Face à une augmentation inquiétante des accidents de la route durant le premier semestre 2024, l’Algérie se prépare à instaurer un nouveau système pour l’obtention du permis de conduire, avec des réformes prévues pour janvier 2025.
Dans une interview accordée au quotidien El Watan de ce mardi 27 août, Ahmed Naït El Houcine, délégué national à la sécurité routière (DNSR), a détaillé ces mesures visant à renforcer la sécurité sur les routes.
Les chiffres relatifs aux accidents de la route au cours des six premiers mois de 2024 sont alarmants. Selon le délégué national, le pays a enregistré 15 850 accidents, une hausse de 7,67 % par rapport à la même période en 2023. Le nombre de décès a également augmenté de près de 3 %, atteignant 2 222 victimes. Les blessés ne sont pas en reste, avec 21 429 personnes concernées (+6,11 %).
Les jeunes de moins de 29 ans sont les plus touchés, représentant 31,32 % des accidents, mais surtout 42,43 % des décédés et 54,58 % des blessés. De plus, les usagers de cyclomoteurs sont de plus en plus impliqués, ces deux-roues constituant 4,5 % du parc automobile mais représentant 21 % des accidents.
M. Naït El Houcine souligne également la dangerosité des titulaires de permis de moins de cinq ans, impliqués dans 41,55 % des accidents, et met en cause un apprentissage insuffisant et un système de formation défaillant. Fait marquant, les hommes sont bien plus impliqués que les femmes dans les accidents mortels, avec 1 571 hommes décédés en 2024 contre 253 femmes.
« Il faut savoir que les accidents surviennent plus, selon les statistiques, durant la tranche horaire de 18h à minuit, soit durant une fluidité qui favorise un excès de vitesse durant une diminution de visibilité, principale cause des accidents », explique-t-il, et d’ajouter : « Les piétons sont aussi, selon les bilans chiffrés, les usagers les plus vulnérables des zones urbaines. Sur les 403 décès enregistrés cette année dans les zones urbaines, 213 d’entre eux étaient des piétons. »
Quant au classement des wilayas, il constate qu’Oran se positionne à la tête des villes exposées aux accidents, suivie d’Alger et de Chlef. Mais en termes de gravité, c’est surtout Oran et Alger qui ont enregistré un lourd bilan, avec 82 décès chacune.
« Contrairement à la journée de vendredi, placée moins accidentogène, les journées de mercredi et de jeudi comptabilisent plus d’accidents mortels, soit 30-20% de la sinistralité. Et c’est à partir de ce constat que nous pouvons dresser le profit des auteurs des accidents : jeune, motocycle et excès de vitesse », note le délégué national.
Un nouveau système de permis de conduire en 2025
Afin de répondre à ces défis, un nouveau système de formation pour l’obtention du permis de conduire sera mis en place dès janvier 2025. Cette réforme vise à éradiquer les pratiques douteuses qui gangrènent le système actuel, en introduisant notamment une numérisation complète des étapes, de l’inscription à l’auto-école jusqu’à l’obtention du permis.
L’épreuve théorique sera révisée et réalisée via un système multimédia avec des questions sur le code de la route, la signalisation, le secourisme et la mécanique. Les candidats seront évalués avec un temps limité pour répondre. Ce nouveau processus sera d’abord testé dans quatre wilayas pilotes avant sa généralisation.
L’épreuve pratique bénéficiera également d’une modernisation avec l’introduction d’un système numérique d’évaluation. Les moniteurs utiliseront des tablettes pour noter les candidats, et des caméras embarquées dans les véhicules enregistreront les épreuves. Cette approche garantira une traçabilité et limitera les pratiques frauduleuses.
Parallèlement à cette réforme du permis, des projets sont en cours pour améliorer la sécurité sur les routes, notamment un permis à points, qui sera opérationnel d’ici 18 mois, ainsi que l’installation de chronotachygraphes sur les poids lourds pour surveiller la vitesse et le temps de conduite.
L’importance des campagnes de sensibilisation n’est pas sous-estimée. Selon M. Naït El Houcine, les efforts de sensibilisation menés depuis juillet 2024 ont permis de réduire les accidents mortels, une baisse notable ayant été observée pour la première fois durant cette période estivale habituellement accidentogène. Une nouvelle campagne est prévue lors de la rentrée scolaire 2024, avec un accent particulier sur l’éducation routière des jeunes à travers des partenariats avec le ministère de l’Éducation.
Une stratégie nationale de sécurité routière pour la période 2025-2028 sera présentée en fin d’année. Ce plan global impliquera plusieurs secteurs et sera axé sur la formation, l’actualisation de la signalisation routière, et la collecte de données entre les différents services concernés. Des évaluations régulières permettront d’ajuster les actions et de mesurer leur impact. L’objectif : inverser la tendance alarmante des accidents de la route en Algérie.