La Banque mondiale vient de publier un nouveau rapport de suivi de la situation de l’économie algérienne. Le rapport est intitulé : « Investir dans les données pour une croissance diversifiée. Selon le rapport de la Banque mondiale, en 2024 « la croissance du PIB resterait vigoureuse, malgré la réduction des quotas de l’Opep et une production agricole limitée ».
« La croissance devrait rester robuste en 2024, portée par le dynamisme continu du secteur hors hydrocarbures. Dans le scénario de référence, la croissance globale devrait s’établir à 2,9%, soutenue par la croissance non extractive, projetée à 3,4%, tandis que le secteur extractif devrait se contracter de 0,5% », indique le rapport de la Banque mondiale.
La même source souligne : « La consommation privée resterait dynamique alors que les salaires et les transferts publics continueraient d’augmenter, ce qui stimulerait le secteur des services, en particulier dans les secteurs fournissant les ménages. La croissance de l’investissement ralentirait à mesure que les dépenses publiques d’investissement seraient consolidées, tel qu’anticipé dans le cadre budgétaire à moyen terme du gouvernement, ce qui serait partiellement compensé par le dynamisme de l’investissement privé. »
« Cela entraînerait un ralentissement de la croissance de la production industrielle mais ralentirait également la croissance des importations. La contribution globale des exportations nettes resterait négative, la croissance des importations ralentissant mais les exportations d’hydrocarbures se contractant également. D’après les premières données météorologiques et de croissance des cultures, la production agricole devrait rester limitée en 2024 », selon le même rapport.
« La croissance repartirait à la hausse en 2025 et 2026 »
Selon la Banque mondiale : « La croissance repartirait à la hausse en 2025 et 2026 avec la reprise des quotas de production pétrolière et de la production agricole. » « L’investissement et la production industrielle continueraient de ralentir quelque peu en 2025 et 2026 à mesure que la consolidation de l’investissement public se poursuivrait, même si l’investissement privé reste dynamique. »
« Le secteur tertiaire resterait dynamique en 2025 et ralentirait légèrement avec la consommation privée en 2026. La production agricole devrait se redresser après les épisodes de sécheresse successifs, ce qui contribuerait à une croissance plus rapide en 2025 », prévoit la Banque mondiale.
Selon le même rapport : « La production de gaz naturel augmenterait modérément, les nouveaux projets d’exploitation des gisements compensant le déclin des champs existants, et l’assouplissement des quotas de production de pétrole brut de l’OPEP permettrait une reprise de la production de produits pétroliers. »
« Les plans d’investissement substantiels de la Sonatrach visant à moderniser les opérations pétrolières et gazières en amont, à adopter des innovations technologiques et à stimuler les industries pétrochimiques, y compris la production de plastiques et d’engrais, améliorent également les perspectives de croissance à moyen terme », indique la même soure.
Les soldes extérieurs et budgétaires seront de nouveau sous pression
« Le compte courant devrait passer sous l’équilibre en 2024 et les réserves se stabiliser. Dans le scénario de référence, les prix des hydrocarbures et les volumes d’exportation diminuent en 2024, tandis que les importations continuent de croître à un rythme décroissant, l’investissement et la consommation privés restant dynamiques, et la faiblesse de la production agricole maintenant la demande de céréales importées à un niveau élevé », indique la Banque mondiale.
Et d’ajouter : « Les exportations d’hydrocarbures se redresseraient en 2025 et se stabiliseraient en 2026, mais les importations augmenteraient plus rapidement, creusant le déficit du compte courant. Les réserves de change se stabiliseraient et resteraient à un niveau confortable, avant de diminuer, passant d’un pic de 16,1 mois d’importations en 2023 à 8,4 mois d’importations d’ici 2026 dans le scénario de référence. »
« Le déficit budgétaire augmenterait en 2024, avant un certain degré de consolidation budgétaire en 2025 et 2026 », prévoit l’institution financiere internationale, qui ajoute : « Les recettes budgétaires d’hydrocarbures diminueraient encore, surcompensant l’augmentation des recettes fiscales. Du côté des dépenses, la hausse des dépenses courantes entraînée par la dernière vague d’augmentations salariales contrasterait avec une consolidation des dépenses d’investissement, stabilisant les dépenses globales en 2024. »
« En 2025 et 2026, la poursuite de l’assainissement des dépenses d’investissement entraînerait une légère diminution des dépenses. Avec la diminution de l’épargne pétrolière, l’augmentation continue du déficit se traduirait de plus en plus par une augmentation de la dette, qui dépasserait les 55% d’ici 2026 », souligne la Banque mondiale.
Selon la même source : « La structure de la dette souveraine de l’Algérie reste toutefois confortable, car elle est presque entièrement détenue et libellée sur le marché intérieur, à des échéances à long terme et à des taux d’intérêt réels négatifs. Ce dernier point implique cependant un transfert notable de ressources des épargnants nationaux vers l’État. »
Les prix des hydrocarbures dans un contexte d’incertitude géopolitique posent des risques importants
« Les prix des hydrocarbures restent le principal risque pesant sur les équilibres budgétaires et extérieurs, les besoins de financement prévisionnels soulignant l’importance d’un rééquilibrage budgétaire progressif. Les prix du pétrole se sont stabilisés à 83,6 dollars en 2023 et les exportations d’hydrocarbures de l’Algérie sont restées stables tout au long de l’année », souligne la Banque mondiale.
