Du fait des avantages comparatifs dont elle dispose, l’Algérie aurait dû, depuis longtemps déjà, faire partie des quelques pays émergents qui brillent par leurs performances économiques. Les atouts susceptibles d’aider l’Algérie à émerger économiquement sont en effet divers et nombreux (position géographique avantageuse, infrastructures de base consistantes, énergie disponible et pas chère, coûts salariaux très bas, ressources humaines abondantes et qualifiées, etc.), mais faute d’avoir su les mettre à profit, ce pays potentiellement riche est, aujourd’hui encore considéré comme un pays en voie de développement. Pour quitter ce classement peu honorable il aurait fallu que les autorités politiques algériennes en aient réellement la volonté, qu’elles exprimeraient concrètement par la mise en œuvre de profondes réformes qui rendraient le climat des affaires attrayant aussi bien pour les investisseurs algériens qu’étrangers. Ce n’est, à l’évidence pas le cas, exception faite des quelques réformes entreprises dans le sillage des émeutes de 1988, pratiquement toutes mises au placard aujourd’hui, au profit de nouvelles lois souvent confuses et contradictoires qui exercent un effet repoussoir sur les investissement directs étrangers, les promoteurs algériens et les industriels en général.
Des réformes de 1988 à la règle 49/51
La mise à mort des quelques changements systémiques opérés à la faveur des réformes de 1988 a été décidée un certain été 2009 avec la promulgation d’une loi de finances complémentaire qui consacrait un retour volontaire au contrat social des années 70. La longue dynamique de réformes entamée à la fin des années 80 fut ainsi stoppée nette au moment où elle commençait, de l’avis de nombreux experts, à porter ses fruits. Ce subit renoncement aux réformes de 1988 s’est entre autres, traduit par la perte d’autonomie des entreprises publiques remises sous tutelle des ministères et le gel des privatisations sur le point d’être conclues. Les investisseurs étrangers n’ont, par ailleurs, plus le droit d’être majoritaires dans le capital des sociétés qu’ils viendraient à créer en Algérie (règle du 49 /51) et le secteur privé national soumis à un surcroît de procédures bureaucratiques qui n’incitent plus à la promotion d’investissements productifs. Le crédit documentaire est imposé comme unique mode de paiement des importations et l’autorisation de l’administration obligatoire pour tout investissement nouveau. Toute la machine économique s’est ainsi subitement grippée et rien n’est fait pour remédier à cette dangereuse situation pourtant connue de tous et à de nombreuses occasions, portées à l’attention des plus hautes autorités du pays par de nombreux canaux, parmi lesquels, ceux du Forum des Chefs d’Entreprises (FCE), des syndicats patronaux et de nombreux médias.
Les autorités politiques n’ont malheureusement jamais répondu favorablement aux signes de détresse des entrepreneurs, des économistes et des journalistes qui les ont pourtant souvent interpellées sur le danger que l’arsenal juridique de 20O9 constituait pour les entreprises de droit algérien en particulier et l’économie nationale en général. La dynamique de développement hors hydrocarbures a ainsi été stoppée nette condamnant de fait notre économie à la stagnation au moment où toutes les nations du monde, y compris celles beaucoup moins favorisées que l’Algérie, entreprenaient de profondes réformes pour rattraper leurs retards.
Haro sur le privé
Il est tout de même anormal de constater que les pouvoirs publics algériens continuent, aujourd’hui encore, à discriminer le secteur privé en refusant de mettre les entreprises publiques et privées sur un pied d’égalité en matière d’octroi de commandes publiques et de crédits. Il est tout aussi anormal de continuer à soumettre celles qui expriment le souhait d’investir à des autorisations administratives préalables, du reste, souvent refusées. Ce sont pourtant les entreprises, et notamment celles du secteur privé, qui créent la richesse et l’emploi et permettent aux nations d’avancer et, de rejoindre, les pays émergents qui tirent vers le haut une bonne partie de l’économie mondiale. Avec ce traitement bureaucratique et, bien souvent, discriminatoire réservé aux entrepreneurs il n’y a, à l’évidence, aucune chance que l’Algérie en fasse partie de si tôt, quand bien même, elle disposerait, comme c’est encore aujourd’hui le cas, d’un matelas financier suffisamment confortable mais beaucoup plus destiné au maintien de la paix sociale qu’au confortement de l’entrepreneuriat. Il est pourtant de notoriété publique que les pays émergents ont pour particularité de s’être sérieusement appliqués à mettre en œuvre de profondes réformes systémiques visant à introduire et maîtriser les outils de management universels (marché financier, marché boursier, marché des changes, moyens de paiement modernes, généralisation du recours aux TIC etc.).
