Le Premier ministre, Abdelaziz Djerad, s’est exprimé sur la situation économique de l’Algérie, dans son mot à l’occasion de la publication du Plan de relance économique 2020-2024. A la tête du Gouvernement depuis une année et demi, Abdelaziz Djerad a dressé son constat sur l’économie algérienne fortement dépendante des prix internationaux des hydrocarbures qui ont connu une baisse tendancielle depuis le choc de 2014.
« Grace à ses ressources en hydrocarbures, pétrole et gaz naturel, l’Algérie a pu assurer un certain niveau de développement économique, notamment par le développement de nombreuses infrastructures, et concrétiser un Etat Social garantissant notamment l’éducation et la santé gratuite pour tous », a écrit Abdelaziz Djerad dans sa déclaration publiée sur le site du Premier ministère.
Soulignant que « le secteur des hydrocarbures occupe une place centrale dans notre économie, assurant plus de 90% des exportations et représentant près de 40% des recettes de l’Etat », et « ce qui constitue sa force constitue également sa plus grande vulnérabilité », le Premier ministre indiqué : « En effet, l’économie algérienne reste très dépendante des prix internationaux des hydrocarbures qui ont connu une baisse tendancielle depuis le choc de 2014. Le Fond de Régulation des Recettes (FRR) a rempli son rôle en amortissant, partiellement la baisse des réserves puisqu’il a été entièrement consommé dès l’année 2017. »
« Le poids écrasant du secteur des hydrocarbures a empêché toute diversification de l’économie »
Par ailleurs, a ajouté Djerad, « l’Algérie n’a pas échappé au phénomène du « syndrome hollandais » qui lie le déclin des industries manufacturières au développement des exportations de ressources naturelles. » « En Algérie, le poids écrasant du secteur des hydrocarbures a empêché toute diversification de l’économie, favorisé les importations par rapport aux exportations (hors hydrocarbures) et a fini par limiter le poids du secteur industriel a seulement 6 à 7 % du PIB », a-t-il noté.
« De manière générale, notre économie connait une faible productivité des moyens de production et souffre notamment de lourdeurs administratives, de carences en termes de gestion, de difficultés d’accès au financement ou encore de l’absence d’une vision intersectorielle de long terme cohérente, pouvant guider et encadrer la mise en œuvre des politiques publiques », a relevé Djerad.
D’autre part, a-t-il encore relevé, « l’économie algérienne a été particulièrement mise à rude épreuve au cours de ces deux dernières années : en 2019 du fait de la crise politique qu’a traversé le pays, et en 2020 du fait de la crise de la Covid-19. Cependant, ces difficultés constituent également des opportunités à saisir pour lancer de grandes réformes économiques et profiter de la restructuration des chaines de valeurs mondiales. »
« La problématique de la mobilisation des ressources financières se pose de plus en plus avec acuité »
Compte tenu de ce qui précède, a estimé le Premier ministre, « l’Algérie devra relever plusieurs défis majeurs dont celui de la diversification économique et celui de l’amélioration du climat des investissements, et réfléchir sur les voies et moyens permettant de mettre sur la bonne voie, dans les meilleurs délais, le processus d’un développement économique national résilient, inclusif et solidaire. »
Dans cet ordre d’idées, a-t-il poursuivi, « la problématique de la mobilisation des ressources financières nécessaires au développement des infrastructures publiques et des investissements des entreprises économiques se pose de plus en plus avec acuité en raison de la persistance de la baisse drastique des ressources provenant des hydrocarbures et des effets de la crise sanitaire sur les activités économiques. »
Pour faire face à cette situation, le Premier ministre a indiqué que « les pouvoirs publics sont appelés à trouver les solutions nécessaires à l’élargissement et à la diversification des sources de financement en déployant les capacités nécessaires et les formules appropriées pour rétablir les liens de confiance, notamment, avec la sphère informelle la plus apte à renouer avec l’inclusion financière et économique. »
Djerad plaide pour une diversification des sources de financement
« Une diversification des sources de financement, particulièrement, des infrastructures serait utile afin de préserver les ressources budgétaires limitées pour les situations sans autre alternative », a-t-il expliqué, en estimant que « les partenariats public-privé (PPP), représentant un potentiel prometteur, devraient être une approche à privilégier dans le financement des infrastructures et services publics ». « Outre les possibilités de mobilisation du financement, les PPP permettraient de tirer profit des capacités d’innovation et de savoir-faire dans la conception, la réalisation, l’exploitation et l’entretien optimal des infrastructures publiques », a-t-il précisé.
