Quand elle a eu besoin d’argent pour refaire sa garde-robe ou s’acheter un projecteur, Jia Xinru en a obtenu en un clic, profitant de l’essor du crédit en ligne en Chine. Aujourd’hui, la jeune femme peine à rembourser ses traites et Pékin s’alarme des risques liés à ce boom peu régulé du micro-crédit.
Alors étudiante sans revenus, Mlle Jia ne pouvait obtenir une carte de crédit bancaire. Lorsqu’elle a voulu s’acheter un projecteur pour regarder « Breaking Bad » sur son mur, elle s’est précipitée sur son smartphone.
Elle a recouru au service de finance en ligne du géant de l’e-commerce Alibaba, Ant Financial, pour obtenir les fonds en quelques minutes. De quoi l’inciter à emprunter encore et encore.
Aujourd’hui âgée de 24 ans, Jia Xinru gagne sa vie comme secrétaire, mais sa dette dépasse 7.600 euros et les remboursements mensuels avalent son maigre salaire, la poussant à s’endetter davantage: « un effet boule de neige », explique-t-elle à l’AFP.
Dans une Chine où les smartphones et le paiement électronique sont omniprésents, les plateformes offrant des crédits en ligne ont prospéré, contribuant au doublement en cinq ans de la dette des ménages.
Seuls un tiers des Chinois possèdent une carte de crédit, selon un chiffre officiel, et nombre d’entrepreneurs privés peinent à obtenir des prêts auprès des banques traditionnelles, qui privilégient grands groupes et entreprises étatiques.
Pour eux, la finance en ligne offre un recours précieux. « La plupart de nos emprunteurs habitent dans des villes moyennes et ont un mal fou à obtenir une carte de crédit », confirme une commerciale de la plateforme en ligne Guangxindai.
Les géants de l’internet chinois Alibaba, Baidu et Tencent,via sa populaire messagerie WeChat, permettent tous de décrocher des prêts à la demande sur leurs applications mobiles.
Et de jeunes pousses ont multiplié les plateformes spécialisées: parmi elles, Qudian, PPDAI et China Rapid Finance ont d’ailleurs fait leur entrée cette année à Wall Street. Sur PPDAI, qui compte 9 millions d’usagers, le volume de prêts a quintuplé depuis 2015.
Alors que les Chinois étaient naguère obsédés par l’épargne, « on voit une évolution, ils sont plus enclins à s’endetter », observe Jason Bedford, analyste de la banque UBS, voyant dans les prêts à la consommation « le prochain nirvana du crédit ».
Au total, le secteur chinois du micro-crédit pèse, selon une estimation citée par Bloomberg, quelque 152 milliards de dollars.
Et la Chine représente 85% du total mondial des « prêts alternatifs », octroyés en quelques minutes et en-dehors des banques traditionnelles, selon une étude de l’Université de Cambridge. D’ici 2020, le secteur pourrait dépasser celui des cartes de crédit.
Afp