Dans cet entretien, le président du Syndicat national des pharmaciens d’officines (Snapo), Messaoud Belambri, s’exprime sur les dernières mesures annoncées par le gouvernement en faveur des pharmaciens du Sud du pays.
Concernant les mesures fiscales incitatives annoncées par le Premier Ministre, et qui seront introduites au niveau de la loi des finances 2020, M. Belambri révèle que le Snapo a demandé une audience au Ministre des Finances pour connaitre de manière plus détaillée le contenu de ces mesures, et voir si nous pouvons apporter des propositions à ce sujet.
Algérie-Eco : Le gouvernement a annoncé dernièrement de nouvelles mesures pour les pharmaciens exerçant dans les hauts plateaux et le Sud. Qu’en pensez-vous?
MBelambri : Malheureusement ces mesures ne concernent à notre connaissance que quatre wilayas : Illiziz, Tamanrasset, Adrar et Tindouf, et ne concernerait que les pharmaciens qui vont s’installer. Or, au niveau des principales localités de ces wilayas, nous avons déjà suffisamment d’officines ouvertes, et qui ne seraient pas concernées par ces nouvelles mesures incitatives. Alors qu’elles fonctionnent très difficilement, leur situation économique est très précaires, et connaissent de sérieuses difficultés d’approvisionnement. De plus, des officines qui existent dans d’autres wilayas du Sud telles que Biskra, Ouargla, et El Oued ou Ghardaia, connaissent pratiquement les mêmes difficultés. Nous doutons fort que de nouveaux pharmaciens aillent s’installer au niveau des localités qui sont dépourvues d’officines, car le nombre de la population est très faible, et les structures de santé avec médecins sont quasiment absentes. Au niveau de ces localités, une proposition a été avancée, celle de permettre aux pharmaciens déjà installés au niveau des villes principales des 04 wilayas citées, d’ouvrir des annexes pour y dispenser des médicaments. C’est un travail qui doit être cadré par la commission nationale installée en juin, et qui est composée des principaux services du ministère de la santé, du Snapo, et de l’Ordre.
Pour revenir aux mesures fiscales incitatives annoncées par Monsieur le Premier Ministre, et seront introduites au niveau de la loi des finances 2020, nous avons demandé une audience au Ministre des Finances pour connaitre de manière plus détaillée le contenu de ces mesures, et voir si nous pouvons apporter des propositions à ce sujet.
Il ne faut pas oublier que les pharmaciens sont fortement engagés sur le plan social à travers le tiers payant, et jouent un grand rôle dans l’accessibilité de la population en tout lieu au médicament, et les perturbations qui touchent la disponibilité des médicaments rendent la tache du pharmacien plus difficile.
Le Snapo a organisé dernièrement une rencontre sur les psychotropes. D’abord pourquoi le choix de ce thème?
Depuis déjà quelques années, les pharmaciens trouvaient d’énormes difficultés dans la gestion des psychotropes. Mais l’année 2019 a été marquée par une recrudescence des actes d’agression contre les pharmaciens d’officine, allant jusqu’à enregistrer des assassinats au cœur même des officines. D’un autre côté, sur le plan réglementaire et juridique, un énorme travail devait se faire, mais il tardait à se concrétiser sur le terrain, malgré les réunions pendant presque trois ans de deux commissions, l’une au niveau du ministère de la justice, et l’autre au niveau du ministère de la santé. Un projet de décret ayant été finalisé et approuvé par le conseil des ministres le 17 juillet passé, et un projet de loi en préparation au niveau du ministère de la justice, nous a poussé à organiser cette conférence nationale le 16 septembre, avec la participation de tous les secteurs concernés par ce dossier. Cette conférence nationale a connu la participation en force du ministère de la justice, du ministère de la santé, de sureté nationale, de la gendarmerie nationale, des douanes algériennes, de l’office national de lutte contre la drogue et la toxicomanie, des conseils de l’ordre des médecins et des pharmaciens, ainsi que d’experts connus pour leurs compétences dans le domaine médical.
Il y a eu des conférences et des exposés sur les projets des textes réglementaires, des analyses sur l’usage des psychotropes et leurs assimilés, et des données très utiles et importantes ont été communiqués. Les services judiciaires et les services de sécurité ont pu également à travers nos exposés, constater les difficultés rencontrées par les pharmaciens dans la gestion des produits psychotropes, et se sont montrés particulièrement sensibles à leur situation.
La conférence a été clôturée par des recommandations sur les quelles ont été unanimement d’accord tous les participants. Nous avons remis et communiqué ces recommandations à tous les ministères et institutions concernés. Nous espérons maintenant que la reforme et la publication des textes va s’accélérer.
Ensuite est-ce que les revendications des pharmaciens à propos de la commercialisation de ces produits ont été prises en considération?
Aussi bien dans les projets des textes réglementaires en préparation et parmi les recommandations retenues lors de la conférence, de nombreuses résolutions répondent aux inquiétudes et revendications des pharmaciens. Plusieurs nouvelles dispositions retenues ou recommandées vont améliorer le quotidien des pharmaciens, nous citons : le fichier numérique centrale, les ordonnances à souches, une classification nationale et autonome des psychotropes, la mise à jour et la publication des tableaux des psychotropes, de nouvelles notions juridiques protégeant le pharmaciens contre les ordonnances fictives ou de complaisance, et contre les menaces et les agressions.
C’est un ensemble de nouvelles dispositions qui va sécuriser le travail du pharmacien, et qui va l’aider à exercer dans des conditions plus sereines et plus sures.
Quelles sont les prochaines activités du Snapo en cette rentrée sociale?
Le Snapo dispose d’un programme de formation et de communication qui s’étale sur toute l’année. En octobre nous organisons des rencontres régionales pour les pharmaciens à Tizi Ouzou puis à Chlef, en novembre à El Oued, et en décembre à Alger. Ça rentre dans le cadre de notre programme de formation continue, et de discussion sur les sujets et dossiers actuels ; notamment les nouveaux textes concernant les psychotropes, et les textes d’application de la nouvelle loi sanitaire 18-11 de juillet 2018, qui va concerner les nouvelles missions du pharmacien d’officine au sein du système de santé, la formation continue qui devient obligatoire, et le statut du pharmacien assistant.
Nous participons chaque semaine aux réunions de la cellule de veille aux cotés des autres acteurs du secteur du médicament, afin d’aider le ministère à adopter toute mesure en vue de stabiliser le marché du médicament. Nous tenons également lors des prochaines semaines les réunions périodiques des commissions nationales mixtes avec la Cnas et la Casnos, pour le suivi du tiers payant, et faire l’évaluation du contrôle médical à distance qui vient d’être généralisé à toutes les wilayas, après une phase test réussie au niveau de 11 wilayas pilotes. Ce nouveau système novateur va conforter les assurés sociaux et les pharmaciens conventionnés.