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Importation de véhicules de moins de 3 ans : la Cour constitutionnelle a tranché

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La Cour constitutionnelle vient de rendre sa décision concernant deux saisines relatives à des articles de la Loi de finances (LF) 2025, adoptée par le Parlement et signée par le président de la République en novembre dernier.

La décision de la Cour, publiée dans le Journal officiel n°81, porte sur les articles 103 et 208 de la LF 2025, respectivement relatifs à la protection de la vie privée des citoyens et à l’importation de véhicules de moins de trois ans. Ces articles ont été contestés par 47 députés de l’Assemblée populaire nationale (APN), notamment le député des Algériens de l’étranger, Abdelouahab Yakoubi.

Les parlementaires à l’origine des saisines estimaient que ces articles violaient plusieurs dispositions de la Constitution, notamment : L’article 47, qui garantit la protection de la vie privée et la confidentialité des données personnelles ; L’article 60, qui garantit le droit de propriété ; Les articles 35 et 37, qui consacrent l’égalité des citoyens en droits et en devoirs.

La Cour constitutionnelle a tranché en faveur de la constitutionnalité des articles 103 et 208, affirmant que les mesures contestées respectaient les principes fondamentaux établis par la Constitution. Elle « déclare la constitutionnalité des articles 103 et 208 du texte adopté par le Parlement portant loi de finances pour 2025 », lit-on dans la décision.

Article 208 : Importation de véhicules de moins de trois ans

Concernant l’importation des véhicules de moins de trois ans, la Cour a examiné les griefs des députés, qui considéraient que cet article discriminait les Algériens résidant à l’étranger en les privant de ce droit. Ils ont également avancé que les restrictions imposées au dédouanement (l’incessibilité pendant trois ans des véhicules importés) violaient le droit de propriété garanti par la Constitution.

La Cour a rappelé que cette mesure s’inscrivait dans le cadre des dispositions de la loi de finances pour 2020. Selon l’article 110 de cette loi, le dédouanement des véhicules de tourisme de moins de trois ans est autorisé pour les particuliers résidents, une fois tous les trois ans, sur leurs devises propres.

Elle a ajouté que les restrictions liées à la cessibilité des véhicules, prévues par l’article 208, visaient à préserver l’ordre public et à protéger l’économie nationale, conformément à l’article 34 de la Constitution. La Cour a donc conclu que ces limitations ne constituaient pas une atteinte au droit de propriété.

La Cour constiutionnelle souligne dans sa décision que « les auteurs de la saisine soutiennent que l’article 203 du projet de loi de finances pour 2025, alors qu’il s’agit de l’article 208 du texte adopté par le Parlement, portant loi de finances pour 2025, viole les droits d’égalité et de propriété, en stipulant que « les dispositions de l’article 110 de la loi de finances pour 2020 sont modifiées, complétées et rédigées comme suit : ‘Est autorisé le dédouanement des véhicules de tourisme usagés …… (sans changement jusqu’à) protection de l’environnement. Ces véhicules sont incessibles pour une durée de trente-six (36) mois (3 ans, ndlr), à compter de la date de leur dédouanement‘ ».

« Toutefois, les voitures acquises par les bénéficiaires susmentionnés peuvent être cédées, après paiement de l’avantage fiscal accordé, dans les cas suivants : Reversement de la totalité de l’avantage fiscal accordé, si le véhicule est cédé dans un délai inférieur ou égal à douze (12) mois, à compter de sa date de dédouanement. Reversement de soixante-six pour cent (66%) de l’avantage fiscal accordé, si le véhicule est cédé dans un délai supérieur à douze (12) mois et inférieur ou égal à vingt-quatre (24) mois, à compter de sa date de dédouanement. Reversement de trente-trois pour cent (33%) de l’avantage fiscal accordé, si le véhicule est cédé dans un délai supérieur à vingt-quatre (24) mois et inférieur ou égal à trente-six (36) mois, à compter de sa date de dédouanement. Aucun reversement du paiement de l’avantage fiscal accordé n’est exigé si le véhicule est cédé après trente-six (36) mois, à compter de sa date de dédouanement. Toute disposition contraire ………. (le reste sans changement) ………………… est annulée », selon la Cour.

