Le président de la Commission d’organisation et de surveillances des opérations de bourse (COSOB), Abdelhakim Berrah, a fait savoir, ce dimanche, que même la place boursière palestinienne est plus importance que celle de l’Algérie.
Après avoir rappelé que la COSOB est l’autorité de régulation du marché financier algérien, dont le rôle est de réguler la bourse, protéger les investisseurs, contrôler les sociétés de capital investissement et les plateformes de crowd-funding, émettre des règlements et surveiller leurs applications. M. Berrah a relevé que le marché financier en Algérie n’est « très développé ». « Il n’est pas développé à la mesure de l’économie nationale. Il ne reflète pas l’économie nationale », a-t-il expliqué, en ajoutant que cela est dû au manque de transparence, d’éducation financière des dirigeants des entreprises publiques et privées, et au manque de professionnels de marché pour accompagner les entreprises qui ne recourent pas assez au conseil. « Elles ne se font pas accompagnées vers un financement par exemple par la bourse, en émission des obligations (titres de créances) ou en actions, c’est-à-dire, elles ouvrent le capital », a-t-il dit.
« Même la Palestine nous dépasse »
Interrogé sur l’absence de visibilité de la Bourse d’Alger, Abdelhakim Berrah a expliqué que « Djazaïr Index » (indice de la Bourse d’Alger) « ne reflète pas l’économie ». « Le nombre d’entreprises cotées à la Bourse d’Alger est minime par rapport à l’économie. Quand il y a un événement qui se passe sur la scène, il n’est pas répercuté dans la bourse. Chez-nous, la Bourse n’est pas efficiente, parce que, le nombre d’entreprises cotées n’est pas grand. C’est pour cela qu’on ne le voit pas défiler (…) nous somme parmi les plus petites bourses au monde, même la Palestine nous dépasse », a-t-il précisé lors de son passage dans l’émission LSA Direct du journal Le Soir d’Algérie.
A propos de la bourse palestinienne qui est, selon lui, plus importante que celle de l’Algérie, le président de la COSOB a indiqué qu’elle a plus d’entreprises cotées « parce qu’il est plus difficile d’avoir un financement bancaire, les entreprises sont transparentes, même si elles sont petites (des PME), mais elles ont recours à la bourse, donc le marché financier reflète l’économie. Chez-nous, le nombre d’entreprises cotées est tellement petit qu’il ne reflète pas l’économie ».
Précisant que 28 entreprises sont cotées à la bourse palestinienne, il a estimé que l’idéal pour la Bourse d’Alger, c’est d’arriver à une dizaine d’entreprises cotées d’ici la fin 2021.
Abdelhakim Berrah a rappelé que le marché boursier algérien a été mis en place « lorsqu’il y avait les »conditionnalités » du FMI (Fond monétaire international, ndlr), des réformes structurelles… Ensuite, dans les années 2000, nous n’avons pas eu recours à la bourse. Il y a eu peu d’obligations qui ont été émises par les entreprises, et peu d’entreprises qui ont été capitalisées à la Bourse d’Alger. C’était un choix parce qu’il y avait des facilités de financement via le secteur bancaire, via des prêts bonifiés que l’on donnait aux entreprises, mais, c’était une erreur. Parce que, l’entreprise quand elle va en bourse, cette dernière exige de la transparence, les état financiers soient publics et publiés régulièrement, une gestion beaucoup plus saine des entreprises, et ça assure la pérennité des entreprises. »
« Une bourse commence à fonctionner sainement à partir de 20 entreprises »
« Il y a eu une liste d’entreprises publiques qui devaient être introduites en bourse, ça ne s’est pas fait et c’est dommage, parce que, le privé dit qu’on attend l’Etat fasse le premier pas et l’Etat dit que c’est au privé de s’emparer de la Bourse d’Alger », a–il dit, en précisant qu’il y a trois séances effectuées par semaine à la Bourse. Il a relevé qu’ »il n’y pas assez de liquidités à la Bourse d’Alger et de profondeur ». « Une bourse commence à fonctionner sainement à partir de 20 entreprises à peu près », a-t-il indiqué, en expliquant que « pour que celui qui retire sa mise d’une entreprise A puisse la mettre dans une entreprise B. Là, s’il retire, il n’a pas où la mettre ». « Les entreprises cotées, il se trouve que ce sont d’excellentes entreprises. Elles donnent des rendement supérieurs à 10 par fois », a-t-il dit. Selon M. Berrah, cinq entreprises sont actuellement cotées à la Bourse d’Alger, à l’instar de Biopharm, Saidal, Hôtel Aurassi, Alliance Assurances, qui sont « transparentes » et fond beaucoup d’effets en termes de « gouvernance ». « Notre souhait c’est que d’autres entreprises qu’elles soient publiques ou privées viennent à la bourse ».
