Le poids des nombreuses incertitudes entourant la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne continuait à faire boire la tasse aux marchés lundi, les valeurs bancaires et la livre sterling payant le prix le plus élevé.
Le bref répit observé en Asie et à l’ouverture en Europe s’est rapidement dissipé lundi. Les Bourses européennes se sont enfoncées au fil de la matinée et Wall Street leur a emboîté le pas lundi après-midi, avec des pertes toutefois moins spectaculaires que vendredi.
« Les indices européens boivent de nouveau la tasse et se rapprochent des points bas testés vendredi matin en séance. Ils sont entraînés par le secteur bancaire, qui ne sait plus à quoi se raccrocher tant l’incertitude est considérable », résume le courtier Aurel BGC.
« La décision du peuple britannique plonge les marchés mondiaux dans une zone d’incertitudes majeures. Nous entrons maintenant en territoire inconnu », soulignent également les économistes de Groupama AM.
Vers 15H30 (13H30), alors que le Dow Jones perdait 0,90% et le Nasdaq 0,93%, Londres reculait de 1,90%, Francfort de 1,72% et Paris de 2,15%, puis plus de 3% quelques minutes plus tard. Milan lâchait 3% et Madrid 1,01%, après un bond de plus de 3% à l’ouverture, au lendemain de la victoire des conservateurs, qui n’ont toutefois pas de majorité, aux législatives de dimanche.
Les titres exposés au Royaume-Uni souffrait comme Eurotunnel qui plongeait de plus de 10% à Paris. Et les valeurs bancaires, surtout britanniques se faisaient laminées par les incertitudes sur le sort de la City, Barclays chutant par exemple de près de 25%.
« Les banques ont tout à perdre du Brexit en terme de sentiment de marché », analyse Aurel BGC.
« Le Brexit en lui-même est traumatisant car il remet en cause le projet européen et affecte les perspectives économiques de la région. Mais surtout, il remet en cause la place de Londres dans la finance mondiale » et « les banques européennes, toutes plus ou moins présentes à Londres, ne seront pas en mesure d’échapper à un stress financier certain », estime-t-il.
Sur le marché des changes, la livre sterling était sous pression et dégringolait à un nouveau plus bas depuis 1985 à 1,3152 dollar pour une livre.
En Asie, Tokyo a réussi à monter de 2,39% grâce à des espoirs d’intervention des autorités sur le marché des changes.
– « Sacrée crise politique » –
Dans cet environnement incertain, les investisseurs cherchaient à anticiper les conséquences du Brexit, en guettant les réactions des responsables britanniques et européens. Mais les déclarations des uns et des autres ne permettent pas de dissiper l’incertitude, ce que les marchés détestent le plus.
« Quatre jours après le choc du référendum, la seule chose qui soit sûre c’est que le Royaume-Uni est au milieu d’une sacrée crise politique », notent les analystes de Daiwa Capital Markets.
Le Royaume-Uni doit gérer les demandes pressantes des dirigeants et responsables de l’Union européenne d’accélérer un divorce. En début d’après-midi le parti conservateur a annoncé que le successeur du Premier ministre David Cameron serait nommé d’ici le 2 septembre.
Pour discuter des conséquences du Brexit et préparer ce rendez-vous, la chancelière allemande Angela Merkel reçoit dans la journée à Berlin le président du Conseil européen Donald Tusk, puis le président français François Hollande et le chef du gouvernement italien Matteo Renzi.
Mme Merkel a dit lundi comprendre que le gouvernement britannique ait besoin de temps pour formaliser sa demande de sortie.
De son côté le secrétaire américain au Trésor Jack Lew s’est voulu rassurant en estimant que ce vent contraire supplémentaire pour l’économie pourrait être surmonté.
Les investisseurs cherchaient néanmoins refuge du côté des valeurs les plus sûres, à l’image des obligations allemandes, le taux d’emprunt à 10 ans du pays reculant en territoire négatif. De même, le taux à 10 ans britannique touchait un nouveau plus bas historique sous 1%.
Comme l’once d’or, le yen, privilégié en cas de tempête sur le marché, demeurait à des niveaux élevés.
Malgré cette accalmie sur les marchés, « il est important de garder à l’esprit qu’on n’en a pas fini avec les retombées du Brexit », a commenté Stephen Innes, courtier chez Oanda Asia Pacific. « Nous allons probablement ressentir les secousses pour les semaines, voire les mois, à venir, mais il est difficile d’anticiper leur fréquence et leur amplitude ».