L’économie allemande voit-elle la lumière au bout du tunnel ? Berlin a relevé mardi à 3,5% ses prévisions de croissance du PIB en 2021 grâce à une levée « progressive » des restrictions contre la pandémie de coronavirus attendue au deuxième trimestre.
« Notre économie est forte, robuste, et prête pour un nouveau départ », après une chute historique de 4,9% en 2020, a affirmé le ministre de l’Economie Peter Altmaier.
En janvier, il avait misé sur une hausse de 3% du PIB cette année.
La nouvelle prévision se rapproche de celle dévoilée par les instituts économiques allemands, qui ont tablé mi-avril sur une croissance de 3,7%.
Pour 2022, le gouvernement vise une croissance de 3,6%, permettant un retour de l’économie à son niveau d’avant crise.
La première économie de la zone euro est pour l’instant freinée par les restrictions liées au coronavirus.
L’Allemagne a fermé ses cafés, bars, restaurants, lieux de culture et de loisir depuis novembre, et une grande partie de ses magasins depuis décembre. Une timide réouverture a été stoppée net en avril, en raison d’une augmentation du taux d’incidence dans le pays.
Conséquence : l’économie devrait connaître une chute de 1,8% du PIB au premier trimestre, selon les prévisions des instituts économiques. Les chiffres officiels seront publiés vendredi. Mais plusieurs facteurs permettent d’espérer une rapide amélioration.
La campagne de vaccination s’accélère progressivement après des débuts poussifs. Près d’un quart de la population a pu bénéficier d’une première injection et 7,3% sont totalement immunisés.
Le ministère de l’Economie fait donc l’hypothèse que « les mesures de restriction (…) pourront être progressivement assouplies dans le courant du deuxième trimestre ».
Cette levée permettra « une reprise nette de l’économie domestique et de la consommation privée », qui galvaniseront la croissance, a-t-il précisé.
Mais c’est surtout la résistance de l’industrie, pilier de l’économie qui nourrit l’optimisme. Le gouvernement s’est ainsi félicité mardi de la « bonne conjoncture industrielle et de l’environnement international qui donnent une impulsion importante ».
Le secteur, très dépendant des exportations, profite de la reprise mondiale, notamment en Chine et aux Etats-Unis. « L’industrie continue de tourner à plein régime », confirme à l’AFP Carsten Brzeski, analyste pour la banque ING.
La production industrielle a connu deux mois de baisse en janvier et février, à cause « d’effets exceptionnels » liés notamment au Brexit, mais les chiffres de mars devraient être positifs, estime l’expert. Et le secteur devrait largement profiter, par la suite, des « plans de relance américains et européens », qui soutiendront ses carnets de commandes.
Les commandes industrielles n’ont d’ailleurs quasiment pas cessé de croître depuis la fin de la première vague de coronavirus, cet été. Mais la crise laissera des traces: le potentiel de production du pays sera amoindri jusqu’en 2024, selon les instituts économiques.
Et les secteurs les plus touchés devraient peiner à se relever. La fédération des commerçants HDE a récemment chiffré à « 120.000 » le nombre de magasins en « danger existentiel ».
Le ministère de l’Economie veut donc prolonger jusqu’à la fin de l’année ses aides d’urgence et réfléchit à un soutien supplémentaire pour les secteurs les plus touchés.
Berlin devra par conséquent continuer à laisser filer sa dette, après des années de rigueur budgétaire.
Le pays va emprunter la somme record de 240,2 milliards d’euros en 2021, et suspendre en 2022, pour la troisième année consécutive, sa sacro-sainte règle de frein à l’endettement.
Cette disposition, inscrite dans la constitution, impose à l’Etat fédéral de ne pas s’endetter à plus de 0,35% de son PIB chaque année.
Ce bouleversement fait débat dans un pays longtemps habitué à la rigueur budgétaire et alors que se profilent les élections législatives en septembre.
Les conservateurs tiennent à revenir le plus tôt possible à cette règle, tandis que sociaux-démocrates et Verts souhaitent la modifier.
Afp