Espoir brisé pour Aigle Azur et ses 1.150 salariés: aucune offre de reprise n’a été retenue pour la compagnie aérienne spécialiste de l’Algérie, qui va cesser son activité vendredi soir, a annoncé le tribunal de commerce d’Evry
« On avait espéré jusqu’au bout que quelque chose se passe », a regretté Bruno Forey, de la CFDT, le premier syndicat de la compagnie. « Il semblerait que l’on veuille que le transport aérien français soit axé uniquement autour d’Air France », a-t-il lancé, disant éprouver « une profonde déception ».
De son côté, la présidente du tribunal de commerce Sonia Arrouas a regretté dans un communiqué une décision « difficile », car « tout avait été mis en œuvre pour sauver les salariés ». « La fin de la poursuite d’activité aura lieu ce soir, vendredi 27 septembre à minuit », a-t-elle ajouté.
Concrètement, « la liquidatrice a 21 jours pour licencier tout le monde », explique Bruno Forey. « C’est la durée légale. Il n’y a pas de plan de sauvegarde de l’emploi, donc tout le monde est licencié au minimum légal. On va pointer à Pôle emploi dans 21 jours ».
Aigle Azur, spécialisée dans les liaisons avec l’Algérie et la desserte du bassin méditerranéen, emploie quelque 1.150 personnes, dont 800 en France et 350 en Algérie.
– « Désistements » et « absences d’offres concrètes » –
La compagnie, dont les 11 avions ne volent plus depuis le 7 septembre, avait été placée en liquidation judiciaire le 16 septembre avec poursuite d’activité jusqu’à ce vendredi pour laisser aux repreneurs le temps d’améliorer leurs offres de reprise.
Mais finalement, « aucune solution pérenne n’a été proposée par les candidats repreneurs », a expliqué Mme Arrouas, déplorant « les désistements ou les absences d’offres concrètes, l’absence de moyens financiers des candidats crédibles », « l’indétermination de la provenance des fonds » ou encore « l’irrecevabilité de certaines propositions ».
Le secrétaire d’Etat aux Transports Jean-Baptiste Djebbari, qui a promis aux salariés « un accompagnement particulier (…) afin d’assurer un retour plus rapide à l’emploi », a réagi en assurant que « tout avait été mis en œuvre pour donner leurs meilleures chances aux offres de reprise », mais qu' »aucune offre financée » n’avait pu « aboutir ».
Deux offres étaient étudiées, l’une émanant de deux anciens responsables d’Air France, Lionel Guérin et Philippe Micouleau, subordonnée à l’obtention d’un prêt participatif de 15 millions d’euros auprès de l’État, l’autre présentée par Lu Azur, actionnaire minoritaire d’Aigle Azur à hauteur de 19%.
« L’une ne pouvait être choisie car elle reposait sur une majorité de capitaux extra-communautaires, l’autre était assortie d’une aide de l’État », a expliqué à l’AFP Bruno Forey, également membre du Comité social et économique de l’entreprise.
– Conditions « compliquées » –
Air France, un temps intéressée, n’avait finalement pas déposé d’offre. « Il y a certains avoirs intéressants » mais les conditions légales et sociales « sont plutôt compliquées », a estimé Benjamin Smith, directeur général d’Air France-KLM, vendredi lors d’une conférence de presse à Toulouse.
« Nous voulions bien reprendre des gens, les accueillir, mais à des conditions qui nous permettent de réussir », a déclaré de son côté Marc Rochet, directeur général du groupe Dubreuil Aero (maison mère d’Air Caraïbes et de French Bee), sur franceinfo, blâmant « des gens qui ont mené une guérilla permanente contre les directions successives (…) et se sont construits des statuts qui font que ça n’est plus cohérent avec le marché ».
Liant la situation d’Aigle Azur à celle d’une autre compagnie en difficulté, XL Airways, une intersyndicale du transport aérien a appelé vendredi le gouvernement à venir en aide à un secteur engagé dans une « trajectoire mortifère ». Ils demandent à être reçus « au plus vite », dans une lettre ouverte au secrétaire d’État aux Transports Jean-Baptiste Djebbari.
« Le marché français est très fragmenté », a de son côté estimé M. Smith, jugeant « qu’il allait y avoir une consolidation » permettant aux compagnies basées dans l’Hexagone d’être « plus fortes » et de « croître ».
Selon Bruno Forey, Air France bénéficiera de la fin d’Aigle Azur: « la moitié des créneaux » d’atterrissage et de décollage à l’aéroport d’Orly « doit être redistribuée au prorata de l’activité », lui revenant en grande partie.
Ces créneaux, très convoités car leur total est plafonné, seront réattribués au bout d’un mois par l’Association pour la coordination des horaires (Cohor).