L’agriculture algérienne fait face ces dernières années au manque de pluviométrie, particulièrement la céréaliculture dite pluviale implantée dans le nord du pays (type d’agriculture qui dépend des précipitations pour son irrigation).
Et la saison 2022/2023 n’est pas épargnée par le manque de précipitations. Après les épisodes neigeux et pluvieux entre janvier et début février, aucune chute de pluie n’a été enregistrée durant les mois de mars et avril en cours, suscitant des inquiétudes quant au devenir des cultures céréalières au nord du pays.
Pour faire face à cette situation et éviter que la saison céréalière ne soit compromise, le ministère de l’Agriculture et du Développement rural avait appelé fin mars dernier les agriculteurs à entamer l’irrigation d’appoint. Les agriculteurs et les professionnels de la filière sont inquiets et pessimistes.
Le secrétaire générale du Conseil national interprofessionnel de la filière céréalière (CNIFC), Abdelghani Benali, et le président de la Chambre nationale d’agriculture, Mohamed Yazid Hambli, se sont exprimés sur ce sujet.
Intervenant dimanche sur les ondes de la radio chaîne 2, le SG du CNIFC a d’abord rappelé l’objectif fixé d’atteindre une production 9 millions de tonnes de blé, précisant que l’Algérie en produit actuellement entre 30 et 35%, en majorité du blé dur. En matière de blé tendre, l’Algérie en importe chaque année 7 à 8 millions de tonnes, selon le SG du CNIFC.
Au sujet de la saison agricole au nord du pays, particulièrement, la filière céréaliculture, M. Benali a relevé que la saison actuelle est caractérisée par « un grand manque de pluviométrie », et sera marquée par « des cultures compromises », « une mauvaise production » et « beaucoup de pertes pour les agriculteurs ». M. Benali a appelé à trouver rapidement une solution à ce manque d’eau.
« On est à la quatrième année de sécheresse et les agriculteurs sont fortement impactés. Si le président de la République n’intervienne pas, beaucoup d’agriculteurs vont déclarer faillite à cause du manque d’eau », a-t-il dit.
« Les agriculteurs ne s’attendaient pas à cette situation. On pensait que durant les mois de mars et d’avril il y aura des pluies mais ce n’était pas le cas. Beaucoup de récoltes sont perdues, car on n’a pas suffisamment de retenues d’eau pour faire l’irrigation d’appoint », a relevé M. Benali, selon qui, les retenues d’eau est une affaire du ministère de l’hydraulique.
Le SG du CNIFC a préconisé la réalisation de retenues collinaires à utiliser dans l’irrigation d’appoint. Il a également recommandé de transférer la gestion de l’irrigation agricole au ministère de l’Agriculture, comme c’était le cas avant.
Evoquant la question de l’assurance agricole, M. Benali a rappelé les deux produits d’assurance proposés « grêle et incendie ». Il a estimé que le produit d’assurance « n’est pas confortant » pour que l’agriculteur y souscrive. « Avec cette sécheresse, ils vont pas l’assurer, parce qu’elle n’entre pas dans la gamme d’assurance », a-t-il noté.
« Cette année, c’est toute l’Algérie qui est sinistrée. Le Nord de l’Algérie, on peut le considérer comme sinistré. On va avoir une perte qui va dépasser les 75% ou les 80% et tout ça n’est pas assurable, parce que, ce sont des aléas climatiques non contrôlables. C’est la sécheresse », a-t-il dit, en appelant le président de la République « à décreter une situation spéciale pour une année spéciale ».
De son côté, le président de la Chambre nationale d’agriculture a estimé que la dernière semaine du mois d’avril est cruciale. « Certes, la saison céréalière pluviale passe par une période difficile mais nous ne pouvons pas nous prononcer avant la fin du mois d’avril », dit-il, dans l’édition de ce lundi 24 avril du journal Le Soir d’Algérie.
Selon lui, les agriculteurs attendent toujours des précipitations avant la fin du mois en cours. « Si les pluies ne tombent pas durant cette dernière semaine d’avril, la récolte céréalière sera probablement mauvaise », a-t-il estimé, et d’ajouter : « Même pour irriguer ces cultures, il n’y a pas d’eau. »
Soulignant le déficit en pluie qui a caractérisé l’hiver 2022/2023, Mohamed Yazid Hambli a fait savoir que la céréaliculture pluviale profite en temps normal des chutes de pluie des mois de janvier et février. Même si le mois de janvier de cette année a été pluvieux, le mois de février, lui par contre, a été particulièrement sec.
Il a fait remarquer que cette situation de sécheresse préoccupante impacte d’autre filières, notamment l’élevage ovin et bovin. En effet, la rareté des précipitations touche également les surfaces fourragères. Il évoque aussi la filière arboriculture qui, elle aussi, « sera sérieusement touchée par la sécheresse ».
M. Hambli a précisé que les surfaces céréalières des régions du sud du pays ne sont pas concernées par le manque de pluviométrie, car « elles pratiquent l’irrigation d’appoint ».
Le Département américain de l’agriculture « USDA », qui avait publié une mise à jour de ses prévisions pour l’Algérie le 30 septembre 2022, prévoyait une amélioration de la production céréalière durant la campagne 2022/2023, et ce, grâce à une amélioration des conditions météorologique avec une bonne pluviométrie qui devaient marquer l’actuelle saison agricole.
Le département américain tablait sur une production de 3,3 millions de tonnes de blé et 1,2 million de tonnes d’orge durant la saison actuelle. L’USDA prévoyait également une augmentation de 38% de la production céréalière en Algérie au cours de la campagne 2022/2023.
Pour rappel, durant la saison 2021/2022, la production céréalière de l’Algérie s’était élevée à plus de 41 millions de quintaux (plus de 4,1 millions de tonnes), contre 27,6 millions de quintaux (2,76 millions de tonnes) durant la saison 2020/2021.