La demande mondiale d’or noir ne devrait pas faiblir en dépit des incertitudes géopolitiques, indique mardi l’Opep dans son rapport mensuel sur le pétrole. L’organisation des pays exportateurs de pétrole maintient ses prévisions de croissance de la demande communiquées en avril.
Le monde devrait ainsi consommer 104,5 millions de barils de pétrole par jour (mb/j) en moyenne en 2024, puis 106,3 mb/j en 2025 après 102,2 mb/j en 2023, selon les projections mensuelles de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep).
« Les prévisions de croissance de la demande mondiale de pétrole pour 2024 demeurent globalement inchangées par rapport à l’évaluation du mois dernier à 2,2 mb/j », écrit ainsi l’Opep dans son rapport.
Elle note toutefois « quelques légers ajustements à la hausse » pour le premier trimestre 2024, notamment concernant le continent américain et la Chine en raison d’une demande meilleure que prévu, compensée toutefois par une révision à la baisse de la demande au Moyen-Orient pour les deuxième et troisième trimestres.
En conséquence, « l’OCDE devrait connaître une croissance de près de 0,3 mb/j, tandis que les pays non membres de l’OCDE devraient connaître une croissance d’environ 2,0 mb/j », selon le rapport.
En 2025, la croissance de la demande mondiale devrait rester robuste à 1,8 mb/j, inchangé par rapport à l’évaluation faite au mois d’avril, essentiellement portée par les pays non membres de l’OCDE (1,7 mb/j).
L’Opep met toutefois en garde contre les « incertitudes » qui pèsent sur ces projections, compte tenu des « développements géopolitiques en cours dans plusieurs régions ».
Elle appelle également à surveiller le rythme anticipé du déclin de l’inflation, qui va « influencer les coûts de production du pétrole brut » et souligne que l’influence du niveau limité d’investissement dans l’exploration et la production « demeure incertaine, dans un contexte de recherche continue d’efficacité et de meilleure productivité dans l’ensemble de l’industrie ».
Le pétrole fléchit, le marché doute de l’unité de l’Opep+
Les cours du pétrole se sont repliés, mardi, les opérateurs s’interrogeant sur l’unité de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) et de ses alliés de l’accord Opep+, à deux semaines d’une réunion cruciale.
Le prix du baril de Brent de la mer du Nord pour livraison en juillet s’est contracté de 1,17%, pour clôturer à 82,38 dollars. Le baril de West Texas Intermediate (WTI), la bourse spécialisée dans l’énergie.) avec échéance en juin a lui reflué de 1,39%, à 78,02 dollars.
Les derniers chiffres mensuels publiés mardi par l’Opep montrent que les huit pays qui se sont engagés, depuis novembre, à réduire leur production de 2,2 millions de barils par jour, ont pompé en avril près de 600.000 barils de plus que prévu.
« Ce rapport est un camouflet pour l’Opep », a réagi Robert Yawger, de Mizuho. « Ils mettent en avant le fait qu’ils ont réduit leurs volumes, mais ils sont toujours en surproduction. C’est une surprise, et pas une bonne, pour l’Opep. »
Sur le papier, le groupe élargi de l’Opep+ a extrait quotidiennement 246.000 barils de moins qu’en mars, mais ne tient toujours pas ses engagements totaux. Au total, le cartel a réduit, en trois fois, son objectif de production de 5,8 millions de barils par jour depuis octobre 2022.
Mardi, le Kazakhstan a compliqué encore l’équation en estimant qu’il devrait être autorisé à mettre davantage de brut sur le marché en 2025. D’autres pays membres ont des velléités similaires, notamment les Emirats arabes unis, la Russie et l’Irak.
« Les gens croient les Saoudiens, le Koweït ou l’Algérie, mais s’interrogent sur tous les autres », explique Robert Yawger, alors que se profile la réunion du 1er juin, lors de laquelle l’éventuel prolongement des coupes de production au-delà du deuxième trimestre sera discuté.
Outre la saga de l’Opep+, le marché a fraîchement accueilli la publication, aux États-Unis, de l’indice de prix à la production PPI, ressorti à 0,5% sur un mois en avril, alors que les économistes s’attendaient à une hausse de 0,3% seulement.
C’est un nouveau signe de la ténacité de l’inflation, de nature à encourager la banque centrale américaine (Fed) à rester ferme, ce qui met sous pression la consommation et la demande de pétrole.
En l’état, la demande fait déjà question depuis plusieurs mois. Robert Yawger relève notamment que l’écart entre le prix de l’essence et celui du brut est tombé mardi à son plus bas niveau depuis deux mois et demi.
Des marges resserrées peuvent témoigner de moindres besoins du marché américain en essence, ce même alors qu’approche, dans deux semaines, le jour férié de Memorial Day, qui marque traditionnellement le début de la saison des déplacements (routiers et aériens) aux États-Unis.