Trois ex-salariés syriens de la cimenterie Lafarge en Syrie ont été entendus cette semaine à Paris dans l’enquête sur le groupe français, soupçonné d’avoir indirectement financé des groupes armés, dont l’organisation État islamique, a appris mercredi l’AFP de source proche de l’enquête.
L’enquête menée en France s’attache à déterminer les liens qu’a pu entretenir le géant du ciment, notamment avec l’EI, pour continuer à faire fonctionner en 2013 et 2014, malgré le conflit, la cimenterie de Jalabiya (nord du pays).
Elle porte aussi sur la connaissance qu’auraient eue des responsables du groupe en France de tels accords et du danger qu’ils ont pu faire courir aux employés sur place.
Au cours de leurs auditions, les anciens salariés ont confirmé « le caractère accablant des éléments qui pourraient être retenus contre Lafarge », a indiqué à l’AFP leur avocate Marie Dosé.
Il s’agit des premières auditions dans cette enquête pour « financement d’entreprise terroriste » et « mise en danger de la vie d’autrui », confiée en juin à trois juges d’instruction parisiens.
Les ex-salariés, un informaticien, un ingénieur et un employé chargé des emballages dans l’usine, venus spécialement de Syrie pour répondre à la convocation des magistrats français, ont été entendus pendant plusieurs heures lundi, mardi et mercredi, a précisé la source proche de l’enquête.
Le scandale avait été révélé en juin 2016 par une enquête du quotidien français Le Monde qui avait mis en lumière de « troubles arrangements » entre Lafarge Cement Syrie (LCS), branche syrienne du groupe, et l’organisation État islamique alors que le groupe jihadiste gagnait du terrain et devenait incontournable dans la région.
Deux mois plus tard, le ministère français de l’Économie avait déposé plainte, déclenchant l’ouverture d’une enquête préliminaire par le parquet de Paris, confiée à un service des Douanes.
Dans leur rapport, dont l’AFP a eu connaissance, les Douanes concluent que LCS a « effectué des paiements aux groupes jihadistes » pour que la cimenterie continue de fonctionner.
La direction française du groupe Lafarge, qui a fusionné en 2015 avec le suisse Holcim, « a validé ces remises de fonds en produisant de fausses pièces comptables », ajoute le rapport, également révélé par les journaux français Le Canard enchaîné et Le Monde.
Afp