Du gouvernement Sellal, au gouvernement Ouyahia, passant par celui de Tebboune, le cahier des charges régissant l’activité de montage et d’assemblage de véhicules en Algérie, a été pratiquement confectionné, dans le secret et l’intrigue mais surtout à l’emporte-pièce, pour favoriser certains lobbys.
Vilipendé, contesté et enfin pointé du doigt, le texte a fait l’objet de révision et sa version définitive vient d’être, publiée en annexe au décret signé par Ahmed Ouyahia en date du 28 novembre. Sans pour autant apporter de réelles réponses aux défauts, notamment celui du fameux taux d’intégration, qui outrageusement, permettait l’exercice de « l’importation déguisée ».
Ce que dit un expert du texte révisé
L’expert financier Ferhat Ait Ali estime, que « le cahier de charges relatif à l’industrie automobile, et à part quelques points relatifs aux licences et autres engagements des constructeurs étrangers en matière de prix et de promotion des exportations difficiles à envisager, le reste relève de l’exercice de style dans l’enfumage ».
Si l’on venait à la comparaison entre les deux versions, dans sa première mouture le cahier des charges, stipule dans son article 10 que « le taux d’intégration locale doit représenter au moins 40% à la cinquième année du démarrage de l’activité de production avec l’atteinte de 15% minimum à la troisième année ».
Les mêmes conditions d’intégration, sont retenues dans l’article 04 du nouveau cahier des charges, puisqu’il stipule que « la société de production et de montage, s’engage à atteindre un taux d’intégration minimum de 15 % après la troisième année d’activité, à compter de la publication du présent cahier des charges, et de 40 % à 60 % après la cinquième année ».
Réagissant sur l’équation présentée dans ce cahier des charges, pour le calcul du taux d’intégration, l’expert dénonce « une formule foireuse », qui tend uniquement à embrouiller les lecteurs, du fait que ce taux est calculé sur le volume global des importations sur les exportations, et non pas sur la valeur du véhicule. « Ainsi, quelqu’un qui achète pour 1 Milliard de dollars de véhicules, et en réexporte pour 200 millions, aura de facto, un taux d’intégration de 20%, même s’il leur faisait juste un tour au port et à perte »explique M.Ait Ali.
Et d’ajouter « le taux d’intégration calculé dans le monde entier sur la base des valeurs ajoutées locales, nous avons droit ici, à une équation bizarre, qui donne à penser que les concepteurs du document, ont une curieuse conception des équations, les calculs eux même qui sont bidouillés, de manière à ne jamais faire un taux d’intégration, mais juste, le fabriquer par toutes sortes d’artifices comptables, en vue d’offrir une couverture légale à une combine.. »
Ce que disaient les ministres
Une affaire qui, en plus d’avoir générer une grande polémique, a donné lieu à des déclarations et des aveux de la part des différents ministres de l’industrie, suite à l’explosion de l’affaire Tahkout.
En première réaction, l’ex ministre de l’industrie Abdselem Bouchouareb avait annoncé ouvertement lors de sa visite dans la wilaya de Chlef en avril 2017, que « tout projet de montage d’automobiles, devra démarrer avec un taux d’intégration de 5% à 10% minimum. Le cahier des charges rectifié et clarifié sera présenté le 2 mai au Gouvernement, en même temps que celui de la pièce des rechange ».suivi de la fameuse phrase de son successeur, Mahjoub Bedda, remettant en cause l’ancienne mouture du cahier des charges, et promettant la réorganisation de l’ensemble du secteur de l’automobile « l’importation déguisée c’est terminé en Algérie ».
L’ex premier ministre Abdelmadjid Tebboune, avait carrément pris la décision « de différer l’étude des projets de montage industriels nouveaux et de procéder à l’élaboration d’un nouveau cahier des charges par le ministère de l’Industrie et des mines en concertation avec l’ensemble des parties impliquées, à l’exemple des secteurs des Finances, du Commerce, des Douanes et des Banques.
Dans l’optique de la création d’un véritable marché de la sous-traitance nationale à même d’assurer un niveau d’intégration qui soit satisfaisant, la réduction de la facture des importations, la création d’emplois et l’introduction de la notion d’équilibre et de proportionnalité d’exonération des taxes et impôts et du taux d’intégration ».
Il est clair cependant pour les observateurs, que l’activité de montage et d’assemblage de vehicules, est tombé sous le joug des lobbys , et à ce titre l’émergence d’un cahier des charges tel que le conçoivent les experts et les hommes politiques de bonne volonté, demeurera du domaine du rêve « on passe de la case, je fais ce que je veux , de l’époque Sellal, à la case, je fais ce que je veux, sous couverture légal, en détournant les concepts, pour arriver au résultat que je veux, sous Ouyahia » martèle M. Ait Ali.