En dépit de quelques redressements conjoncturels, les prix du pétrole ont globalement décliné sur la période allant du mercredi 1 février 2017 où il valait 56,33 dollars le baril à, ce jour samedi 18 mars 2017, où il ne vaut plus que 51,70 dollars. Sous le double effet d’une offre massive d’hydrocarbures non conventionnels essentiellement américains et d’une économie mondiale qui tarde à repartir, le Brent a en effet perdu au bout de 6 séances de cotations consécutives environ 10% de sa valeur.
La stratégie de réduction de l’offre de l’OPEP a certes permis d’éviter le pire en matière d’effondrement des prix, mais elle n’est, à l’évidence, pas du tout parvenue à ramener l’offre et la demande mondiales à un niveau qui laisserait espérer des cours suffisamment rémunérateurs pour les compagnies pétrolières et les pays qui vivent exclusivement de cette ressource.
Le risque d’un effondrement des prix plus conséquent à court terme n’est pas du tout à exclure estiment les observateurs tant la production américaine de pétrole et de gaz de schiste a le vent en poupe, au point de bientôt compenser le volume de réduction de 1,2 millions de barils/jours décidé par les pays de l’OPEP lors du sommet d’Alger. Leur inquiétude est aujourd’hui si grande que des ministres, à l’instar de celui de l’Arabie Saoudite, évoque publique la nécessité d’un nouvel accord qui réduirait encore davantage les quotas de production des pays concernés.
Il est vrai que l’accord en question a été bien utile pour stopper un inéluctable effondrement des cours qui, faut-il le rappeler, en étaient à peine à 32 dollars en juillet 2016, l’offre supplémentaire de pétrole, aussi rapide que massive, extraite des schistes bitumeux, est sur le point de compenser le volume de réduction consenti par l’OPEP. On revient donc à l’était des lieux qui prévalait sur le marché pétrolier au milieu de l’année 2016.
Un nouveau réajustement de l’offre et de la demande mondiale s’avère donc nécessaire, si on veut éviter un nouveau choc pétrolier. Il faut en effet se rendre à l’évidence que les encouragements adressés aux producteurs d’hydrocarbures non conventionnels par le président Donald Trump et les incitations fiscales et bancaires dont ils bénéficient aujourd’hui, sont de nature accroître les performances productives de cette multitude de petites exploitations qui permettent aux USA de se maintenir aux premiers rangs des producteurs mondiaux d’hydrocarbures. L’autorisation d’exporter les excédents dont viennent de bénéficier les compagnies pétrolières américaines leur offrent la possibilité d’afficher les prix de vente qui les arrangent en jouant sur la valeur du dollar qui montera ou baissera au gré du marché mondial.
Les petites exploitations d’hydrocarbures ont de bonnes chances d’être encouragées et soutenues financièrement durant toute la période de prix bas, car aux cours actuels (moins de 6O dollars le baril), les grandes firmes pétrolières hésiteront beaucoup à investir dans de nouveaux champs et, sans doute même, pour accroître la production des puits en activité. A moins de 60 dollars le retour sur investissement n’est effectivement pas garanti et l’endettement pourrait devenir insupportable pour ces grandes compagnies qui ont de lourdes charges d’exploitation.
Il ne serait pas étonnant que ces dernières contractent des partenariats multiformes avec de nombreux exploitants de pétrole et gaz de schistes qui activent en Amérique ou dans d’autres contrées du monde, pour compenser les manques à gagner induits par la réduction des investissements auxquelles les grandes firmes ont eu recours ces deux dernières années.
Les coûts de production des puits de pétrole et de gaz de schistes tirant de plus en plus vers le bas (à 40 dollars le baril ils seraient pratiquement tous rentables), il sera bien difficile pour les pays de l’OPEP de porter un coup fatal à ces petites exploitations au moyen de la réduction des quotas de production. Elle n’arrivera jamais à instaurer par ce type de stratégie des prix suffisamment dissuasifs susceptibles d’entraîner la fermeture des puits existants ou en voie d’exploitation.
Bien au contraire, plus l’OPEP parviendra à relever ses prix, mieux seront rémunérées ces petites exploitations qui, comme nous l’écrivions plus haut, ont des coûts de production très réduits. La résolution du problème viendra sans doute du marché lui-même qui connaîtra à ce rythme effréné de production et dans un contexte de stagnation de la croissance mondiale, une saturation certaine.
Les prix exagérément bas que cet excès d’offre pourrait générer, contraindraient alors les exploitations les moins performantes à fermer leurs puits et celles qui projetaient d’investir dans ce type d’activité, à différer ou carrément annuler leurs investissements. L’offre mondiale d’hydrocarbures en serait alors considérablement réduite au point d’ouvrir la voie à une remontée sensible et durable des prix.