L’industrie pétrolière mondiale, réunie à Istanbul, a mis en avant lundi sa nécessaire adaptation à la transition énergétique, tout en défendant les hydrocarbures, seuls capables, selon elle, d’alimenter la croissance économique et démographique mondiale, notamment des pays émergents.
La transition vers un monde moins émetteur de gaz à effet de serre ne se présentera pas sous la forme d' »une solution » mais « impliquera différents parcours », en fonction des besoins de chaque pays, a affirmé Ben van Beurden, le PDG de Shell, lors de la première journée du Congrès mondial du pétrole.
Ces propos du patron de la major pétrolière anglo-néerlandaise résument le message que les acteurs mondiaux des hydrocarbures sont venus porter, alors que des experts et ONG environnementales estiment qu’il faudra laisser dans le sous-sol une grande partie des réserves d’hydrocarbures pour lutter contre le réchauffement climatique. « La hausse de la demande pour toutes les sources d’énergie, avec le pétrole et le gaz au coeur du mix-énergétique, sera une réalité pour encore des décennies », a ainsi estimé Amin H. Nasser, président de la compagnie saoudienne Saudi Aramco.
Le pétrole reste la première énergie consommée dans le monde, notamment du fait de sa domination comme carburant.
Dans de nombreux pays, et malgré la chute des prix de l’or noir ces deux dernières années, les énergies renouvelables, notamment le solaire, sont toutefois devenues au moins aussi peu chères que le gaz ou le charbon. « Les énergies renouvelables n’ont cessé de dépasser toutes les prévisions », a reconnu Juan Vera, directeur des opérations de la compagnie espagnole Cepsa.
Les industriels, comme les pays producteurs, ont d’ailleurs pris conscience de cette nouvelle réalité économique, investissant eux aussi dans le solaire, comme le français Total ou certains pays du Moyen-Orient, ou dans l’éolien, comme le norvégien Statoil.
Dans l’énergie, « la croissance la plus rapide viendra des énergies renouvelables », admet Alexandre Novak, le ministre russe de l’Energie, mais il met en garde contre les tentations de « discrimination » entre les énergies.
Le secteur pétrolier a intégré les attentes dans les pays développés, ou encore en Chine, pour une transition vers un modèle économique moins émetteur de gaz à effet de serre. Des attentes accentuées par l’accord international de Paris sur le climat et d’un certain désengagement financier et industriel du charbon.
Outre le développement des énergies renouvelables, les normes se renforcent en faveur d’une plus grande efficacité énergétique dans l’industrie ou le bâtiment et les véhicules électriques se vendent de plus en plus.
« Trop souvent, la transition énergétique est considérée du point de vue des Européens ou des Nord-Américains (…) mais la réalité démographique montre que ce n’est pas suffisant de se concentrer sur ces régions », a estimé le patron de Shell, citant l’Afrique et l’Asie qui vont concentrer la majeure partie des 3,6 milliards d’habitants supplémentaires attendus sur la planète d’ici la fin du siècle.
« Ces pays en croissance auront encore besoin d’hydrocarbures pour développer leurs industries », a-t-il ajouté. D’autant que certains, comme la sidérurgie, le ciment ou la chimie, ne peuvent pas se passer de la quantité d’énergie que produisent les hydrocarbures, selon lui.
Toutefois, face aux critiques sur les émissions de gaz à effet de serre issues de l’exploitation des hydrocarbures, les industriels avancent des « progrès technologiques » pour réduire leurs impacts, via la capture et le stockage du CO2, pourtant encore loin d’avoir trouvé son équilibre économique, ou les biocarburants, a énuméré Darren W. Woods, le PDG d’ExxonMobil.
Mais, selon Amin Nasser, il faut lutter contre « la croyance croissante que le monde peut prématurément se passer de ressources fiables et prouvées comme le pétrole et le gaz ».
Afp