A peine une année de déclin des recettes d’hydrocarbures et c’est toute la philosophie du financement du développement économique et social du pays qui est remise en cause. L’Etat providence qui prenait généreusement en charge les dépenses d’équipement pour améliorer le niveau d’infrastructure du pays, sera contraint dés le début de l’année 2017 de revoir franchement à la baisse le budget qu’il consacrera à la construction de nouveaux logements, aux équipements collectifs et aux infrastructures de base.
En opérant une coupe d’environ 12 milliards de dollars dans ce budget, c’est un véritable retrait du financement des équipements publics que le gouvernement a ainsi souhaité réaliser, rompant du coup avec ce vieux dogme selon lequel la réalisation des équipements publics est l’affaire exclusive de l’Etat.
Réduit d’environ 30% (2290 milliards de DA en 2017 contre 3176 milliards en 2016), on ne pourra plus financer un grand nombre d’infrastructures de base, ni même, de nouveaux programmes d’habitat à la mesure de l’ampleur de la demande. L’argent disponible suffira tout juste à honorer les réévaluations des projets en cours, à poursuivre les travaux d’infrastructures jugées prioritaires (cas de la grande mosquée d’Alger et celles de Laghouat et Mascara) et à mettre en chantier quelques infrastructures routières destinées au désenclavement des localités du sud.
On ne trouvera dans le détail des programmes de réalisations ni autoroute des hauts plateaux, ni grand hôpital, ni nouvelle desserte ferroviaire, ni barrage hydraulique, ni même, programmes d’habitat nouveaux, pour ne citer que ces investissements structurants en faveur desquels l’Etat consacrait le plus gros de son budget.
Le plus grave est que l’État s’est retiré brutalement du financement des équipements publics sans désigner explicitement celui ou ceux qui prendraient la relève au risque de mettre le pays dans une situation très périlleuse. Sans ces investissements, l’Algérie sombrerait en effet, dans une très grave crise de croissance avec son lot de fermetures d’entreprises (notamment celles du BTPH), d’explosion du chômage et de chute subite du pouvoir d’achat.
Le financement des infrastructures par le privé algérien et étranger pourrait constituer une opportunité de poursuite du développement, mais aucune réglementation claire et sans équivoque n’a été, à ce jour, promulguée à cet effet. La période de flottement promet donc d’être longue et désastreuse pour le pays qui s’enfoncera dans la pauvreté malgré la présence d’énormes ressources financières aux mains d’opérateurs privés qui ne pourront pas en faire efficacement usage, faute de lois, mais aussi et surtout, de volonté politique.
Les 5000 millionnaires en dollars recensés par New World Wealth (NWW) et les centaines de milliardaires en dinars que compte le pays, sont en effet disposés à financer des infrastructures et des programmes de logements neufs, pour peu que ces projets soient rentables et que l’État leur en offre officiellement l’occasion. Il n’est par contre pas question pour ces hommes d’affaires de se lancer dans des projets qu’un bureaucrate peut, du jour au lendemain, décider de bloquer.
Il y a aussi la possibilité de réaliser des projets d’infrastructures et d’habitat au moyen de financements étrangers (emprunts extérieurs multiformes, BOT, partenariats public privé etc.) mais, là aussi, rien n’est suffisamment clarifié en termes juridiques, pour susciter la participation active de ce type d’opérateurs. Il faut que le gouvernement algérien sache exactement ce qu’il compte faire en la matière pour légiférer en conséquence.
La prise en charge du financement des équipements publics et du logement par le privé national et étranger ne faisant pas encore consensus au sein du pouvoir et de la classe politique en général, il faudra sans doute attendre encore longtemps, pour que le financement de ce type de projet puisse se faire au moyen du marché et, non pas, comme cela a toujours été le cas, au moyen exclusif du budget de l’État.