Dans leur saisine, les députés estiment que l’article en question « prive les citoyens algériens (résidant à l’étranger) du droit d’importer, en Algérie, des voitures de moins de trois (3) ans », et « qu’il est contraire aux dispositions des articles 35 et 37 de la Constitution qui garantissent l’égalité de tous les citoyens et citoyennes en droits et en devoirs, et les prive également, selon eux, du droit de propriété dans leur pays, consacré par l’article 60 de la Constitution, sous prétexte qu’elle serait en contradiction avec les Conventions internationales relatives à l’harmonisation des régimes douaniers ».

La Cour constitutionnelle rappelle que l’autorisation de dédouaner les voitures de tourisme importées, de moins de trois (3) ans, et sa limitation aux résidents privés, une fois tous les trois (3) ans, est une mesure qui s’inscrit dans le cadre des dispositions de la loi de finances pour 2020, en vertu de son article 110 dont le deuxième alinéa stipule que : « Sont, également, autorisés au dédouanement pour la mise à la consommation, avec paiement des droits et taxes relevant du régime de droit commun, les véhicules de tourisme de moins de trois (3) ans d’âge, importés par les particuliers résidents, une (1) fois tous les trois (3) ans, sur leurs devises propres, par débit d’un compte devises, ouvert en Algérie ».

« En conséquence, cette disposition ne peut être soumise au contrôle de constitutionnalité, dès lors que l’article 190 (alinéa 2) de la Constitution stipule que :  »La Cour constitutionnelle peut être saisie ………… lois avant leur promulgation », soumettant ainsi les lois au contrôle de constitutionnalité avant leur promulgation », tranche la Cour.

Et d’ajouter que « les auteurs de la saisine fondent leur prétention relative à l’inconstitutionnalité de l’article 208 de la loi de finances, précitée, sur sa violation du droit de propriété lequel est consacré par la Constitution en vertu de son article 60. Il convient de souligner que le droit de propriété n’est pas un droit absolu, et que l’article 34 (alinéa 2) de la Constitution permet de restreindre les droits et libertés par la loi, lorsqu’il existe des raisons liées au maintien de l’ordre public et de la sécurité, sans pour autant en affecter l’essence ».

Article 103 : Protection de la vie privée et échange de données fiscales

L’article 103 introduit un article 61 bis dans le Code des procédures fiscales, permettant à l’administration fiscale d’échanger des renseignements avec les États ayant conclu une convention d’assistance administrative avec l’Algérie. Les parlementaires à l’origine de la saisine soutenaient que cette disposition violait l’article 47 de la Constitution, qui protège la vie privée et garantit la confidentialité des données personnelles.

Dans sa décision, la Cour a estimé que l’échange de renseignements fiscaux, basé sur le principe de réciprocité, ne relevait pas de la protection de la vie privée telle que définie par la Constitution. Elle a souligné que cette mesure visait à lutter contre la fraude et l’évasion fiscales, en renforçant l’arsenal juridique de l’État et en harmonisant sa législation avec celle des pays membres du Forum mondial sur la transparence.

A ce propos, la Cour souligne que « les auteurs de la saisine prétendent que l’article 61 bis, prévu à l’article 100 du projet de loi de finances pour 2025, alors qu’il s’agit en réalité de l’article 103 du texte adopté par le Parlement, portant loi de finances pour 2025 ».

Cet article dispose que : « Il est créé au sein du code des procédures fiscales, un article 61 bis, rédigé comme suit : Art. 61 bis. — L’administration fiscale peut échanger des renseignements avec les Etats ayant conclu avec l’Algérie une convention d’assistance administrative, en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales, enfreignant ainsi les dispositions de l’article 47 de la Constitution qui stipule que : Toute personne a le droit à la protection de sa vie privée et de son honneur. Toute personne a droit au secret de sa correspondance et de ses communications privées, sous toutes leurs formes. Aucune atteinte aux droits cités aux paragraphes 1er et 2 n’est permise sans une décision motivée de l’autorité judiciaire. La protection des personnes dans le traitement des données à caractère personnel est un droit fondamental. La loi punit toute violation des droits susmentionnés ».

