L’avenir des politiques de développement durable soulève ces temps ci de nombreuses interrogations et la COP 22 de Marrakech s’est déroulée dans une ambiance bien éloignée de celle de la précédente.
Les dirigeants politiques, de par le monde, semble se distancier : le nouveau président des Etats Unis a annoncé ses très fortes réserves, le climato-scepticisme gagne du terrain dans les classes politiques occidentales, en France par exemple, où le thème environnemental est ignoré, voire contesté dans les premières phases de la prochaine campagne présidentielle. Environnement, réchauffement, biodiversité, responsabilité sociale semblent quitter le haut des agendas politiques.
Pourtant, dans le même temps, la demande citoyenne demeure et va même en se renforçant. Non pas au travers d’organisations militantes – les partis écologistes ont vu fondre leurs troupes – mais de façon beaucoup plus intéressante, car elle s’exprime dans la vie de tous les jours.
Le consommateur semble bien avoir pris le pas sur le citoyen. Les comportements d’achat, les attentes au quotidien montrent que la demande de responsabilité sociale et environnementale est forte, partout dans le monde. Le porte-monnaie de la ménagère a presque plus d’importance que son bulletin de vote, car elle l’utilise et le fait valoir chaque jour. Et pour pouvoir répondre, les principales entreprises, nationales et surtout multinationales, ont désormais intégré cette dimension à la fois dans leurs produits – plus conformes – et surtout dans leur marketing et leur communication.
Finalement, marketing et communication prennent le relais, sur le terrain, des programmes politiques. De ce fait, c’est une implantation bien plus solide de ces idées et de ces attentes qui s’opère, puisqu’elle repose sur le comportement dans la vie quotidienne des acteurs économiques de base que sont les consommateurs. Les principales entreprises multinationales du domaine de la grande consommation, les Nestlé, les Unilever, les Procter& Gamble ont toutes réorienté, de façon durable, leur approche du marché, leurs stratégies marketing et leur communication.
C’est une nécessité vis-à -vis de leurs clients consommateurs, mais elles y trouvent aussi leur intérêt financier.
Le Jim Stengel Index montre que les performances boursières progressent si dans leur démarche commerciale, un objectif social est poursuivi par les entreprises.
La responsabilité sociale de ces entreprises s’exprime de multiples façons mais leur expression publique est désormais focalisée sur leur impact au regard des fondamentaux du développement durable, sur leur apport au progrès économique, environnemental et sociétal. Il n’est qu’à constater l’étonnante percée du concept de Commerce équitable sur les ventes de produits issus de matières premières telles que café, chocolat ou riz.
Il n’est aussi qu’à observer la généralisation du « Purpose marketing », qui lie le marketing commercial des produits à des objectifs sociétaux et qui se développe mondialement. Les entreprises doivent désormais montrer (et démontrer) leur contribution au développement plus harmonieux de la société : les engagements environnementaux ou sociaux du « Sustainable Living Plan » décennal de Unilever, la « Shared Value » de Nestlé, se traduisent sur les linéaires des supermarchés comme dans la publicité sur tous les medias par des engagements civiques et sociétaux qui complètent la valorisation classique des qualités du produit.
Au fond, c’est dans la vie quotidienne, donc dans la réalité la plus concrète, que se forge une approche des grandes questions sociétales et environnementales, plus solide que les déclarations gouvernementales souvent rapidement oubliées. Et comme c’est elle qui établit le lien entre fabricants et consommateurs, la fonction marketing et communication est devenue un acteur fondamental mais aussi le garant de la poursuite du nécessaire combat pour sauver la planète des ses maux structurels.
Mission inattendue mais pourtant bien réelle !
Jacques Bille