La Chine, premier émetteur mondial de gaz à effet de serre, projette de dépenser des centaines de milliards d’euros dans des centrales à charbon dont elle n’a aucun besoin, dénonce lundi une association écologiste.
Le géant asiatique pourrait dépenser 460 milliards d’euros dans des centrales à charbon qui resteront inemployées, estime un rapport de Carbon Tracker Initiative, une organisation analysant les conséquences financières du changement climatique.
En juillet, les capacités des centrales à charbon existantes s’élevaient en Chine à 895 gigawatts (GW), mais ces 2.689 sites « ne sont utilisés que la moitié du temps », avertit le rapport. Et pourtant, les constructions de centrales à charbon se poursuivent à vive allure –au rythme de deux nouveaux chantiers par semaine pour la seule année 2015. Des infrastructures dont raffolent les gouvernements locaux.
Les centrales déjà en construction ajouteraient des capacités de 205 GW au parc existant et des projets additionnels existent même pour d’autres centrales totalisant 405 GW supplémentaires. Pour l’ONG londonienne, il s’agit « d’une mauvaise allocation du capital, d’une ampleur jamais vue auparavant ». Un précédent rapport de Greenpeace faisait état en juillet de 300 GW de capacités excédentaires dans les centrales à charbon.
« Pour que ces capacités additionnelles soient justifiées, d’ici à 2020, il faudrait que la production d’énergie grimpe d’au moins 4% par an et que les centrales fonctionnent à 45% de leurs capacités », souligne Carbon Tracker Initiative.
Or, la trajectoire de la deuxième économie mondiale suggère l’inverse: sa consommation énergétique ne progresse plus que de 3% par an, contre 10% il y a quelques années.
Le charbon, dont la Chine est le premier consommateur mondial, reste un indispensable carburant de son économie, fournissant 60% de son électricité. La consommation du pays a d’ailleurs doublé sur la décennie 2004-2014, jusqu’à dépasser 4 milliards de tonnes par an.
Mais le net ralentissement de la croissance économique, au plus bas depuis un quart de siècle, change la donne. Surtout, le régime a engagé un délicat rééquilibrage en faveur des services et nouvelles technologies, au détriment d’industries lourdes peu rentables. Autant de facteurs qui modèrent la demande énergétique.
Le volume de charbon que brûle la Chine ne progresse plus qu’au ralenti et la production d’électricité à partir du charbon pourrait dégringoler de 8% entre 2015 et 2020, selon Carbon Tracker.
Enfin, le 13e plan quinquennal (2015-2020) du régime communiste fait la part belle au développement des énergies renouvelables: en 2015, la Chine aura fabriqué en moyenne chaque heure l’équivalent en surface d’un terrain de football en panneaux solaires –et une éolienne.
La Chine a promis de réduire de 250 millions de tonnes cette année ses capacités de production de charbon –objectif déjà annoncé comme atteint– et d’abaisser à 62,6% en 2016 la part du charbon dans son mix énergétique. Le pays entend également moderniser d’ici 2020 ses centrales au charbon pour diminuer de 60% les émissions des « principaux éléments polluants » et s’est engagé à stabiliser ses émissions de CO2 « autour de 2030 ».
Dans ces conditions, « la Chine n’a plus besoin de centrales à charbon supplémentaires (…) Cette mauvaise allocation d’investissements est symptomatique d’écueils structurels », insiste l’ONG.
Les grands groupes miniers, majoritairement publics, se débattent avec de sévères surcapacités mais continuent de survivre grâce au soutien financier de l’Etat –en particulier des gouvernements locaux, soucieux de préserver l’emploi
AFP