L’avionneur américain Boeing a engrangé vendredi une commande record de 18,6 milliards de dollars auprès de Qatar Airways, profitant des difficultés de son rival européen Airbus, confronté à des retards de livraisons.
Après avoir exprimé pendant des mois sa frustration contre l’avionneur européen, Qatar Airways, un des gros clients d’Airbus, a finalement mis ses menaces à exécution en passant une commande de 100 avions, dont 40 gros porteurs (trente 787-9 et dix 777-300ER), pour un montant total de 11,7 milliards de dollars.
La compagnie aérienne a en outre signé une lettre d’intention portant sur l’achat de 60 appareils de la famille du monocouloir 737, le 737 MAX 8, pour un prix de 6,9 milliards de dollars.
C’est la première fois depuis plus de quinze ans que Qatar Airways achète des avions moyen-courrier à Boeing.
Parlant d' »une des plus grosses commandes de l’histoire » de la compagnie, Akbar al-Baker, le patron de Qatar Airways, a précisé, qu’elle était destinée à répondre aux besoins d’expansion du groupe, mais aussi aux « difficultés en cours » de livraisons d’Airbus.
« Boeing a commencé à construire des avions avant tout le monde. Ils fabriquent les meilleurs avions, même si leurs concurrents ne vont pas apprécier que je le dise », a-t-il enfoncé, lors d’une conférence de presse à Washington, où ont fusé les piques contre Airbus.
« Le but n’est pas de montrer du doigt Airbus ou de l’humilier. Nous avons et gardons des relations étroites avec Airbus et continuons à recevoir les appareils Airbus pour lesquels nous avons passé commande », a toutefois relativisé le dirigeant par la suite dans des déclarations à l’AFP.
Interrogé sur une possible annulation des commandes d’A320 et A350, le dirigeant a affirmé que Qatar Airways ne revenait pas sur sa parole.
« Cette commande (passée à Boeing) n’est pas le signe que nous n’avons plus confiance à Airbus. Nous lui maintenons tous nos engagements », a-t-il déclaré à l’AFP.
N’empêche, chez Boeing on savourait ce revers infligé à l’A320, dont le succès a permis à Airbus de battre le groupe américain en termes de commandes lors des dernières années.
Ray Conner, le directeur de la division aviation civile du groupe de Chicago, n’a d’ailleurs pas hésité à assimiler cette commande inédite à un retour au bercail de Qatar Airways après une incartade ayant mal tourné.
La compagnie émiratie a à plusieurs fois fait part de son mécontentement face au retard pris par Airbus dans son calendrier de livraisons des avions A320 et A350, son gros porteur.
Elle a fait savoir en juin que ces retards avaient un énorme impact sur ses résultats financiers et ses plans d’expansion, car le groupe avait été contraint de réduire la fréquence de plus d’une dizaine de liaisons régulières au départ de Doha.
Souhaitant envoyer un avertissement fort, Qatar Airways avait annulé la commande de son tout premier exemplaire de l’A320neo, la version remotorisée du monocouloir d’Airbus dont la forte montée en cadence de la production a déstabilisé un certain nombre de fournisseurs.
Annoncé comme le premier client au lancement de l’A320neo, Qatar Airways avait finalement refusé la livraison prévue pour octobre 2015 en raison des problèmes constatés sur le moteur Pratt & Withney de la première version de l’appareil.
C’est finalement Lufthansa qui l’a réceptionné en janvier dernier.
Sur l’A350, c’est l’équipementier français Zodiac Aerospace qui a du mal à suivre la montée en cadence d’Airbus, malgré plusieurs rappels à l’ordre.
Hormis les problèmes d’Airbus, Qatar Airways s’est aussi tourné vers Boeing pour des raisons politiques, croit savoir la presse américaine.
Cette commande serait une forme de monnaie d’échange pour appuyer la vente au Qatar d’avions militaires F-15, également fabriqués par Boeing, et qui attend toujours un feu vert officiel.
La présence vendredi à la conférence de presse organisée à Washington par Boeing et Qatar Airways du secrétaire d’Etat adjoint américain Antony Blinken donne du poids à cette hypothèse.
Source : AFP