Après avoir été pendant longtemps le principal fournisseur de blé de l’Algérie, couvrant parfois jusqu’à 80 % de ses besoins, la France a vu ses exportations baisser fortement ces dernières années.
En 2019, la France avait exporté vers l’Algérie près de 5 millions de tonnes de blé tendre, pour un montant avoisinant 1 milliard d’euros. Mais depuis 2020, la situation a changé. L’Algérie a modifié son cahier des charges pour l’importation des céréales, en revoyant à la baisse certains critères techniques. Cette décision a permis à d’autres fournisseurs, notamment de la mer Noire (Russie et Ukraine), de prendre place sur le marché algérien, grâce à des prix plus compétitifs.
La baisse des achats de blé français n’est pas seulement liée à la politique. La production française a connu des difficultés ces dernières années, et l’Algérie a cherché à diversifier ses sources pour garantir sa sécurité alimentaire. Cependant, certains observent un lien entre cette chute et la dégradation des relations entre Alger et Paris depuis juillet 2024. Beaucoup parlent de « mesures de rétorsion » de la part de l’Algérie.
Les chiffres montrent en tout cas une tendance claire. Les importations de blé français par l’Algérie sont passées de 5 millions de tonnes en 2019 à 1,5 million de tonnes en 2024. Selon le journal Le Progrès, les ventes « risquent d’être proches de zéro » en 2025. Le même journal rappelle que le dernier bateau de blé français a « déchargé sa cargaison en Algérie en juillet dernier », peu avant le début des tensions diplomatiques.
En octobre 2024, les exportateurs français ont été écartés d’un appel d’offres de l’Office algérien interprofessionnel des céréales (OAIC) pour la livraison de 500 000 tonnes de blé. L’organisme avait alors expliqué : « En ce qui concerne la consultation restreinte lancée par l’OAIC le 6 octobre 2024, nous précisons qu’elle a été régie par des critères techniques spécifiques, en fonction des besoins industriels particuliers à cette période ».
Le journal Le Progrès souligne également qu’« ironie du sort, c’est le Maroc qui est devenu le premier acheteur de blé tendre français devant la Chine, compensant en partie l’arrêt des exportations vers l’Algérie ».
Cette évolution s’inscrit dans un contexte plus large de changement dans les échanges entre la France et l’Algérie. Si certains parlent d’un recul des achats algériens auprès de la France, les chiffres officiels publiés début mars par la direction générale du Trésor français apportent un éclairage différent.
En 2024, les échanges commerciaux entre les deux pays ont atteint 11,1 milliards d’euros, contre 11,6 milliards d’euros en 2023. Cette baisse s’explique par la diminution des prix des hydrocarbures, principale exportation algérienne vers la France. Les exportations françaises vers l’Algérie, elles, ont progressé, atteignant 4,8 milliards d’euros, soit une hausse de 6,6 % par rapport à 2023.
Toutefois, pour le secteur agricole français, la tendance reste négative. Même si les livraisons de céréales ont légèrement repris en 2024 (329 millions d’euros), elles restent bien en dessous des niveaux précédents.
Selon la direction générale du Trésor, l’agriculture, qui occupait autrefois une place importante dans les échanges entre les deux pays, n’est plus que le quatrième poste des exportations françaises vers l’Algérie, derrière les produits industriels, les matériels de transport et les équipements mécaniques, électriques et électroniques.