La Banque mondiale a abordé les efforts de l’Algérie dans la réduction du gaz torché. Dans son dernier rapport de suivi de la situation économique du pays publié la semaine dernière, l’institution financière internationale a souligné que l’Algérie a enregistré la deuxième plus forte réduction mondiale du torchage de gaz en 2024.
« L’Algérie a enregistré en 2024 la deuxième plus forte réduction mondiale du torchage de gaz, résultant à la fois d’une baisse de la production et d’une diminution de l’intensité du torchage », précise la Banque mondiale dans son document intitulé : « Répondre aux défis climatiques et soutenir le développement durable ».

« Alors que le torchage du gaz a augmenté à l’échelle mondiale en 2023, l’Algérie a enregistré des progrès notables. Le volume de gaz torché y a diminué de 5 %, et l’intensité de torchage, quantité de gaz brûlée par unité de production, a baissé de 3 %, faisant de l’Algérie le pays leader mondial en matière de réduction du torchage en 2023 », note la même source.
Et d’ajouter : « Depuis 2020, Sonatrach a mis en œuvre plusieurs projets de récupération du gaz torché à Hassi Messaoud, le plus grand champ pétrolier du pays. En 2023, la société a étendu ces initiatives à d’autres gisements, notamment à Tiguentourine, Ohanet et Tin-Fouye-Tabankort, où les nouveaux projets devraient entraîner de nouvelles réductions des volumes de gaz torché. »
La Banque mondiale explique : « Le torchage du gaz consiste à brûler le gaz naturel excédentaire libéré lors de l’extraction du pétrole ou du gaz naturel. Cette pratique courante dans les puits de pétrole, les sites de production gazière et les raffineries est principalement utilisée pour des raisons de sécurité ou lorsque le gaz ne peut être capturé, traité ou transporté facilement. »
« Lors de l’extraction du pétrole brut, le gaz naturel apparaît souvent comme un sous-produit. Lorsque sa récupération ou son stockage n’est pas économiquement viable, il est brûlé sur place. Le torchage permet ainsi d’éviter l’accumulation de gaz susceptible de créer des risques d’explosion ou des conditions dangereuses, tout en contribuant à réguler la pression dans les puits pétroliers », ajoute la même source.
Et de souligner : « Cependant, si cette pratique réduit les risques immédiats, elle a des conséquences environnementales importantes : la combustion du gaz libère du dioxyde de carbone (CO2) et d’autres polluants atmosphériques, contribuant aux émissions de gaz à effet de serre et au changement climatique, tout en gaspillant une ressource énergétique précieuse. »
« Ces dernières années, des efforts accrus ont été déployés pour réduire le torchage grâce à la mise en place d’infrastructures de récupération et de valorisation du gaz. Plusieurs pays ont adopté des réglementations strictes pour limiter ou éliminer cette pratique, incitant les entreprises à réutiliser le gaz plutôt qu’à le brûler », note la Banque mondiale.
« La stratégie de croissance de l’Algérie devrait également tenir compte des efforts mondiaux de décarbonation »
Cette dernière rappelle également que « la stratégie de croissance de l’Algérie devrait également tenir compte des efforts mondiaux de décarbonation ». « La transition climatique mondiale devrait entraîner une baisse structurelle de la consommation d’hydrocarbures, réduisant la demande pour les exportations énergétiques Algériennes », explique-t-elle. Et de préciser : « Avec l’accélération de l’adoption des technologies propres et à haute efficacité énergétique, la demande mondiale en hydrocarbures devrait ralentir, en particulier dans les économies avancées d’Europe, principaux partenaires commerciaux de l’Algérie. »
La Banque mondiale rappelle les projections internationales, selon lesquelles « la demande mondiale de pétrole et de gaz atteindrait un pic d’ici 2030 avant de décliner progressivement, tandis que l’offre mondiale de pétrole continuerait de croître, notamment dans les pays producteurs non-membres de l’OPEP. » « Cette dynamique devrait se traduire par des prix des hydrocarbures structurellement plus faibles, représentant un défi majeur pour le modèle économique de l’Algérie ainsi que pour ses équilibres externes et budgétaires, les hydrocarbures constituants plus de 90 % de la valeur totale de ses exportations de biens », prévoit-elle.
L’institution internationale rappelle aussi la décarbonation européenne qui « devrait avoir un impact particulièrement marqué sur les exportations hors hydrocarbures de l’Algérie. » Selon elle : « Le Mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF) mis en place par l’Union européenne imposera des droits additionnels sur plusieurs produits à forte intensité carbone importés dans l’UE, sauf s’ils ont déjà été soumis à une taxation équivalente avant exportation. »
« À partir de 2026, le MACF s’appliquera notamment au ciment, au fer et à l’acier, à l’aluminium, aux engrais, à l’électricité et à l’hydrogène. Étant donné que les exportations hors hydrocarbures de l’Algérie sont principalement concentrées dans les engrais, le fer et l’acier ainsi que le ciment, ce mécanisme devrait avoir des effets significatifs sur la compétitivité et les volumes d’exportation algériens », prévient-elle.
Elle estime que « la décarbonation des industries existantes, la réforme des subventions aux carburants et l’introduction d’une fiscalité carbone et le développement du secteur des énergies vertes constitueraient des priorités stratégiques. » Elle estime également que « la transition écologique des industries à forte intensité carbone, telles que les engrais, le fer et l’acier ou le ciment, sera essentielle pour préserver l’accès des exportations algériennes au marché européen dans le cadre du Mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF). »
« Cette transition pourrait être soutenue par des investissements dans des technologies de production plus propres, tandis que les subventions énergétiques faussant les prix et favorisant les modes de production intensifs en énergie pourraient être progressivement supprimées », explique la Banque mondiale.
Et de préciser : « L’introduction d’une fiscalité carbone en Algérie permettrait non seulement de réduire les coûts liés au MACF pour les exportations, mais aussi d’améliorer la mobilisation des recettes fiscales et d’élargir l’espace budgétaire. Par ailleurs, l’Algérie dispose d’un potentiel considérable dans le domaine des énergies solaire et éolienne, ainsi que dans le développement d’exportations d’hydrogène vert vers l’Europe. »
Les émissions de CO2 par habitant en Algérie ont atteint en moyenne 6,4 tonnes équivalent CO2 entre 2013 et 2023
« L’adoption de stratégies d’atténuation du changement climatique permettrait de répondre aux enjeux climatiques tout en générant des bénéfices pour la population algérienne », estime encore l’institution financière internationale, et de préciser que « les émissions de CO2 par habitant en Algérie ont atteint en moyenne 6,4 tonnes équivalent CO2 entre 2013 et 2023, un niveau supérieur à celui observé dans les autres pays d’Afrique du Nord, mais nettement inférieur à celui des principaux producteurs d’hydrocarbures de la région. »

Selon la même source, « la combustion d’énergie fossile constitue la principale source d’émissions, mais les émissions fugitives, notamment issues du torchage de gaz lors de l’extraction du pétrole brut, y contribuent également de manière significative. » Elle souligne que « l’Algérie a engagé des efforts notables pour réduire ses émissions, en particulier depuis 2020, avec une diminution marquée de l’intensité du torchage observée en 2023. »
« L’intégration des considérations d’atténuation climatique dans la stratégie de développement économique permettrait à l’Algérie de participer à la réduction mondiale des gaz à effet de serre, tout en réduisant la pollution atmosphérique locale et en générant des gains de santé publique et de productivité pour sa population », recommande la Banque mondiale.