Selon la même source, « les auteurs de la saisine considèrent que l’article 47 de la Constitution, précité, qui consacre la protection par l’Etat de la vie privée des citoyens et garantit la confidentialité des données à caractère personnel, ne permet, en aucun cas, à l’administration fiscale, de compromettre les intérêts de la Nation en faveur d’une partie ou d’un organisme privé étranger ».

La Cour rappelle que « la législation algérienne a spécifié, en vertu de l’article 3 de la loi n° 18-07 du 25 Ramadhan 1439 correspondant 10 juin 2018 relative à la protection des personnes physiques dans le traitement des données à caractère personnel, qu’il est entendu par cette expression  »Toute information, quel qu’en soit son support, concernant une personne identifiée ou identifiable, (…), d’une manière directe ou indirecte, notamment par référence à un numéro d’identification ou à un ou plusieurs éléments spécifiques de son identité physique, physiologique, génétique, biométrique, psychique, économique, culturelle ou sociale » »

Selon la même source, « le constituant a approuvé, en vertu de l’article 47 de la Constitution, le principe de la protection de la vie privée comme l’un des fondements des droits de l’homme à la liberté, à l’égalité, à l’honneur et à la dignité à l’ère du numérique, alors que les renseignements échangés entre pays dans le domaine de la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales, en vertu du principe de réciprocité, ne relèvent pas de la protection de la vie privée avec ses composantes, telles que le droit à l’intimité, à la vie familiale et affective, la protection de la confidentialité des dossiers personnels de santé ou financiers, tels que les numéros de compte, de cartes de crédit et les biens, ainsi que le droit à l’image et d’autres aspects permettant d’identifier une personne ».

La Cour explique que « l’article 103 de la loi de finances pour 2025, objet de saisine, précité, a introduit l’article 61 bis du code des procédures fiscales, dont l’objet est de permettre à l’administration fiscale d’échanger des renseignements avec les pays ayant conclu avec l’Algérie une convention d’assistance administrative, dans le but de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales ».

Et que « cette mesure vise à renforcer l’arsenal juridique de l’Etat, en adaptant et en harmonisant sa législation nationale avec celle des pays constituant le Forum mondial sur la transparence, dont l’Algérie est membre, ainsi la mise à la disposition de l’administration fiscale de mécanismes juridiques supplémentaires et efficaces permettra de réprimer certaines pratiques préjudiciables à l’économie nationale, telle que l’évasion fiscale qui nuit aux ressources de l’Etat et à son développement durable. De plus, cette mesure contribue à améliorer le climat des affaires et à renforcer la sécurité juridique accordée aux investisseurs en particulier, ainsi qu’aux contribuables, notamment par le renforcement des mécanismes de règlement des différends fiscaux internationaux ».

Selon la Cour constitutionnelle, « l’échange de renseignements de nature fiscale entre les administrations fiscales des autres Etats membres du Forum, fondé sur le principe de réciprocité et d’intérêts légitimes, s’inscrit dans le cadre des efforts visant à renforcer la capacité et l’efficacité des autorités fiscales en matière de lutte contre la fraude et l’évasion fiscales nationales et transfrontalières, en particulier la répression de la manipulation des prix de transfert entre les entreprises et les entités liées par l’utilisation inappropriée des conventions fiscales ».

« Par conséquent, l’échange de données à caractère fiscale par l’administration fiscale ne constitue, en aucun cas, une atteinte à la vie privée des citoyens et, encore moins, à la vie privée protégée par la Constitution, dès lors qu’il vise à prévenir la fraude et l’évasion fiscales », tranche l’institution.

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