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La mitidja en péril : Les terres a hauts rendements envahies par les constructions illicites

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Les dégâts causés à la plaine de la Mitidja sont énormes et la remise en ordre bien difficile à entreprendre. Le seul remède possible consiste à  stopper immédiatement le massacre par des mesures juridiques fortes  rapidement appliquées sur le terrain. La Mitidja, comme du reste toutes les zones agricoles à hauts rendements que compte le pays, son en effet  malades d’un urbanisme prédateur qui a déjà couté à l’Algérie des dizaines de milliers d’hectares de bonnes terres et le ravage n’est malheureusement pas prêt de s’arrêter. 
 
L’anarchie, qui affecte pratiquement tous les maillons de la construction et de l’aménagement urbain, n’aide pas les autorités en charge du secteur, à y mettre de l’ordre.
Le pillage des réserves foncières et l’extension anarchique des tissus urbains qui en a résulté, constituent, sans conteste, les plus lourdes conséquences du laxisme des autorités locales et centrales, qui ont toujours lésiné à faire appliquer les règles de l’urbanisme et de la construction pourtant nombreuses et suffisamment dissuasives. 
 
Ce ne sont effectivement pas les lois qui manquent, depuis notamment, la promulgation en décembre 1990 et en avril 2004, d’une batterie de décrets et règlements sensés remettre de l’ordre en matière d’occupation des sols, de qualité du bâti et d’aménagement urbain. Pratiquement toutes nos villes sont en effet aujourd’hui pourvues d’un plan directeur d’aménagement urbain (PDAU) généralement adossés à des plans d’occupation de sols (POS) détaillés.
 
Ces instruments permettent de rationaliser les extensions urbaines en veillant à préserver les terres agricoles qui ne peuvent désormais être soustraites à l’agriculture qu’à certaines conditions. Le problème qui se pose aujourd’hui est de savoir pourquoi les autorités concernées n’arrivent pas à faire respecter ces instruments d’urbanisme ayant pourtant force de loi.
 
L’insuffisance de l’offre de logements par rapport aux immenses besoins induits par l’exode rural et la poussée démographique est la raison la plus souvent évoquée par les différents opérateurs d’urbanisme, quand ils ont interrogés sur cette épineuse question. Leur conviction est il sera impossible de faire dans la rigueur urbanistique tant que le décalage entre l’offre et la demande de logements sera aussi important.
 
La remise en ordre n’est, autrement dit, pas pour demain puisque la crise du logement a de bonnes chances de durer encore longtemps. L’inaptitude de la production nationale d’habitat à satisfaire la demande en logements est effectivement de nature à pousser ceux qui n’ont pu accéder à un toit, à l’acquérir ou à le réaliser, en faisant bien souvent fi des législations foncières et urbaines.
 
La corruption et la permissivité du contrôle les encourageront à se servir en convoitant surtout les terrains du domaine public. Ils érigeront sans crainte leurs maisons là où se trouvent des terrains disponibles en nourrissant même l’espoir de convaincre les parents et amis du douar d’origine à les rejoindre sur ces terres qui ne leur appartiennent pourtant pas.
 
Ces constructions illicites s’accumuleront avec le temps au point de constituer d’importantes zones d’habitat qui gangrènent chaque jour un peu plus les surfaces à hauts rendements de la Mitidja.
 
Mal ou pas du tout intégrés aux tissus urbains existants, ces quartiers spontanés constituent à bien des égards, un véritable casse-tête pour les urbanistes qui éprouvent d’énormes difficultés à donner une cohérence urbaine à ces « coups partis » qui ont donné naissance à d’immenses parcs immobiliers informels à la périphérie de pratiquement toutes les villes algériennes, mais sans doute plus gravement encore, celles qui sont proches de la Mitidja.
 
Les communes qui ceinturent l’agglomération algéroise (Sidi Moussa, Khemis El Khechna, Meftah, Bougara, etc.) sont, en effet, toutes sans exception, touchées par ces constructions sauvages qui empiètent sur les terres à haut rendement du Sahel et de la Mitidja et introduisent un irrémédiable désordre dans ces ex-villages coloniaux, dont l’urbanisme et l’architecture étaient, pour le moins, originaux comme en témoignent les constructions restantes. Les communes limitrophes d’Alger étant aujourd’hui pratiquement toutes saturées, le trop-plein de familles, en quête de travail et de toit, a commencé à se déverser très dangereusement, comme en témoigne une étude de la wilaya d’Alger, sur les communes de la Mitidja occidentale (Beni-M’red, Hadjout, Hameur El Aïn, etc.) qui étaient jusque-là épargnées.
 
Le mitage de ce périmètre irrigué, qui figure parmi les plus fertiles du pays, a déjà commencé. Une visite à cet endroit permet déjà d’observer de nombreuses poches de constructions illicites qui très certainement deviendront de gros quartiers d’habitation.
 
La vocation agricole de la région se trouve ainsi sérieusement menacée. Le problème n’est malheureusement pas propre au Sahel et à la Mitidja puisque la presse fait souvent part bien de désordres urbanistiques de mêmes natures dans les plaine d’Oran, de Constantine et d’Annaba qui subissent elles aussi une urbanisation effrénée, affectant dangereusement les terres à hauts rendements des communes périurbaines. Les instruments de planification urbaine (PDAU) dont elles sont dotées, sont pour la plupart inopérants tant les faits accomplis sont nombreux et la tendance des potentats locaux à outrepasser les règles d’urbanisme, encore très courante.
 
Que faire face aux constructions illicites qui, non seulement, défigurent l’esthétique de nos villes, mais, pis encore, hypothèquent la vocation agricole des plaines les plus fertiles du pays ? Il est tout à fait certain que la législation ne saurait, à elle seule, venir à bout de ce fléau généré par l’ampleur des besoins sociaux couplé à un mode de gouvernance inefficient.
 
Un mode de gouvernance qui se réduit, comme on le sait, à quelques coups de boutoirs sans réel effet dissuasif, donnés périodiquement aux auto-constructeurs les plus vulnérables. La loi 04-05, offre pourtant la aux maires et aux walis la possibilité de procéder à la destruction de bâtisses illicites, mais elle est rarement mise en œuvre sans doute par crainte de provoquer des émeutes. On ne comprend pas pourquoi il en est très peu fait usage.
 
Seuls 10% des constructions illicites recensées depuis juillet 2004 auraient fait l’objet de démolition, selon une vielle estimation du ministère de l’Habitat et de l’Urbanisme qui, face à l’ampleur du phénomène, compte recourir à la photo satellite pour repérer et stopper opportunément les constructions illicites, plus particulièrement les bidonvilles qui croissent à grande vitesse à la périphérie, si ce n’est à l’intérieur même, des périmètres irriguées du Sahel et de la Mitidja.
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