L’île de Rachgoun, dans la wilaya d’Aïn Temouchent, a été classée en 2023 comme réserve naturelle sur décision de la wilaya, dans le cadre d’un pas pratique pour la protection de ce site naturel et environnemental important, avec une vision économique eu égard à ses potentialités.
L’île de Rachgoun, qui s’étend sur une superficie de 28,5 hectares, constitue un site naturel unique en son genre, alliant biodiversité écologique et archéologique remontant à la préhistoire, outre sa position stratégique dans le bassin méditerranéen.
Ces atouts ont contribué à faire de cette île l’objet d’un intérêt particulier de la part des autorités de la wilaya pour engager une réflexion sur les mécanismes devant être adoptés pour préserver ses composants naturels et leur valorisation, dans le cadre d’une vision écologique et économique.
Le wali d’Aïn Temouchent, M’hamed Moumen, a souligné que les études supervisées par des experts dans le domaine environnemental et archéologique ont prouvé que cette île est unique en son genre dans le bassin méditerranéen, en raison de ses caractéristiques liées principalement à la diversité environnementale et aux précieux sites archéologiques qu’elle abrite.
A titre indicatif, le phare historique de l’île de Rachgoun est le deuxième du genre dans le bassin méditerranéen, après celui de Tunisie.
Sur la base de toutes ses caractéristiques et sur décision de la wilaya, l’île de Rachgoun a été classée en 2023 comme réserve naturelle.
Cette étape s’accompagne d’une perspective future sur la modalité de sa gestion, sachant que l’Assemblée populaire de la wilaya (APW) a approuvé, lors de la dernière session, un projet de création d’une unité de gestion de cette réserve, afin de réaliser un bond qualitatif dans la promotion des composantes touristiques de l’île, a expliqué le même responsable.
M. Moumen a, en outre, souligné que « des travaux sont actuellement en cours, en coordination avec un certain nombre d’opérateurs du secteur du Tourisme, pour développer de nouveaux circuits touristiques dans la wilaya, visant une exploitation optimale des atouts et possibilités dont dispose la wilaya par la promotion de ces destinations touristiques, tout en veillant à mettre en place tous les mécanismes susceptibles de protéger les sites archéologiques de la wilaya et veiller à préserver la biodiversité de certaines zones, à l’instar de l’île de Rachgoun.
Une diversité écologique distinguée, avec plus de 500 espèces animales et végétales
Par ailleurs, le directeur du bureau d’études, qui supervise le projet de classement de l’île de Rachgoun, Mouloud Benabdi, a souligné que ce projet a été adopté par le ministère de l’Environnement et des Energies renouvelables, avec le suivi de la direction du secteur de la wilaya.
Il a ajouté que l’étude a été couronnée par la promulgation d’une décision de wilaya, classant l’île de Rachgoun et ses environs comme réserve naturelle sur une superficie de 70,15 km2 répartie sur trois zones (centrale, intermédiaire et transit).
L’île est l’un des trésors environnementaux marins et côtiers les plus importants du pays et comprend 593 espèces de faune et de flore, dont 71 espèces menacées d’extinction inscrites parmi les espèces protégées, « ce qui représente un grand nombre », a indiqué M. Benabdi.
En effet, « selon les normes de protection en vigueur, si une espèce est classée, la zone dans son ensemble doit être classée », a-t-il souligné.
La protection de l’île de Rachgoun revêt également une importance dans le bassin méditerranéen, car des animaux, qui ont disparu dans certaines régions, sont restés sur l’île et pourraient constituer une zone de réhabilitation, a-t-on indiqué.
L’île compte aussi plusieurs sites archéologiques, dont le phare qui remonte à plus de 150 ans, qui est doté de caractéristiques uniques, sachant qu’il fonctionne au mercure et conserve toujours son architecture initiale, en dépit du séisme qui a frappé la wilaya d’Aïn Temouchent, en 1999, détruisant de nombreuses installations, a ajouté M. Benabdi.
La réserve naturelle elle-même contribue également au développement économique et social de la région de Rachgoun, ainsi que toute la côte de la wilaya d’Aïn Temouchent, voire la région Ouest du pays.
Plusieurs propositions ont été émises pour valoriser les opportunités disponibles, afin de les exploiter dans la promotion du tourisme et dans la recherche scientifique, les autorités de la wilaya ayant adopté une approche de gestion de l’île basée sur sa dimension économique et sociale, en introduisant plusieurs activités qui contribueraient à améliorer la dynamique de développement de la wilaya, selon la même source.
Le même expert a relevé certaines des opportunités disponibles sur cette île, notamment les activités nautiques liées à la plongée sous-marine et les randonnées sur les sentiers terrestres, en plus de sa dimension archéologique et historique, qui peuvent être exploitées pour promouvoir le tourisme archéologique.
Des vestiges archéologiques remontant à la préhistoire
L’île de Rachgoun recèle plusieurs sites et stations historiques datant de l’ère paléolithique pour certains et du néolithique pour d’autres, également connu comme étant la période ayant vu la domestication des animaux et le développement des pratiques culturales (agriculture).
Sur cette île de quelque 800 mètres de long et 200 mètres de large, d’importantes découvertes ont été effectuées, ce qui atteste qu’elle fut, selon des spécialistes, un véritable centre de vie.
Des objets en pierre et des silex transformés ont été mis au jour par des chercheurs, qui ont également découvert un site funéraire, où les morts étaient enterrés selon des rites de l’époque avec des objets, notamment des pointes de lances, qui leur appartenaient.
Selon la chercheure et enseignante au département d’archéologie de l’Université d’Alger, Dr. Yasmina Chahed Saoudi, une grande partie de ces objets se trouve au Musée national « Ahmed Zabana » d’Oran.
Dr. Saoudi a précisé que le gros de ces outils et objets funéraires, qui enrichissent actuellement les collections du Musée d’Oran, ainsi que les sites où ils ont été découverts, datent entre 10.000 et 4.000 ans.
Certains autres objets datent, en revanche, de bien avant la préhistoire, soit au 8e siècle avant notre ère, a expliqué la chercheuse.
Dr. Saoudi, qui a mis en exergue la valeur historique des sites de l’île de Rachgoun et la possibilité d’en faire une destination touristique a, toutefois, insisté sur la nécessité de la gestion et de l’exploitation rationnelles du flux des visiteurs, et ce, dans le souci de préserver cette station à haute valeur archéologique, ainsi qu’à protéger la faune et la flore qui s’y trouvent.
De son côté, le directeur de la Culture et des Arts de la wilaya d’Aïn Temouchent, Abdelali Koudid, a affirmé que son institution a lancé une étude de terrain, dont l’élaboration a été assurée par un bureau d’études spécialisé.
M. Koudid a précisé, dans ce contexte, que l’objectif de cette étude est de préserver cette station historique et préhistorique qu’est l’île de Rachgoun par l’élaboration d’un parcours d’accès aux sites préalablement définis et, surtout, de mettre en place un plan global pour la gestion de ce site, conformément à une vision allant dans le sens de la promotion du tourisme culturel et historique.
Pour sa part, le membre de l’Assemblée populaire de la wilaya d’Aïn Temouchent, Lakhdar Belgharres, a estimé que le projet de création d’une entité ayant le statut d’Etablissement à caractère industriel et commercial (EPIC) devant être chargée de la gestion de la réserve naturelle de l’île est un premier jalon pour la valorisation et la promotion de tous les atouts touristiques, notamment dans les créneaux culturels, historiques et écologiques dont le site et la région dans son ensemble recèlent.