Le professeur et expert en économie, Abderrahmane Mebtoul analyse les raisons de la distorsion de la cotation du dinar entre le cours officiel et celui de la sphère informelle.
Selon lui, il faut avant tout, analyser la réalité de l’économie algérienne qui reflète les fondements de la valeur d’une monnaie, devant cerner les causes essentielles de la distorsion entre la valeur officielle du dinar et celle du le marché, de s’attaquer à l’essence du mal et non aux apparences.
Comme première raison, MMebtoul parle de l’écart s’explique qui par la faiblesse de la production et la productivité, l’injection de monnaie sans contreparties productives engendrant le niveau de l’inflation.
Il argumente cela par le rapport de l’OCDE, qui dit que la productivité du travail de l’Algérie est l’une des plus faibles au niveau du bassin méditerranéen. A cela s’ajoute la non proportionnalité entre la dépense publique et le faible impact, le taux de croissance.
Ensuite, le professeur estime que l’écart s’explique par la diminution de l’offre du fait que la crise mondiale, combinée avec le décès de nombreux retraités algériens, a largement épongé l’épargne de l’émigration. « Cette baisse de l’offre de devises a été contrebalancée par les fortunes acquises régulièrement ou irrégulièrement par la communauté algérienne localement et à l’étranger qui font transiter irrégulièrement ou régulièrement des devises en Algérie, montrant clairement que le marché parallèle de devises est bien plus important que l’épargne de l’émigration », dira-t-il.
Troisièmement, selon lui, la demande provient de simples citoyens qui voyagent : touristes, ceux qui se soignent à l’étranger et les hadjis) du fait de la faiblesse de l’allocation devises dérisoire. Mais ce sont les agences de voyages qui, à défaut de bénéficier du droit au change, recourent elles aussi aux devises du marché noir étant importateurs de services. Majoritairement elles exportent des devises au lieu d’en importer comme le voudrait la logique touristique comme en Turquie, au Maroc ou en Tunisie, selon MMebtoul.
Comme quatrième raison, il avance la forte demande qui provient de la sphère informelle avec une intermédiation financière informelle loin des circuits étatiques, expliquant le résultat mitigé de la mesure d’intégrer ce capital argent au sein de la sphère réelle.
Cinquièmement, l’écart s’explique, selon M.Mebtoul, par le passage du Remdoc au Credoc, instauré en 2009, qui a pénalisé les petites et moyennes entreprises et n’a pas permis de juguler comme cela était prévu la hausse des importations qui ont doublé depuis 2009 ,tout en renforçant les tendances des monopoleurs importateurs. Sixièmement, pour l’économiste, beaucoup d’Algériens et d’étrangers utilisent le marché parallèle pour le transfert de devises, puisque chaque algérien a droit à 7200 euros par voyage transféré, utilisant leurs employés algériens pour augmenter le montant, assistant certainement, du fait de la méfiance, à une importante fuite de capitaux de ceux qui possèdent de grosses fortunes.
Et enfin, pour se prémunir contre l’inflation, et donc la détérioration du dinar algérien, MMebtoul considère que l’Algérien ne place pas seulement ses actifs dans le foncier, l’immobilier ou l’or, mais une partie de l’épargne est placée dans les devises. En effet, beaucoup de ménages se mettent dans la perspective d’une chute des revenus pétroliers, et vu les fluctuations erratiques des cours d’or, achètent les devises sur le marché informel.