Et d’ajouer : « D’autre part, « les importations se sont redressées, creusant le déficit de la balance courante hors hydrocarbures et rendant les soldes extérieurs plus sensibles aux variations des prix mondiaux du pétrole. De même, la forte augmentation des dépenses publiques en 2023 et 2024, concentrée sur des dépenses rigides telles que les salaires, a creusé le déficit budgétaire hors hydrocarbures et accru la sensibilité des soldes budgétaires aux prix mondiaux du pétrole. »
« Par conséquent, ces prix représentent des risques importants, à la hausse comme à la baisse, pour les perspectives macroéconomiques algériennes, en particulier dans un environnement d’incertitude géopolitique accrue. Les évolutions du conflit au Moyen-Orient, des quotas de l’OPEP et de la demande mondiale en particulier pèsent sur les prix mondiaux du pétrole. Si les réserves de change de l’Algérie restent confortables, les besoins anticipés de financement budgétaire appellent des politiques de dépenses publiques prudentes et un rééquilibrage budgétaire progressif’, explique la même source.
« Comme il est peu probable que l’investissement public redevienne le moteur de la croissance économique, l’accélération des investissements du secteur privé hors hydrocarbures reste une priorité. Les risques associés aux prix mondiaux des hydrocarbures soulignent l’importance de soutenir la diversification en accélérant les investissements du secteur privé dans les secteurs autres que les hydrocarbures et, parallèlement, de renforcer le cadre de politique macroéconomique en augmentant les sources d’exportation et les recettes budgétaires hors hydrocarbures », lit-on dans le rapport.
Selon le document : « La loi régissant les hydrocarbures de 2019, la loi relative à l’investissement 2022, la loi monétaire et bancaire de 2023, l’adhésion formelle à la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf), la loi portant sur le foncier économique de 2023 et le lancement de réformes des banques publiques visent tous à stimuler l’investissement et à améliorer la diversification. Le renforcement de ces efforts, notamment en s’assurant que ces mesures contribuent effectivement à stimuler l’environnement des affaires, est d’autant plus important que l’investissement public, auparavant moteur de la croissance de l’Algérie, est de plus en plus limité par des dépenses courantes rigides et en expansion rapide. »
L’amélioration des systèmes de données soutiendrait l’investissement et l’élaboration des politiques
« La poursuite de l’amélioration des systèmes de données soutiendrait l’investissement et l’élaboration des politiques. Les sources alternatives de données utilisées dans le présent rapport, telles les données satellites sur le développement des cultures ou l’éclairage nocturne, représentent un complément utile aux statistiques économiques et sociales usuelles », estime la Banque mondiale.
Et d’ajouter : « En 2023 et 2024, les efforts de numérisation dans l’administration algérienne ont été renforcés, tout comme certaines publications de la Banque d’Algérie et de l’ONS, avec notamment le premier rebasage du PIB. Néanmoins, l’amélioration de la disponibilité, de la granularité et de l’actualité des données économiques officielles, notamment en ce qui concerne l’activité, l’investissement et le marché du travail, reste de la plus haute importance. »
« Des systèmes de données améliorés soutiendraient le passage vers une budgétisation axée sur les résultats et l’élaboration de politiques fondées sur des données probantes. Cela fournirait également des données économiques précises et exhaustives aux chercheurs et analystes, aux investisseurs nationaux et internationaux potentiels, ce qui atténuerait l’incertitude économique et favoriserait l’investissement », indique la même source.
En 2023, la croissance de l’Algérie a été robuste et l’inflation a commencé à décélérer
Pour 2023, la Banque mondiale a noté que la croissance de l’Algérie a été robuste et l’inflation a commencé à décélérer. « La croissance du PIB s’est accélérée pour atteindre 4,1%, soutenue par celle du secteur des hydrocarbures, la production de gaz naturel ayant compensé les réductions successives des quotas de production de pétrole brut », indique le rapport, qui ajoute : « La croissance du PIB hors industries extractives a atteint 3,7%, la croissance de l’investissement s’étant accélérée, soutenue par une reprise marquée de l’investissement public, et entraînant une hausse des importations. »
« La consommation privée est restée dynamique, stimulée par la hausse des salaires dans le secteur public et stimulant les secteurs fournissant les ménages », indique la même source, notant que « l’inflation s’est maintenue à 9,3% en 2023 et a ralenti à 5,0% en glissement annuel au premier trimestre 2024, dans un contexte de baisse soutenue des prix des produits alimentaires frais, de dinar fort et de baisse des prix à l’importation. »
Le rapport souligne que « la chute des prix des hydrocarbures à la fin 2022 a réduit l’excédent du compte courant en 2023, creusé le déficit budgétaire, et le ratio dette publique/PIB a augmenté. » « La chute des prix à l’exportation des hydrocarbures et des engrais et la forte augmentation des volumes d’importation ont entraîné une contraction rapide de l’excédent de la balance courante, mais les réserves ont continué d’augmenter, pour atteindre 16,1 mois d’importations à fin 2023 », précise le document.
Et d’ajouter : « Les recettes des hydrocarbures dans le budget se sont néanmoins maintenues mais, compte tenu de la forte augmentation de la masse salariale et des dépenses d’investissement, le déficit budgétaire global s’est creusé, pour atteindre 5,2% du PIB. Le déficit a été principalement financé hors du secteur bancaire, les émissions souveraines diminuant, l’épargne pétrolière augmentant à 8,2% du PIB et la dette publique augmentant légèrement, à 49,2% du PIB. »