Il y a quelques jours, le ministère du Commerce a rendu public un état chiffré des importations algériennes en fruits, secs et frais uniquement, effectuées durant les cinq premiers mois de l’année en cours.
Qui révèle que, malgré la baisse enregistrée dans la facture de certains d’entre eux, les montants d’ensemble dépensés pour celles-ci n’en demeurent pas moins toujours élevés.
Surtout en ces temps de baisse drastique des revenus engrangés par le pays de ses ventes d’hydrocarbures. Pour les seules bananes et pommes, deux produits entrant dans la catégorie des fruits frais, la facture a été de 130 millions de dollars (et quelques poussières) alors que celle des fruits catégorisés comme secs, tels les amandes, les raisins secs, les abricots secs et les pruneaux secs, a été de 39,3 millions de dollars.
Couplées, ces deux factures donnent un total, assez lourd, il faut le dire, pour la raison invoquée plus haut, de presque 170 millions de dollars. Un total qui, sans doute aucun, prendrait plus de «lourdeur » si on lui adjoignait la facture des fruits exotiques ; lesquels fruits n’ont pas figuré dans le document précité du ministère du Commerce. Ce qui ne signifie nullement que leur importation a cessé : les kiwis, mangues et avocats, entre autres, continuant, en effet, d’être présents sur les étals de nombre de commerces de détail à travers le pays.
A l’instar, d’ailleurs, de la pistache, un autre fruit sec particulièrement prisé par nos amateurs de thé fumant et de coupes de glace à son parfum. Et qui, de ce fait, est entré dans le listing des produits dont la consommation, dans notre pays, est en progression constante. Comme l’est également celle des produits exotiques susmentionnés.
Une réalité que nul ne peut ignorer, qui a poussé les pouvoirs publics à réfléchir à une solution définitive et profitable à l’économie nationale pour assurer leur disponibilité permanente sur le marché. Et quelle meilleure solution que leur production en Algérie même. Un objectif sur lequel travaille, depuis de nombreuses années maintenant, l’ITAF (Institut technique de l’arboriculture fruitière et de la vigne).
Des expérimentations sur l’adaptation, dans certains cas, de certains fruits exotiques et, dans d’autres, de variétés nouvelles de ces fruits à l’environnement algérien, ont, en effet, été menées par les techniciens de cet institut. Qui ont donné, selon des déclarations faites à la presse, il y a quelques mois, par Mahmoud Mendil, son directeur général, « des résultats encourageants ».
C’est, à l’évidence, le caractère encourageant de ces résultats qui a poussé le ministère de tutelle a entamé une campagne de sensibilisation en direction des agriculteurs, notamment de ceux des wilayas de Mascara, Naâma, El-Bayadh, Saïda, Laghouat, Djelfa, Tiaret, M’sila et Batna où, semble-t-il, existent les conditions climatiques et de sol idoines pour une bonne adaptation de ces fruits, pour les inciter à investir ce nouveau créneau de la culture des fruits exotiques.
Avec une attention particulière pour la pistache. Du fait de la possibilité d’orienter rapidement une partie de sa production vers l’exportation : la proximité de l’Europe, où sa consommation est la plus élevée dans le monde, est, nous a déclaré Mahmoud Mendil que nous avons joint, hier, par téléphone, « un atout pour l’Algérie qui se trouve à moins d’une heure de vol de ce continent ». Entamée depuis deux années, la phase pratique de l’opération visant à développer la culture du pistachier dans notre pays a fait une avancée remarquable. Une centaine d’agriculteurs des wilayas susmentionnées s’y est déjà impliquée, selon le DG de l’ITAF.
Bien mieux, a-t-il tenu à nous le dire, « certains ont déjà lancé des pépinières pour la culture de plants de pistachiers ». Une action dans laquelle Mahmoud Mendi voit « un indice probant non pas uniquement de l’intérêt des agriculteurs pour cette nouvelle culture mais, surtout, de la rentabilité de celle-ci et, partant, de son avenir prometteur dans notre pays ». Dans la lancée, il nous a précisé que dans le cadre de la sensibilisation menée par le ministère de l’Agriculture, « 100 plants de pistachier et un kilogramme de semence pour la production de tels plants, ont été cédés à des prix symboliques aux agriculteurs intéressés ».
Toujours dans le registre des précisions, notre interlocuteur nous a déclaré que les espèces de pistachier qui semblent recueillir l’assentiment des agriculteurs sont celles originaires de Syrie et d’Iran. Contrairement à celles provenant des Etats-Unis dont « les fruits, plus gros, ont un arôme et un goût moins agréables ».
Il faut savoir que selon les prévisions initiales, il était prévu de consacrer, dans une première étape, quelque 50 000 ha à la culture du pistachier en Algérie destinés à produire, d’ici l’année 2025, environ 100 000 quintaux de pistache. Sauf que selon Mahmoud Mendil, il n’est pas exclu, au vu de la conjoncture financière difficile que traverse le pays, que ces prévisions soient quelque peu revues à la baisse.
Sans pour autant que le programme soit remis en cause. Un programme qui vise, pour certains fruits exotiques, tels, entre autres, le kiwi, l’avocat et la goyave, à, surtout, couvrir la demande nationale. Et, partant, à faire cesser leur importation. La modestie relative d’un tel objectif, en clair, le fait de ne pas songer à l’exportation de ces fruits, est expliquée par le DG de l’ITAF par « la modestie » des exploitations consacrées à la relance de leur culture; laquelle (modestie), nous a-t-il dit, « ne permet pas de produire de grosses quantités susceptibles de dégager un excédent pour l’exportation ».
Et à propos de son utilisation du terme « relance » pour parler de la culture des trois fruits exotiques précités, le DG de l’ITAF l’explique par le double fait que celle-ci a été introduite, en Algérie, « dans le milieu des années 40 du siècle passé », et que le programme en cours vise, entre autres, à corriger les effets négatifs que la restructuration du secteur agricole national intervenue dans la seconde moitié de la décennie 80, a eu sur elle ; des effets qui ont eu, entre autres résultats, de rétrécir la superficie qui lui était conséquent. Et, partant, d’entraîner une baisse continue de la production de ces fruits (exotiques).
D’où l’importance et l’urgence de mener à bien et cette relance et toutes les autres opérations engagées pour développer la culture, sur le sol national, d’espèces de fruits, secs et exotiques, habituellement importés ; une urgence et une importance, au demeurant, parfaitement soulignées par les 500 millions de dollars que coûte au pays, selon des sources concordantes, l’importation chaque année de l’équivalent de 500 000 tonnes de ces fruits.
Mourad Bendris