Plus de productivité, moins d’idéologie
L’Algérie qui semble se complaire dans un capitalisme spécifique qui traîne aujourd’hui encore les archaïsmes de l’époque socialiste a, à l’évidence besoin d’un sérieux et urgent coup de fouet. Il faut en effet savoir que c’est grâce aux réformes impulsées par des gouvernements qui ont la particularité d’être très confiants en la libre entreprise et la compétition économique mondiale, que des pays émergents comme la Chine, l’Inde, le Brésil et l’Afrique du Sud sont, à titre d’exemples, parvenus à diversifier leurs économies en axant leurs efforts sur la fabrication de produits parmi les plus demandés sur le marché mondial. Ils ont par ailleurs, réussi à monter des systèmes financiers et bancaires dynamiques et performants capables de booster la compétitivité des entreprises. Leurs amonts agricoles sont, en outre, suffisamment prospères pour assurer, à la fois, l’autosatisfaction alimentaire et la fourniture de matières premières aux industries agroalimentaires. Ces pays ont également réussi à mettre en place de puissants secteurs de télécommunications qui élèvent la compétitivité de l’économie et les connectent au reste du monde. La dizaine de pays émergents que compte la planète offrent aussi la particularité d’avoir impulsé, au moyen de mesures incitatives appropriées, une très forte dynamique aux PME disposant d’un certain potentiel d’exportation. Ce sont elles qui affrontent aujourd’hui la concurrence internationale et raflent des parts de marchés de plus en plus importantes. Tous les pays émergent ont enfin pour caractéristique commune d’avoir su organiser et développer des systèmes d’éducation, de formation et de recherche-développement, davantage orientés vers la productivité que vers l’idéologie. Il reste donc beaucoup de chemin à faire pour que l’Algérie rejoigne un jour la cour des pays émergents. L’important est de s’y mettre au plus tôt en mettant à contribution les avantages nombreux et multiformes dont l’Algérie dispose et que de nombreux pays aujourd’hui émergents n’avaient pas eu la chance d’avoir.
Nordine Grim
L’Algérie s’est classée à la 106e place dans l’Indice de perception de la corruption (IPC) 2019 dans le monde publié ce jeudi 23 janvier par l’ONG Transparency International qui a étudié dans son rapport 180 pays.
Avec un score de 35 points sur 100, l’Algérie occupe le même rang que l’Albanie, l’Egypte, la Côte d’Ivoire, le Brésil, la Macédoine du Nord, la Mongolie. L’Algérie a perdu une place dans ce classement par rapport à l’édition précédente.
L’Algérie est loin derrière des pays comme le Burkina Faso (85e), le Maroc (80e), la Tunisie (74e), l’Afrique du Sud (70e) ou encore le Sénégal (66e). Selon l’IPC, le Botswana est le pays qui a moins de corruption en Afrique en occupant le 34 rang avec un score de 61 sur 100. Il est suivi par l’île Maurice en deux position sur le continent en arrivant à la 56e place, suivi du Rwanda (57e mondial).
Par ailleurs, l’Algérie a devancé des pays comme le Mexique (130e), la Russie et le Liban (137e) ou encore l’Iran (146e).
Nouvelle-Zélande et le Danemark en tête
Les pays qui ont les scores les plus élevés sont la Nouvelle-Zélande et le Danemark, tous deux avec un score de 87, suivis de la Finlande (86), Singapour (85), la Suède (85) et la Suisse (85). Le score de la France est de 69 cette année contre 72 il y a un an, ce qui la classe à la 23e place, rang occupé également par les Etats-Unis, devancés par les Emirats Arabes Unis à la 21e place juste derrière le Japon (20e).
Le Qatar 30e avec 62 points, l’Arabie Saoudite a obtenu le score de 53 points l’a classant à 51e place. La Chine est classée à la 80e place avec un score de 41 points sur 100.
La Somalie dernière du classement
En dernière position, la Somalie atteint seulement 9 points. Juste derrière, on retrouve le Soudan du Sud (179e) avec 12 points, la Syrie 178e avec 13 points, le Yémen 177e (15 points), le Venezuela 173e (16 points).
Plus des deux tiers des pays, ainsi que bon nombre des économies les plus avancées du monde , stagnent ou montrent des signes de recul dans leurs efforts de lutte contre la corruption, selon l’IPC 2019.
« L’analyse des résultats révèle que les pays dans lesquels les élections et le financement des partis politiques sont perméables à une influence indue de la part d’intérêts particuliers sont moins en mesure de lutter contre la corruption », relève Transparency International.
« La frustration face à la corruption du gouvernement et le manque de confiance dans les institutions témoignent de la nécessité d’une plus grande intégrité politique », a déclaré Delia Ferreira Rubio, Présidente de Transparency International. « Les gouvernements doivent s’attaquer de toute urgence au rôle corrupteur des grosses sommes d’argent dans le financement des partis politiques et à l’influence indue qu’elles exercent sur nos systèmes politiques. »
L’IPC note 180 pays et territoires selon leurs niveaux perçus de corruption dans le secteur public, en s’appuyant sur 13 évaluations d’experts et enquêtes menées auprès de chefs d’entreprises. Cet indice utilise une échelle de zéro (fortement corrompu) à 100 (très peu corrompu).
Selon Transparency, « plus des deux tiers des pays ont un score inférieur à 50, le score moyen se situant seulement à 43. Depuis 2012, seuls 22 pays ont considérablement amélioré leurs scores, dont l’Estonie, la Grèce et le Guyana, et 21 pays ont sensiblement régressé, parmi lesquels l’Australie, le Canada et le Nicaragua ».
« Nos recherches montrent que plusieurs des économies les plus avancées ne peuvent se permettre de faire preuve de complaisance si elles veulent maintenir leur élan de lutte contre la corruption. Quatre pays du G7 obtiennent des résultats inférieurs à ceux de l’an dernier : le Canada (-4), la France (-3), le Royaume-Uni (-3) et les États-Unis (-2). L’Allemagne et le Japon n’ont connu aucune amélioration, tandis que l’Italie a gagné un point », note l’ONG.
L’ONG relève que « les pays où les réglementations sur le financement des campagnes sont complètes et systématiquement appliquées ont un score moyen de 70 sur l’IPC, alors que les pays où ces réglementations sont soit inexistantes, soit mal appliquées n’obtiennent respectivement qu’une moyenne de 34 et 35 ».