« Les entreprises publiques, si elles veulent assurer une bonne gestion, une gouvernance saine et une pérennité, doivent venir en bourse. Et ce son les meilleures qui viennent en bourse. Parce qu’une entreprise qui vient en bourse doit donner des dividendes », a-t-il expliqué, en ajoutant que la bourse « c’est l’aboutissement du travail d’un manager », en citant ce qui se fait dans les pays développés, alors que « chez-nous, ce n’est pas perçu de la sorte ». Pour M. Berrah, c’est une question d’éducation financière, de passerelle entre l’université et l’entreprise, en insistant sur l’importance de la formation.
Selon le président de la COSOB, la réticence des entreprises privées à aller en bourse, relève peut-être d’un soucis de transparence, d’éducation financière. « On répète tout le temps qu’il n’y pas d’affecte avec l’entreprise. L’entreprise on la crée pour gagner de l’argent et pas pour autres choses. Si on cherche la notoriété, c’est mener notre entreprise en bourse », a-t-il expliqué, en ajoutant que la bourse règle le problème de transmission, en donnant l’exemple que dans la plupart des pays des monde, les entreprises font faillite à la transmission. « En France, 50% des entreprises font faillites à la transmission au départ du fondateur. La bourse règle la question de transmission, entre les héritiers, les actionnaires… C’est pour cela que pour l’entreprise privée, elle gagnera beaucoup à venir en bourse », a-t-il précisé.
« Quand on parle de réformes structurelle, la bourse en est un élément principal »
M. Berrah a indiqué qu’il y a « un frémissement » d’entreprises privées qui veulent venir en bourse, en faisant état de six PME qui ont déposé leurs dossiers. Il a rappelé que la PME Aom Invest est déjà rentrée en Bourse. « On fait avec elles du coaching, nous les accompagnons dans le processus qui n’est pas facile, car, c’est de la transparence, c’est un vrai business plan… », a-t-il ajouté.
« Si on veut développer la bourse, c’est l’une des réformes structurelles majeures. Parce que, même les banques vont venir se financer. Quand on parle de réformes structurelle, la bourse en est un élément principal », a-t-il expliqué.
« Nous ne connaissons pas bien le marché, sa capacité d’absorption et les problèmes que va générer la désintermédiation financière », a-t-il dit, en ajoutant que le gouvernement et le ministère de l’Industrie travaillent à identifier des entreprises publiques à mettre en bourse. « Il y a des pépites dans les entreprises publiques. On peut trouver un groupe déficitaire, mais à l’intérieur il y a deux ou trois filiales qui peuvent être mises en bourse. A l’époque on avait identifié une cimenterie, Cosider,Mobilis, il y a les banques, les assurances… qui peuvent servir de moteur. Si on ne le fait, il y a des chances que le secteur public ait de plus en plus de difficultés à assurer sa pérennité », a-t-il estimé.
Concernant le climat des affaires en Algérie, président de la COSOB a relevé qu’ »il y a des signaux par fois contradictoires ». C’est vrai qu’il s’améliore, l’Etat fait beaucoup pour l’améliorer. La condition pour améliorer ce climat des affaires, c’est la transparence de tous les acteurs. La numérisation va apporter son lot de transparence. C’est une stabilité juridique, une facilitation accrue et une ouverture à l’international », a-t-il détaillé.