Thaïlande, Indonésie, Malaisie, Vietnam: au-delà du géant chinois, les constructeurs automobiles sont en quête de relais pour leur future croissance en Asie, mais celle-ci sera plus difficile à obtenir, préviennent des experts au salon de l’Auto de Shanghai.
Le décollage de la Chine s’est accompagné d’un quadruplement des ventes automobiles de 2007 à 2016, à 24 millions d’unités. Mais elles pourraient désormais progresser à un rythme moins endiablé.
Plus modeste en volume, avec 2,1 millions d’automobiles particulières écoulées l’année dernière, l’ASEAN (Indonésie, Malaisie, Philippines, Thaïlande, Vietnam…) n’en a pas moins vu son marché doubler en dix ans. La production de la zone est quant à elle de 4 millions de véhicules légers, incluant les utilitaires.
« L’ASEAN, ça fait à peu près la moitié de la Chine » en population, remarque le président du directoire de PSA, Carlos Tavares. « C’est un marché qui est fermé, les taxes à l’importation sont très élevées », rendant nécessaire de produire sur place, précise-t-il.
« Il y a un enjeu à aller chercher la croissance où elle se situe: des pays encore assez peu équipés et qui sont en phase de croissance ou d’accélération, en train de s’ouvrir », résume Marc Boilard, spécialiste du secteur au cabinet Oliver Wyman.
Ainsi du Vietnam, pays de plus de 90 millions d’âmes, où le taux de motorisation est de moins de 30 véhicules pour 1.000 habitants, contre 120 en Chine, 600 en Europe et 800 aux Etats-Unis.
PSA a récemment annoncé un renforcement de son partenariat industriel sur place pour y viser 5% du marché. Celui-ci a atteint 158.000 automobiles particulières en 2016 (+36% en un an).
Autre pays courtisé par PSA, dont les ventes en Chine ont périclité l’année dernière (-16%), la Malaisie: le Français est candidat à un partenariat stratégique avec le constructeur en difficulté Proton, ce qui lui permettrait de s’enraciner dans un pays qui absorbe actuellement un demi-million de voitures par an, à peu près autant qu’il en produit.
Les deux plus gros pays producteurs de la région sont l’Indonésie (près d’un million de voitures en 2016) et la Thaïlande (805.000 unités) où Ford, entre autres, possède une usine depuis 2012.
En comptant les utilitaires, l’Indonésie « a produit 1,2 million de véhicules et en 2023, ça sera 1,9 million », prédit François Jaumain, de PwC Autofacts. Dans le même temps, la Thaïlande passera de 1,9 million à plus de 3 millions mais « le seul bémol quand même, c’est que ces marchés sont trustés par les Japonais depuis très longtemps », prévient-il.
Ford, par exemple, s’est cassé les dents sur le marché indonésien sous hégémonie nippone, quittant carrément le pays. « Bien qu’il s’agisse d’un marché relativement gros et en croissance, nous ne voyions pas comment y réussir », résume le patron de Ford en Chine, David Schoch.
Renault avait évoqué en 2013 la construction d’une usine dans ce pays, qui ne s’est pas concrétisée, et se concentre en priorité sur son développement en Chine, selon le dirigeant du groupe en Asie, François Provost.
Les pays de l’ASEAN « sont aussi des bassins de main-d’oeuvre et de production encore plus +low-cost+ que la Chine », note Sébastien Amichi, du cabinet de conseil Roland Berger. « Les premiers à s’y intéresser sont plutôt les équipementiers, pour des pièces simples, mais on peut imaginer que des capacités d’assemblage s’y déplacent ».
Cependant, « cela fait longtemps que l’on parle des +nouveaux dragons+, qui ont du mal à décoller (…) Quand on regroupe l’ensemble de ces pays, ça fait un bassin qui peut être un bon relais de croissance si effectivement les développements d’infrastructures et de réseaux bancaires se mettent en place », observe-t-il.
A plus long terme, un autre pays pourrait devenir un débouché, la Birmanie, qui s’ouvre peu à peu mais où le marché du neuf est microscopique: 3.000 véhicules par an selon PwC, pour 54 millions d’habitants, et un taux de motorisation de 7 pour 1.000. « Beaucoup d’industriels s’y ruent. Ca ne va peut-être pas se faire en un an, mais à moyen terme il y a un vrai réservoir de croissance », estime M. Boilard.
AFP