Le géant électronique américain Apple, soucieux de renforcer sa présence en Chine, a investi un milliard de dollars dans Didi, la principale application chinoise de réservation de taxis, à l’heure où celle-ci cherche la parade face à la montée en puissance de son rival Uber.
Il s’agit du « plus important investissement individuel » reçu jusqu’à présent par Didi, faisant du groupe californien l’un de ses investisseurs « stratégiques », a annoncé vendredi la firme chinoise, « Didi Chuxing » de son nom complet. Cet investissement d’Apple est dévoilé alors que le groupe à la pomme voit son étoile pâlir: après le repli de ses ventes d’iPhones au dernier trimestre, Apple a perdu jeudi sa place de première capitalisation boursière mondiale, au profit d’Alphabet, maison mère de Google.
« Nous anticipons de nombreuses opportunités pour des coopérations plus approfondies » avec Didi, a confié le patron d’Apple Tom Cook, dans des propos rapportés par l’agence Chine nouvelle.
La région chinoise (Chine continentale, Macao, Hong Kong et Taïwan) représente le deuxième plus gros marché d’Apple après les Etats-Unis – mais il y voit ses parts de marché s’effriter face aux fabricants de smartphones chinois, dont Huawei et Xiaomi.
Apple pâtit également des restrictions imposées par les autorités: ses services en ligne iTunes Movies et iBooks sont récemment devenus inaccessibles en Chine.
En s’introduisant au capital de Didi, Apple offre à Pékin des gages de bonne volonté, tout en se rapprochant des deux mastodontes de l’internet chinois qui soutiennent l’application: Tencent, opérateur de la messagerie WeChat, et Alibaba , numéro un local du commerce en ligne.
Le géant californien s’associe de surcroît à un service extrêmement populaire: Didi compte 300 millions d’usagers inscrits, pour plus de 11 millions de courses effectuées chaque jour à travers 400 villes chinoises.
« Cet investissement s’explique par des raisons stratégiques, dont la chance d’en apprendre davantage sur certains segments du marché chinois », a expliqué Tim Cook vendredi, tout en vantant les « innovations » de Didi. De l’avis des analystes, l’opération – rapidement conclue – illustre les efforts de diversification d’Apple.
Pour le site financier chinois Huxiu, des coopérations pourraient s’esquisser dans les paiements électroniques: « C’est une excellente affaire pour Apple de s’associer à une application possédant une large base d’usagers et où sont effectués des paiements fréquents », note-t-il.
L’entreprise américaine a lancé en février en Chine son service de paiement mobile Apple Pay, mais peine à faire le poids face aux plateformes de paiement établies par Alibaba (Alipay) et Tencent, qui dominent le marché.
Didi pourrait aussi ouvrir à Apple la porte du prometteur marché chinois des technologies automobiles intégrées, au moment où le groupe californien planche sur un ambitieux projet de voiture autonome.
A l’inverse, pour Didi, l’appui d’Apple arrive à point nommé dans sa bataille acharnée contre Uber, présent en Chine depuis 2014.
L’an dernier, Didi dominait 99% du marché chinois des réservations de taxi en ligne et 87% de celui des réservations de véhicules privés avec chauffeur. Or, sur ce créneau, Uber s’est désormais arrogé entre 10 et 15% de parts de marché, à coup d’investissements colossaux, subventionnant largement les trajets des usagers pour élargir sa clientèle.
Une stratégie efficace mais coûteuse: le patron d’Uber Travis Kalanick a reconnu en février que son entreprise perdait « plus d’un milliard de dollars » par an en Chine. Également très généreux en subventions, Didi a levé depuis l’été dernier plusieurs milliards de dollars.
Selon des sources proches du dossier interrogées par Bloomberg News, l’investissement d’Apple fait partie d’une récente levée de fonds de 3 milliards de dollars, ce qui valorise l’entreprise chinoise à environ 26 milliards de dollars.
Didi, né en 2015 de la fusion de deux applications concurrentes, conforte également ses alliances à l’étranger. Il a pris en 2015 des participations dans la principale application indienne de réservation de taxis (Ola), mais aussi dans l’américain Lyft, rival d’Uber aux Etats-Unis: une façon de défier ce dernier sur son principal terrain.
L’avenir en Chine d’Uber et de Didi reste également suspendu à de possibles durcissements réglementaires: le ministère des Transports a ainsi évoqué à plusieurs reprises son intention d’encadrer plus strictement les services proposés par les conducteurs de voitures privées.
AFP