De moins en moins d’enfants et de plus en plus de personnes âgées : la Chine a décidé lundi de supprimer la limite de deux enfants par couple, avec l’espoir de faire repartir la natalité dans le pays le plus peuplé du monde.
Trois semaines après les résultats de son dernier recensement décennal, qui a révélé un fort ralentissement de la croissance de sa population, Pékin s’est résolu à libéraliser sa politique familiale, mais tout en maintenant une limite : pas plus de trois enfants par couple. « En réponse au vieillissement de la population (…), un couple est autorisé à avoir trois enfants », a annoncé l’agence Chine nouvelle, citant les conclusions d’une réunion du bureau politique du Parti communiste dirigée par le président Xi Jinping.
Cette politique doit s’accompagner de « mesures de soutien » aux familles, a ajouté l’agence de presse officielle, évoquant sans plus de détails les congés maternité, les soins pédiatriques et une baisse des coûts de l’éducation.
Sur les réseaux sociaux, ces annonces du pouvoir étaient accueillies fraîchement. « Pour la génération des milléniaux, chaque couple va donc devoir s’occuper de quatre grands-parents et de trois enfants. Le pays prévoit-il d’en faire des héros nationaux ? », persiflait un internaute sur le réseau Weibo, s’attirant 3.000 « J’aime ».
Début mai, les résultats du recensement réalisé en 2020 ont révélé un vieillissement plus rapide que prévu de la population chinoise.
L’année dernière, marquée par l’épidémie de Covid, le nombre des naissances est tombé à 12 millions, contre 14,65 millions en 2019. Cette année-là, le taux de natalité (10,48 pour 1.000) était déjà au plus bas depuis la fondation de la Chine communiste en 1949.
Après plus de trois décennies de « politique de l’enfant unique », très décriée à l’époque, la Chine a assoupli ses règles en 2016, autorisant tous les Chinois à avoir un deuxième enfant. Mais sans parvenir à faire repartir la natalité.
Les raisons de la baisse des naissances sont multiples : recul du nombre des mariages, hausse du coût des logements et de l’éducation, fertilité plus tardive pour les femmes qui privilégient davantage leur carrière, excès du nombre d’hommes par rapport aux femmes du fait de la préférence traditionnelle pour les enfants mâles… « Personnellement, je ne veux pas d’enfants, même pas un seul », résume pour l’AFP une femme de 27 ans de la province du Zhejiang (est), qui utilise son seul prénom anglais, Wendy. « Et parmi mes amies, pratiquement personne ne veut avoir d’enfant ».
A l’autre bout de la pyramide des âges, la Chine comptait l’an dernier plus de 264 millions de personnes âgées de 60 ans et plus, soit quatre fois la population totale de la France.
Cette classe d’âge constitue désormais 18,7% du total, soit une hausse de 5,44 point de pourcentage par rapport au recensement de 2010. A l’inverse, la population d’âge actif (15 à 59 ans) ne représente plus que 63,35% du total, en repli de 6,79 points sur 10 ans.
En mars, le Parlement a voté un projet de relèvement progressif de l’âge de départ à la retraite au cours des cinq prochaines années, au grand dam d’une bonne partie de l’opinion publique. Les détails de cette politique n’ont pas été révélés.
Des démographes ont mis le pays en garde contre une évolution à la japonaise ou à la sud-coréenne, avec une baisse de la population et un excès de personnes âgées par rapport aux jeunes et aux actifs. En réaction, des voix se sont élevées ces dernières années pour abolir toute limite au nombre d’enfants par famille, mais le régime communiste s’est refusé à lever tout contrôle dans ce domaine, préférant maintenir une limite de trois enfants.
Pour Ye Liu, spécialiste en développement international au King’s College de Londres, la nouvelle politique a « peu de chances de faire remonter considérablement le taux de natalité ». « Le pouvoir met la responsabilité du vieillissement de la population sur les familles sans engagements financiers concrets », a-t-elle déclaré à l’AFP.
Afp