Les élections législatives 2017 se sont déroulées dans un contexte politique et socio-économique difficile. Baisse des recettes pétrolières et amenuisement des réserves de change, effondrement du pouvoir d’achat et absence de véritables réformes structurelles. Le contexte géopolitique n’est pas en reste. Il affecte grandement le climat dans lequel baigne le pays.
Le taux de participation national aux élections législatives du 4 mai 2017 a atteint 38.25% soit 8.528.355 votants des 23.251.503 inscrits, soit plus de 14723148 d’abstentionnistes, un nombre effarant en augmentation exponentielle par rapport à 2012, qui dénote de la fracture entre gouvernants et gouvernés. Un ras-le bol de ces derniers qui ne veulent pas participer à un jeu, aux règles viciées et aux manœuvres peu orthodoxes. Un coup de grâce pour la représentativité et la légitimité politique.
Le fait marquant est le peu d’engouement de la part des Algériens et notamment une grande partie des jeunes qui ont marqué par leur abstention leur rupture avec la classe politique. Celle de la vielle garde qui se revendique de la légitimité historique et celle opportuniste qui l’a ralliée. Même cette alliance de partis islamistes, tendance frères musulmans, (MSP et Front du changement) prompte à dégainer le discours religieux en prétendant l’opposition s’est faite grillée aux yeux de ses partisans et de ses électeurs habituels, même si avec 33 sièges au compteur, elle se positionne comme la 3éme force de la Chambre basse.
On se souviendra du lâchage des alliés (TAJ), Al-Islah et Ennahdha) avec lesquels, ils avaient formé en 2012, l’Alliance de l’Algérie verte (AAV) et la fragmentation de leur camp. Le score obtenu est loin d’être une prouesse, de leur propre aveu.
Les résultats du scrutin confirment ce désaveu populaire, l’hypocrisie en barbe et en voile a récolté ce qu’elle a semé. Elle va devoir composer avec la majorité parlementaire pour reprendre ce qu’elle a perdu en feignant la fronde, en droits et en privilèges au sein d’une coalition gouvernementale. Il suffit d’entendre une « fetwa » qui autorise les retournements de vestes de l’ancien chef du parti de feu Nahnah pour comprendre que tous les moyens sont bons pour accéder au pouvoir car la fin les justifie même si la morale les bannit.
L’atomisation des partis islamistes confirme également le faible poids de cette obédience sur l’échiquier politique. Les cris d’orfraie de son chef de file qui s’alarme de la fraude et qui charge les boycotteurs sur les réseaux sociaux, n’y changeront rien. L’ampleur de l’abstention estimée à plus de 60% l’atteste. Même les bulletins blancs le confirment. Cependant ce mouvement en dépit de l’amertume de sa relégation ne l’empêchera pas de rentrer dans un gouvernement élargi même en étant fragilisé.
Quant aux partis démocrates, ils ont essuyé une débâcle sans précédent. Leur discours récurrent qui n’a pas été « relooké » depuis des décennies et qui ne fait plus recette, a eu raison de leurs chances de contrebalancer la donne. La population d’électeurs a changé. Elle rajeunit et découvre de nouvelles préoccupations mais les vielles mentalités du personnel politique restent les mêmes.
La campagne électorale calamiteuse durant laquelle les partis politiques se sont adonnés à des pratiques aux ras des pâquerettes a eu raison du peu de crédit accordé à la classe politique. Les erreurs de casting et la piètre qualité des candidats qui doivent représenter le peuple au parlement étaient flagrantes.
La médiocrité d’un marketing politique bas de gamme, les discours farfelus, sans relief et sans teneur, une rhétorique puisée dans les années de plomb, des promesses frisant le ridicule, l’absence de débat national, de personnalités charismatiques avec un aplomb de leaders et surtout le déni de vérité ont fait qu’aujourd’hui le changement demeure dans les limbes et le statuquo encore une fois cautionné et entériné à la faveur des résultats du scrutin qui donnent les deux partis au pouvoir, FLN et RND vainqueurs avec 261 des sièges. Le nouveau gouvernement sortira donc de leur giron.
Le renouvellement de l’APN n’a pas eu lieu. La configuration de cette institution reste globalement la même et ce pour cinq ans en attendant 2019 qui devra sceller la succession du président Bouteflika. Les dés sont ainsi jetés et les prochaines joutes se dérouleront entre ces deux acteurs car en dépit de leur proximité, ils restent divergents sur beaucoup de dossiers et d’ici-là, dans l’arène, le duel ne sera certainement pas chevaleresque mais soumis aux intrigues de coulisses à moins qu’un nouveau rival sorte du chapeau.