Pour Djerad : « La réforme et la modernisation du système bancaire et financière constitue la pierre angulaire de la réussite de toute réforme économique. » « Avec l’amélioration du climat de l’investissement dont elle fait partie, elle constitue la mère de toutes les réformes », a-t-il estimé, en ajoutant : « Il y a également nécessité à améliorer le climat des affaires à travers la simplification des procédures pour la création d’entreprises dont les coûts et délais sont trop importants, et l’amélioration de l’accès au foncier, aux crédits et à des services publics de qualité. Par ailleurs, l’administration n’est pas en reste est doit, elle-même, se moderniser et lutter contre les pratiques bureaucratiques, grâce aux possibilités offertes par le numérique. »
« La complexité croissante du monde et l’accélération des mutations technologiques, économiques et sociales, nous invitent à une élaboration minutieuse de notre politique de développement afin de minimiser les risques d’erreur, favoriser une mise en œuvre diligente, et permettre une flexibilité importante des réajustements nécessaires », a souligné Djerad qui a estimé que « ce plan de relance de relance économique est donc une nécessité impérieuse pour relever tous les défis socio-économique des années à venir. »
« La concrétisation de cette nouvelle approche économique demeure tributaire de la libération de toutes les initiatives des contraintes bureaucratiques »
Abordant le plan de relance économique 2020-2024, le Premier ministre a rappelé que « le Président de la République a tracé les grandes lignes du plan de relance économique, ainsi que le cadre global et intégré, à même de guider les futures politiques économiques et sociales basées essentiellement sur l’égalité des chances pour tous. »
« Ce plan de relance devrait s’appuyer sur une intégration cohérente de tous les aspects des réformes, qu’il s’agisse des réformes macro-économiques, micro-économiques, organisationnelles ou encore institutionnelles. Ces reformes devraient inclure des mécanismes proactifs et efficaces afin de prendre en charge les éventuels effets collatéraux pouvant résulter de ces mesures, notamment sur le pouvoir d’achat des citoyens », a-t-il expliqué.
Selon Djerad, les principaux fondements de ce plan de relance devraient être : le renforcement de l’Etat de droit (primauté de la loi); le renforcement des institutions (renforcement des capacités de l’Etat); la concrétisation de l’égalité des chances (équité sociale); La participation à l’élaboration des politiques (inclusivité); La soutenabilité financière des projets, programmes et/ou réformes; l’amélioration du niveau de l’enseignement (amélioration du capital humain); le renforcement du rôle du secteur privé et des institutions de la société civile.
Cependant, a ajouté le Premier ministre, « la concrétisation de cette nouvelle approche économique demeure tributaire de la libération de toutes les initiatives des contraintes bureaucratiques à travers la numérisation et l’assainissement des legs du passé, en veillant à garantir la stabilité de notre cadre législatif. »
Dans ce cadre, a-t-il expliqué, le Gouvernement a orienté son action sur les aspects suivants : La diversification de notre économie; La maitrise du cadrage de notre commerce extérieure; La valorisation des ressources naturelles, notamment le potentiel minier; La substitution des produits importés par des produits fabriqués localement; La promotion du tissu des entreprises nationales, en particulier PME, les micro-entreprises; La valorisation de nos potentialités humaines créatives et innovantes, notamment celles établies à l’étranger; La révision de la règle 49/51; L’abrogation du droit de préemption et sa substitution par l’autorisation préalable du Gouvernement; La suppression de l’obligation du recours au financement local pour les investissements étrangers; L’annulation du régime préférentiel d’importation des kits CKD/SKD; Le parachèvement de l’écosystème nécessaire au développement des startups et de l’économie de la connaissance.
