« Une Constitution en déphasage avec la réalité politique de l’Algérie ». C’est en ces termes que la spécialiste en droit constitutionnel, Mme Fatiha Benabbou, a commenté le projet de révision de la Constitution, adopté aujourd’hui par l’APN.
Elle trouve le texte du projet « obèse » et bourré de dispositions d’ordre législatif et réglementaire. Mme Fatiha Benabbou a estimé que l’article 103 dudit projet « égratigne mes connaissances en droit constitutionnel », a-t-elle dit dans une déclaration faite au journal El Watan du jeudi 10 septembre.
Ledit article prévoit : « Le gouvernement est dirigé par un Premier ministre lorsqu’il résulte des élections législatives une majorité présidentielle. Et il est dirigé par un chef du gouvernement lorsqu’il résulte des élections législatives une majorité parlementaire. »
A ce propos, la constitutionnaliste a expliqué : « Dans la théorie constitutionnelle, il n’existe pas de différence entre le Premier ministre et le chef du gouvernement. En théorie, tous les Premiers ministres sont des chefs du gouvernement, hormis quelques cas observés dans certains pays africains. En outre, il est à souligner que la notion de majorité n’a pas sa place dans une Constitution. Une majorité est un fait politique, ce n’est pas une institution qui se décrète et qu’on trouve dans une Constitution. Cela relève de la vie politique et non pas de la Constitution. Il est aberrant, à mes yeux, de constitutionnaliser une pratique politique. »
Selon Mme Benabbou, « la présomption de l’existence d’une majorité parlementaire est irréaliste en Algérie ». « Cela n’a été mis en place nulle part ailleurs et ne répond pas à la réalité de la politique algérienne. Il faut savoir que le champ politique est complètement ravagé. Avec 70 partis politiques, nous avons eu quelques tentatives de coalition, à l’exemple de l’alliance verte, qui n’a pas tenu à cause de l’esprit zaïmiste de ses leaders, ou de l’alliance présidentielle qui était surfaite, mais un schéma tel que décrit par les auteurs du texte est difficilement applicable, car il n’y a pas de forces politiques majeures », a-t-elle encore expliqué, en ajoutant : « De plus, un Premier ministre ayant un programme politique différent de celui du chef de l’Etat est une éventualité qui n’existe pas dans la réalité algérienne ».