La pâte à tartiner aux noisettes de la marque algérienne El Mordjene continue de se développer, malgré son interdiction en France et dans plusieurs pays européens. Selon Bloomberg, la production a été fortement revue à la hausse un peu plus d’un an après l’intérêt suscité sur les réseaux sociaux.
Avant le « buzz » sur les réseaux sociaux, la production quotidienne était de 8 tonnes. Elle atteint désormais 80 tonnes, selon le fabricant, qui explique aussi être passé de 300 à 700 employés. La pâte à tartiner a été lancée en 2021 par l’entreprise algérienne Cebon, basée à Tipaza, et a gagné en visibilité durant l’été 2024 grâce à des vidéos sur TikTok et au retour de vacances de la diaspora.
Le produit, vendu uniquement chez des épiceries et des grossistes, a rapidement circulé en France et au Canada. Les ventes ont augmenté et des ruptures de stock ont été signalées dans plusieurs points de vente. Mais les importations vers l’Europe, particulièrement vers la France, ont été stoppées en septembre de la même année, car le produit ne répondait pas aux règles européennes concernant les marchandises contenant des produits laitiers. Pour l’instant, El Mordjene n’est pas distribué dans les magasins français.
Le directeur commercial et porte-parole de Cebon, Amine Ouzlifi, voit d’autres motivations à cette interdiction, intervenue dans un contexte de tensions politiques entre l’Algérie et la France. « C’était une décision politique et une injustice », a déclaré Amine Ouzlifi à Bloomberg. « Il y avait beaucoup de solidarité de la part des consommateurs », a-t-il dit. « Les Algériens étaient fiers d’avoir, sur le marché français, un produit fabriqué en Algérie qui était meilleur en texture et en goût que ceux vendus localement », a-t-il ajouté.
L’entreprise espère également que l’amélioration des relations entre l’Algérie et la France permettra un retour futur sur le marché européen, selon l’agence américaine, qui souligne que l’interdiction n’a toutefois pas empêché l’entreprise d’étendre sa présence dans d’autres régions. Cebon affirme que cette notoriété nouvelle a facilité l’accès à des marchés au Moyen-Orient. Avant l’été 2024, 10% de la production étaient déjà destinés aux pays du Golfe.
Lors du pic de demande, « en une semaine, tout notre stock a disparu » au moment du « buzz » sur les réseaux sociaux, a expliqué Amine Ouzlifi, auprès de Bloomberg. Il a ajouté : « Tout le monde en consommait en même temps. Tout le monde en cherchait. Tout le monde était curieux ». Pour suivre le rythme, Cebon a renforcé son organisation en ajoutant une troisième équipe de production et en agrandissant ses deux usines en Algérie. Au total, 40.000 mètres carrés sont désormais consacrés à la fabrication de la pâte à tartiner.
L’entreprise fait cependant face à une hausse du prix des noisettes. Les approvisionnements proviennent de Turquie, le plus grand producteur mondial, où les prix ont augmenté après des événements climatiques ayant touché les récoltes. « Nous avons donc été contraints d’augmenter nos prix de près de 15% », a déclaré le porte-parole.
Un pot 700 grammes de crème noisette-une tartine blanche- se vend actuellement à 970 dinars (environ 7,5 dollars) tandis que la noisette au cacao, une tartine brune, se vend à 890 dinars, note Bloomberg, et d’ajouter : « Ces prix en font presque un produit de luxe pour beaucoup en Algérie. Malgré tout, la demande intérieure pour El Mordjene-nommé d’après le corail marin utilisé dans les bijoux traditionnels algériens-reste élevée. »
L’agence rappelle que Cebon appartient aux frères Youcef et Korichi Foura. Ces deux ingénieurs discrets ont créé leur entreprise en 1997, dans un garage loué à Bousmail, une petite ville côtière à l’ouest d’Alger. Leur premier produit était du miel, préparé dans une marmite sur un réchaud à gaz. Ils ont commencé à fabriquer la pâte à tartiner El Mordjene en 2021.
