A peine arrivé aux abords du marché de véhicules d’occasion d’EL Affroun,(wilaya de Blida), et avant même d’atteindre l’entrée principale, nous sommes abordés par un revendeur qui nous propose un million de dinars pour notre voiture, une « Clio classique » immatriculée en 2008, soit plus de 30% de son prix « ce n’est pas la peine de la faire entrer au marché, je vous offre un million de dinars, on se met d’accords ici, et tout le monde est content ! , « wash goult ?», nous presse t-il de répondre, un nicheur, qui parait, bien aguerri à ce genre de transactions. On décline bien entendu l’offre avant de nous engouffrer dans le marché.
Une deuxième chance pour d’anciennes « carrosseries »
Le marché grouille de monde, chacun est à la recherche de la perle rare. Aussi bien ceux qui vendent comme ceux qui achètent. Un tour nonchalant dans les lieux nous renseigne sur la température qui a pris des envolées. Les prix ont atteint des cimes sans précédent, suite à la flambée des prix des véhicules neufs, due à leur indisponibilité provoquée par la mise en place du système de licences et de quotas d’importation, toujours à la baisse, en perspective d’une production automobile locale à venir.
Il est de ce fait, impératif de se lever très tôt de nos jours, pour espérer acquérir un véhicule plus ou moins décent, sans y laisser toutes ses économies. C’est le cas au marché d’El Affroun, où l’ouverture se fait à 6h30 du matin, mais pour avoir une bonne place, il faut y être au moins à 5h00. C’est ce que nous avons fait. Grande était notre surprise, lorsque nous avons vu les modèles proposés et les prix annoncés.
Le marché se compose essentiellement de modèles, un peu « fatigués » des années 1990, et 2000, avec une faible présence de voitures récentes, quant aux prix, ils dépassent tout entendement. Ainsi, une Renault Clio de l’année 1998 dépasse les 62 millions de centimes, et pour les rares voitures récentes comme cette Renault Symbol, année 2016, elle est cédée à165 millions de centimes. Les montants grimpent à vous en donner le vertige, frôlant les 600 millions de centimes !
« Nous ne pouvons plus acheter et ni même vendre, c’est devenu très difficile, ce n’est pas comme avant ou avec un budget de 70 ou 80 millions de centimes, on pouvait sortir du marché avec un véhicule qui tient la route, aujourd’hui, il faut au moins 120 à 140 millions de centimes, et encore, ce n’est pas sûr de dénicher quelque chose de potable!».nous explique Brahim venu s’enquérir de la température du marché pour un hypothétique véhicule.
Ainsi, le prix d’une voiture d’occasion se négocie selon la marque, le modèle, l’état, l’année de son immatriculation, les options et bien sûr l’authenticité des documents à savoir, la carte grise et le numéro de châssis. Avec la conjoncture actuelle, l’intérêt de l’acheteur est de tomber sur un véhicule solide, qui a fait ses preuves, et qui peut durer, c’est aussi un investissement car pour les acheteurs, l’option de revendre est aussi prise en considération, idem pour ceux qui vendent pour racheter autre chose. C’est le cas de Mohamed qui nous dit : « je ne peux pas vendre ma Peugeot 407, année 2004, moins de 135 millions de centimes, car je ne pourrais rien acheter de solide» nous confie ce citoyen.
Un commerce florissant sur Internet
En plus des lieux traditionnels, l’intérêt du marché de l’occasion s’est déplacé sur le virtuel. Des sites électroniques spécialisés dans les annonces font florès. La vente et l’achat via Internet, s’imposent dans un contexte de pénurie. A l’instar de « oued kniss », une multitude de sites ont fait leur apparition sur la toile, et relaient toutes les informations et les propositions des particuliers « j’ai toujours passé mes transactions sur internet, j’ai acheté et vendu plusieurs voitures, mais ces derniers temps, c’est vrai que les prix ont augmenté d’au moins 40%, les négociations deviennent plus ardues » nous révèle Omar, un chineur qui a fait de ce commerce son gagne-pain.
L’achat à crédit, l’alternative
A part Renault Algérie dont les véhicules ne suffisent pas à tout le monde et les commandes qui prennent un temps fou, les citoyens qui ont besoin d’acquérir un véhicule et qui espèrent le faire très vite devront patienter encore quelques mois avant de prétendre à un crédit auto dans le cadre du crédit à la consommation vu les annonces faites par les patrons d’usines qui s’attèlent à monter des voitures en Algérie. Vu que les prix des véhicules neufs et d’occasions, sont passés hors de leur portée, enregistrant en l’espace de deux ans, de fortes augmentations.
Leurs seul espoir est d’attendre les premiers véhicules qui sortiront de ces usines locales. Cependant rien ne dit que leurs prix seront abordables.
En attendant la réorganisation du marché des véhicules d’occasion qui brasse des dizaines de millions de dinars, une manne financière qui échappe totalement au contrôle de l’Etat.
Les pouvoirs publics ont dans ce sens évoqué un cahier des charges en cours d’élaboration, du marché de l’occasion, en l’intégrant dans l’économie formelle. Ce qui permettra au client, par le biais de la régulation, de prétendre à l’acquisition d’un véhicule d’occasion, à des prix raisonnables.
Entre temps, les experts en économie, proposent d’instaurer une taxe pour toutes les transactions sur des véhicules d’occasion, une façon de récupérer une partie de l’argent et de renflouer les caisses de l’Etat.