La difficulté d’assurer régulièrement le paiement des retraites à ses trois millions de pensionnaires s’exacerbe chaque année davantage pour la Caisse Nationale des Retraites qui doit chercher des surcroîts de recettes au moyen des augmentations d’impôts et, comme cela ne suffit pas, au moyen d’une taxe spéciale sur les importations de marchandises, instaurée spécialement pour elle par la loi de finance pour l’année 2018.
Ce prélèvement obligatoire de 1%, appelé pompeusement « contribution de solidarité » est l’ultime recours pour rétablir quelque peu une rupture de financement pour les retraites à venir. Les recettes ainsi prélevées seront affectées au compte de cette institution qui verra ses disponibilités financières ainsi momentanément renforcées.
Sous l’effet d’une véritable explosion du nombre de retraités à prendre en charge et d’une inquiétante régression de la masse de cotisants, la Caisse de Retraites s’est maintes fois retrouvée au bord de l’asphyxie financière. C’est l’Etat, à travers le Trésor Public qui vole chaque fois à son secours en levant des impôts ou des taxes en sa faveur. Des impôts impopulaires car directement prélevés des salaires des travailleurs qu’il faut, de surcroît, périodiquement augmenter pour être à la hauteur des besoins financiers colossaux de cette Caisse.
En 2017, le système national de retraites, concerne pas moins de 3 millions de retraités bénéficiant pour l’écrasante majorité de pensions dont les montants augmentent automatiquement de 3 à 4%, au gré des années. Le nombre de retraités a considérablement augmenté au cours de ces dix dernières années sous le double effet de l’arrivée massive de travailleurs ayant atteints l’âge légal de la retraite et des retraites anticipées accordées à certaines conditions à toute une légion de travailleurs.
Alors qu’il n’était que d’environ 1,4 millions à la fin de l’année 2000, le nombre de retraités aurait ainsi allégrement dépassé les trois millions aujourd’hui. Selon les estimations de la CNR il en arriverait entre 120 et 150.000 nouveaux retraités de diverses catégories chaque année. Autant de dépenses additionnelles pour lesquelles la Caisse peine à trouver les recettes correspondantes. « Chaque fin d’année, c’est la panique, car le financement de la Caisse au moyen de prélèvement d’impôts supplémentaires a ses limites tandis que l’augmentation de ces besoins financiers n’en a pas » nous apprend un cadre supérieur de la CNR. « Nous avons été cherché les ressources nécessaires dans l’augmentation des cotisations salariales qui sont passé en quelques années de 16 à 18% amis cela n’a pas suffit. Une ponction sur la fiscalité pétrolière (2%) et la mobilisation reliquats des caisses de solidarité se sont par la suite avérés nécessaires pour pérenniser autant que possible ce système de retraite à bout de souffre. Mais cela n’est toujours pas suffisant, au point où l’on a, pour la première fois dans l’histoire de la Caisse Nationale de Retraite, recouru à une taxe sur les importations de marchandises ». poursuit notre interlocuteur.
Le système de retraite algérien vit donc une profonde crise systémique qui prend racine dans une pléthore de pensions accordées à une époque de relatif plein emploi (années 70 et 80) et pour les retraites anticipées octroyées massivement de 1995 à ce jour. Une pléthore de pensions que ne compense malheureusement pas le nombre de salariés cotisant à la retraite. Le pays ne retrouve pas le plein emploi (12% de la population active est au chômage) et les travailleurs du marché informel ne cotisent pas.
La Caisse nationale de Retraite doit de ce fait verser chaque année entre 80 et 86 milliards de dinars pour sa pléthore de retraités et ayants droits (reversements). Des chiffres qui iront certainement en augmentation même si le gouvernement a décidé de les juguler quelque peu au moyen d’une limitation du droit à la retraite anticipée, qui pourrait réduire d’environ 80.000 le nombre de prétendants à ce type de retraite.
Interrogé sur la proportion que pourrait prendre à court terme les besoins financiers de la CNR, notre interlocuteur qui a souhaité garder l’anonymat, répond « qu’il n’y a aucune raison pour qu’il ne dépassent pas allégrement 100 milliards par an à l’horizon proche de 2020. Si la croissance économique, les cotisations salariales et autres prélèvements obligatoires restent à leurs niveaux actuels, les ressources de la CNR ne pourront jamais faire face à la déferlante de travailleurs qui arriveront à l’âge de la retraite, précisément à cette échéance de 2020. Le recul de l’âge à la retraite pourrait alors être envisagé comme angle d’attaque de ce malaise structurel qui mine notre système de solidarité, en général, et celui de la retraite, en particulier ».