technique qui permet le financement de grands projets capitalistiques (souvent >80M€). Le remboursement des financements est assuré essentiellement par les cash-flows futurs qui seront générés par le projet financé. Les financements sont sécurisés par les actifs sous-jacents de la société-projet SPV,  sans recours ou avec recours limité envers les sponsors (actionnaires).

Le recours limité envers les actionnaires rend la technique du Project Finance « plus risqué » pour les prêteurs ce qui les amène à exiger des études approfondies à réaliser par des consultants indépendants de renom. Ces études concernent tous les aspects du projet (études techniques, études de marchés, études juridiques, modélisation financière…etc.).

Cette technique s’adresse aux projets capitalistiques dont les risques doivent être assumés par des acteurs de qualité ayant un solide « track record » dans la gestion de ces risques. Ainsi, le risque de construction (Engineering, fournitures, construction) doit être assumé par un contractant reconnu dans le secteur d’activité et ce à travers un contrat unique (EPC) avec des prix fixes. Pareil pour le risque de marché qui devra être sécurisé par des contrats fermes d’achat (contrats off taker) avec des contreparties de qualité. Les aspects juridiques (legal opinions, contrats de financement, documents de sûretés..etc.) doivent être confiés à des cabinets juridiques ayant une expertise dans ce domaine. Je signale également l’importance de la modélisation financière de l’ensemble du projet sur une feuille de calcul informatique donnant, entre autres, un état détaillé des revenus, bilan et les projections de flux de trésorerie.

Pour ce qui des secteurs d’activité éligibles à la technique Project Finance je peux citer à titre d’exemple les télécoms, les activités minières, l’industrie, la pétrochimie, l’oil & gas, l’énergie (notamment les énergies renouvelables) ainsi que les infrastructures socio-économiques (autoroutes, ports, aéroports, tramways, métros, stades).

Quels sont les avantages du PF pour les emprunteurs et pour les banques ?

Le Project Finance est une technique qui permet une meilleure maitrise des risques liés au projet à travers les études réalisées par des conseillers indépendants et l’allocation optimales des risques aux opérateurs les mieux à même de les assumer. Cette maitrise des risques est profitable à l’ensemble des intervenants dans une structure Project Finance notamment l’emprunteur et les banques.

Quel est le niveau de développement du PF en Algérie ?

Le Project Finance a connu une bonne dynamique pendant les années 2000 jusqu’à la promulgation de la LFC 2009. Pendant cette décennie, on a vu le financement de plusieurs grands projets à travers cette technique. Je cite à titre d’exemple, les 13 projets de stations de dessalement, 4 centrales électriques, 2 projets télécoms, 2 cimenteries, un complexe d’ammoniac et d’urée…etc.. La LFC 2009 a interdit le recours aux financements en devises et les mécanismes de garantie offerts par les agences d’exportation (ECA) et les organismes multilatéraux (SFI, BAD, BEI). Ces contraintes ont freiné l’essor du Project Finance en Algérie et ont conduit l’Etat à prendre le relais en finançant les projets d’infrastructure et d’énergie par le budget. Dans un contexte de baisse des recettes fiscales et de divises, l’Etat algérien aura tout intérêt à confier le financement des projets d’infrastructures socioéconomiques (autoroutes, ports, aéroports, tramways, métros, stades) aux acteurs de marché. La technique du Project Finance pourra également contribuer à la réalisation des projets énergétiques dont l’Algérie a besoin notamment dans le domaine des énergies renouvelables. Cette technique est largement utilisée pour financer les projets de parcs solaires (thermiques et photovoltaïques) et fermes éoliennes en Afrique du Nord et partout dans le monde.

Quelles sont les difficultés générales rencontrées lors du montage d’un financement PF ? Et quelles sont les difficultés spécifiques à l’Algérie ?

La méconnaissance de cette technique par les opérateurs économiques rend un peu difficile la maturation des projets en termes de due diligence. Pour faire face à ces difficultés il est indispensable que les opérateurs mandatent en aval une banque-conseil qui jouera le rôle d’Arrangeur Chef de File. La banque-conseil aura pour rôle d’aider le promoteur de projet dans le choix des différents conseils indépendants et l’élaboration des cahiers de charge qui leur seront imposés (Scope of Work). Il appartient également à la banque-conseil d’établir les termes et conditions financières à appliquer au contrat de crédit. Enfin, il lui incombe de piloter le process d’invitation et de syndication auprès des autres prêteurs.

Pour ce qui des difficultés spécifiques à l’Algérie, l’absence d’un mécanisme de hedging (couverture) sur le marché de change et du taux d’intérêt ajoute de l’incertitude sur la maitrise des risques financiers supportés par les sponsors des projets. Je peux également citer le manque de liquidité sur le marché financier qui rend difficile le recours à des tranches obligataires. Enfin, les banques de la place gagneront – avec l’appui de l’ABEF – à établir un taux de référence de la place (à l’instar du LIBOR et l’EURIBOR) pour faciliter le travail de syndication et de levée de fonds auprès du secteur bancaire.

 

Avez-vous travaillé sur des financements d’infrastructures sur ce modèle (en Algérie ou ailleurs)? Quel est votre retour d’expérience ?

A titre personnel, j’ai exercé le métier du Project Finance en Europe où j’ai participé au montage de plusieurs projets d’infrastructures comme des autoroutes, des tramways, des stades et des lignes ferroviaires grande vitesse. J’ai participé aussi au montage d’un grand port en eau profonde en Afrique du Nord.

Pour ce qui est de l’Algérie, Société Générale Algérie a assuré le montage en sa qualité d’Arrangeur Chef de File de la quasi-totalité des financements de projets promus par des opérateurs privés. Nous avons ainsi arrangé ces dernières années des financements de projets dans les secteurs suivants, industrie du verre, industrie du papier, l’agro-alimentaire, l’industrie pharmaceutique, les télécoms, les cimenteries. Notre banque a réussi à lever près de 200Mrds DZD sur ces projets dont 30Mrds de participations de notre banque.

Qu’est-ce qui pourrait favoriser selon vous le développement du PF en Algérie?

La technique du Project Finance permet de financer des projets d’infrastructures, d’énergies et d’industries par des mécanismes de marché. L’Algérie a consentit de gigantesques plans d’investissement de plusieurs centaines de milliards de dollars pour doter le pays d’infrastructures socioéconomiques et des capacités énergétiques. Ces programmes ont été financés par recours au budget de l’Etat. Dans un contexte de baisse des recettes, la technique du Project Finance permettra de soulager le budget de l’Etat. De plus, l’implication des acteurs de marché dans le financement de type de projet introduira davantage d’efficacité en termes de maitrise des coûts de réalisation des projets et de respect des calendriers de réalisation.

L’encouragement des autorités publiques constitue une garantie pour le développement de cette technique de financement.

MEK.

- Advertisement -
Articles associés

Derniers articles