L’insuffisance de l’offre, l’expansion des disponibilités monétaires détenues par les ménages, l’évolution des prix mondiaux des produits de base importés, du reste baissière, ne sauraient être à l’origine de l’ampleur de l’inflation en 2015 estime la Banque d’Algérie dans une note sur l’Inflation. Selon toute probabilité, l’inflation annuelle moyenne au terme de l’année 2015 serait de l’ordre de 4,9 %.
Pour la banque d’Algérie « Il conviendrait plutôt d’en rechercher les causes profondes dans les dysfonctionnements du marché et notamment dans celui des produits agricoles frais caractérisés par une traçabilité limitée des transactions, la multiplication des intermédiaires ainsi que par sa faible régulation ».
L’inflation annuelle moyenne qui avait atteint un maximum décennal de 8,9 % en janvier 2013, a commencé à décroitre en février de la même année et cette tendance baissière s’est poursuivie durant 19 mois, pour atteindre son minimum de 1,5 % en août 2014. Elle s’est de nouveau retournée depuis pour croitre et aboutir à 5,3 % en septembre 2015. Elle s’infléchit au mois suivant à 5,1 %, portant l’indice à 176,07 points base 100 en 2001.
Cette croissance de l’inflation durant les quatorze derniers mois (septembre 2014 à octobre 2015) est due, d’une part à la hausse substantielle des prix des biens suivant à 5,1 %, portant l’indice à 176,07 points base 100 en 2001.
L’accélération de l’inflation, en moyenne annuelle, qui est passée de 2,1 % en octobre 2014 à 5,1 % un an plus tard (+3,0 points de pourcentage), est observée pour tous les groupes de produits, à des taux compris entre 1,19 % (logement et charges) et 8,16 % (habillement et chaussures). Cette accélération se manifeste aussi selon les catégories de produits. Ainsi, les prix des biens alimentaires ont augmenté de 5,78 %, en hausse de 3,1 points de pourcentage en une année.
La dérive des prix des biens agricoles frais de 7,31 %, conjuguée à l’inflation des biens alimentaires industriels (4,3 %, la plus élevée depuis février 2013 ; 33 mois), en a constitué le facteur déterminant. Celle-ci s’explique par l’envolée des mercuriales de quelques produits frais, notamment la « pommes de terre », les « légumes », et le « poisson frais », de 29,83 %, 15,01 % et 10,16 % respectivement.
Par ailleurs, aussi bien les prix des services que des biens manufacturés, ont subi des hausses significatives de 4,3 % et 4,6 % respectivement.
L’inflation structurelle est aussi de tendance croissante depuis février 2014
En outre, l’inflation structurelle (qui exclut les biens à prix volatils, biens agricoles frais) est aussi de tendance croissante depuis février 2014. Cet indicateur exprime une tendance lourde du paramètre mesuré. Les prix des 14 biens et services à prix réglementés, de pondération de 26,1 %, sont restés stables au mois d’octobre et l’indice synthétique, naturellement l’a été aussi, à 142,1 points. Ils ont progressé de 1,0 % en moyenne annuelle et de 2,0 % en glissement annuel.
Les plus forts glissements annuels des prix sont ceux de la farine (19,7 %), de la semoule (5,0 %) et du sucre (2,1 %). Il convient de relever la baisse de 0,5 % en glissement annuel des prix des huiles végétales ainsi que la stabilité de ceux des 10 autres biens et services, à leur niveau d’octobre 2014.
Le marché mondial des produits agricoles était baissier
Le marché mondial des produits agricoles qui était baissier jusqu’à présent commence à enregistrer des hausses de cours, notamment pour le lait en poudre et le sucre dont les prix mensuels en octobre 2015, par rapport à septembre 2015, ont progressé respectivement de 20,9 % et 17,2 % à 2 597 dollars et 306,6 dollars la tonne.
En dépit de ces hausses mensuelles, les cours demeurent nettement plus bas qu’un an auparavant. Le glissement annuel des prix de tous ces produits est négatif, variant entre 23,2 % pour le blé des USA (Hard Red Winter), 5,8 % pour l’huile de tournesol et 8,0 % pour le lait entier en poudre.
L’indice des prix des 24 produits des biens et services à fort contenu d’import (23,4 % de l’indice des prix à la consommation) a progressé de 0,8 point de pourcentage en octobre 2015 à 168,2 points. L’inflation importée, mesurée par cet indice, se stabilise au niveau élevé de 4,0 % en moyenne annuelle. En 10 mois, elle atteint déjà 4,1 %.
En Europe comme aux USA, l’inflation est nulle, en moyenne annuelle, et progresse très légèrement en glissement annuel à 0,2 % (contre 0,0 % en septembre) aux USA et à 0,1 % dans la zone Euro 18 (contre – 0,1 % en septembre) Du fait de la baisse de l’indice national au mois d’octobre 2015 et de la hausse de l’indice harmonisé de la zone Euro, le différentiel d’inflation en moyenne annuelle entre l’Algérie et la zone Euro 18 s’est réduit de 0,2 point de pourcentage à 5,1 points.
L’inflation ne peut s’expliquer par un déficit de l’offre
Du point de vue de l’adéquation de l’offre à la demande, notamment en matière de produits agricoles frais (légumes, fruits, viandes rouges et blanches, lait), il convient de relever que selon les produits, leur offre a progressé à des taux compris entre 6,2 % (viandes rouges) et 13,3 % (viandes blanches) en moyenne sur la période 2010-2014.
Quant à la demande, mesurée par la consommation finale des ménages qui a progressé de 11,1 % en valeur nominale et de 5,1 % en volume, en moyenne au cours de la période 2010-2014, deux facteurs sont à l’origine de son évolution : l’accroissement moyen démographique estimé à 2,1 %, ainsi que celui des revenus salariaux (9,8 %) et non salariaux en raison notamment de l’expansion de la dépense budgétaire de l’ordre de 9,5 % en septembre 2015 par rapport à septembre 2014 ; l’élasticité consommation-revenu étant probablement inférieure à l’unité en moyenne. Il s’en suit qu’un dinar supplémentaire de revenu engendre un supplément de dépense inférieur à un dinar.
Il faut donc relever que l’accroissement moyen de l’offre de produits agricoles frais (entre 6,2 % et 13,3 % selon les produits) est proche de l’accroissement nominal moyen de la demande globale (11,1 %), dont la composante en produits agricoles frais en constitue 16,9 %. Eu égard à la faible élasticité revenu de la demande de la plupart des produits agricoles frais, la forte inflation annuelle moyenne des prix de cette catégorie de produits, de l’ordre de 8,6 %, ne peut donc s’expliquer par un déficit de l’offre.
L’inflation annuelle moyenne en 2015 serait de l’ordre de 4,9 %
L’expansion de la masse monétaire au sens de M2 (disponibilités monétaires et quasi-monétaires) pour les dix premiers mois de 2015 est historiquement basse, de 1,2 % seulement. De plus les disponibilités monétaires au sens de M1 (dépôts à vue et circulation fiduciaire) pour cette même période sont en baisse de 1,7 %.
En outre, la progression des dépôts à vue et de celle, estimée, de la monnaie fiduciaire détenue par les ménages, s’est limitée à 4,4 % au cours des dix premiers mois de 2015. Cette faible expansion monétaire ne saurait par conséquent expliquer intégralement la hausse des prix à la consommation observée au cours de cette période.
Selon toute probabilité, l’inflation annuelle moyenne au terme de l’année 2015 serait de l’ordre de 4,9 %.
K.L.