« La question du foncier industriel constitue l’une des contraintes majeures entravant l’action des investisseurs »
En matière fiscale, selon Djerad, « le Gouvernement a mis en lumière les différentes réformes à mettre en œuvre, telles que la réhabilitation du service public, l’élargissement de l’assiette fiscale, la mobilisation des ressources et la numérisation de l’administration des impôts. » Selon lui, « cela permettrait de lutter efficacement contre la fraude fiscale. » Par ailleurs, a enchaîné Djerad, « la question du foncier industriel constitue l’une des contraintes majeures entravant l’action des investisseurs et un frein à la rationalisation du déploiement territorial du développement industriel. »
Selon lui, dans l’optique d’une plus grande diversification de l’économie, principal objectif du plan de relance économique, le Gouvernement a mis en place un nouveau cadre réglementaire visant à : Inscrire une nouvelle étape pour l’industrie du montage à travers l’identification des avantages à octroyer pour la réalisation d’un taux d’intégration plus élevé; Jeter des bases de la sous-traitance afin d’assurer le développement de l’intégration nationale par des mesures incitatives au profit des PME et PMI; Prendre en charge de manière effective et efficace la question de l’investissement en garantissant la transparence; Mettre en place un mécanisme qui aiderait les investisseurs à acquérir des unités de production à l’arrêt à l’étranger et de bénéficier des opportunités disponibles pour répondre à nos besoins en matériel; La lutte réelle, effective et continue contre la bureaucratie dans toutes ses formes et dans ses dimensions économiques et sociales.
« Nous devons également accélérer la transition énergétique et écologique notamment dans son volet industriel, ainsi que la digitalisation de l’économie qui nous permettra de réaliser un saut de productivité appréciable. Ces deux secteurs peuvent être le fer de lance de notre relance économique. En effet, ces deux domaines connaissent des innovations majeures et devraient porter la croissance mondiale dans les prochaines décennies », a indiqué le Premier ministre.
Et d’ajouter : « Un intérêt particulier devrait également être accordé pour le développement agricole et rural et les industries agroalimentaires, et à la valorisation de nos ressources halieutiques afin de renforcer notre sécurité alimentaire. Ainsi qu’à l’industrie pharmaceutique afin d’assurer la sécurité sanitaire et assurer la couverture des besoins de nos citoyens en médicaments de base de qualité, sûrs, et efficaces. »
Le plan de relance économique devra préserver le caractère social de l’Etat
Par ailleurs, a-t-il estimé, « ce plan de relance devra préserver le caractère social de l’Etat pour une plus grande justice sociale et protéger le pouvoir d’achat du citoyen, notamment celui des catégories les plus vulnérables. Il devra également permettre de renforcer la sécurité énergétique et la sécurité alimentaire du pays afin de préserver sa souveraineté nationale, et de garantir la souveraineté en termes de choix économiques dans le meilleur intérêt du pays. » « Et enfin, il devra garantir un développement économique inclusif et équilibré au niveau de l’ensemble des régions du pays afin de réduire les disparités régionales et la marginalisation dont certaines régions ont souffert », a-t-il dit.
« A ce titre, il est nécessaire d’affirmer que les questions économiques et sociales, de promotion de la bonne gouvernance, d’équilibre financier du système de protection sociale et de modernisation du service public ne peuvent être traduites, discutées ou négociées que dans le cadre d’un dialogue social franc et responsable avec l’ensemble des partenaires économiques et sociaux. Ceux-ci, sont convaincus que seul un climat social serein et apaisé est de nature à permettre à notre pays de franchir les étapes nécessaires à son développement et à sa modernisation », a-t-il plaidé.
Pour Djerad : « Nous vivons aujourd’hui dans un monde où se succèdent les inventions et les évolutions dans les domaines des technologies de l’information, des sciences de la vie, de la fabrication intelligente et des énergies renouvelables, et il nous appartient d’agir de manière proactive pour nous adapter à la vague déferlante de la révolution scientifique et numérique et de la transition industrielle, d’explorer de nouveaux moteurs de croissance et des voies innovantes de développement, pour faire face à tous ces défis de manière à rattraper les pays développés. »
« Les legs du passé et les enjeux du présent et de l’avenir nous imposent de sortir de cette situation, en engageant sans délai, la mise en œuvre du plan ambitieux de la relance économique, selon l’agenda fixé par Monsieur le Président de la République, et qui s’étend sur le très court terme à fin 2020, à court terme à 2021 et à moyen terme à fin 2024 », a-t-il dit.
« Les changements auxquels nous sommes confrontés sont sans précédent, mais vont nous permettre de créer des opportunités que nous nous devons de saisir. Nous sommes maintenant à la croisée des chemins et nous devons choisir la voie à suivre, l’avenir du pays étant dépendant de nos choix et de notre détermination à les faire aboutir », a-t-il conclu.