La Russie va diminuer en mars sa production de pétrole en réponse aux sanctions décidées contre son brut, a annoncé vendredi son vice-Premier ministre, provoquant un bond des cours de l’or noir.
« La Russie va réduire volontairement sa production de 500.000 barils par jour en mars », soit environ 5% de sa production quotidienne, a déclaré Alexandre Novak, cité par les agences de presse russes.
« Nous ne vendrons pas de pétrole à ceux qui adhèrent directement ou indirectement aux principes du +prix plafond+ », a ajouté M. Novak, faisant ainsi référence à des sanctions occidentales.
Moscou est frappé depuis décembre par la mise en place d’un prix plafond sur son brut par le G7, l’Union européenne et l’Australie. Ces mesures visent également depuis début février les produits pétroliers raffinés.
Objectif pour les pays qui sanctionnent : réduire autant que possible la manne pétrolière de Moscou, dont les revenus financent son invasion de l’Ukraine, mais sans provoquer une pénurie, et donc un envol des cours de l’or noir, qui alimenterait l’inflation déjà très élevée à travers le monde.
Avec les États-Unis et l’Arabie saoudite, la Russie est l’un des trois plus grands producteurs de brut et donc un acteur crucial du marché.
Sanctions contournées
La perturbation des livraisons de gaz russe vers l’Europe, dans la foulée de l’invasion de l’Ukraine par le Kremlin, a fait flamber les cours de l’énergie puis l’inflation, mais le marché du pétrole est pour l’instant relativement indemne, car les Européens ont réorganisé leur approvisionnement.
Jusqu’à l’entrée en vigueur des nouvelles sanctions, « la Russie arrivait à compenser la perte de ses ventes à l’Occident par des achats venus d’Asie, particulièrement de Chine et d’Inde », note Carsten Fritsch, analyste chez Commerzbank.
Mais les nouvelles sanctions entrées en vigueur dimanche concernent les produits raffinés russes, qui étaient principalement achetés en Europe.
Et les exportateurs russes ne pouvaient pas se consoler en regardant les prix grimper, puisque, sur fond de craintes de récession mondiale, les cours du brut évoluent en dessous de leur niveau d’il y a un an, avant l’invasion russe de l’Ukraine.
L’annonce d’une baisse de la production russe a cependant donné un coup de fouet aux prix. A Londres, le Brent, référence européenne de brut, grimpait en milieu de journée de 2,49% à 86,60 dollars, tandis que le WTI américain prenait 2,41% à 79,93 dollars.
La baisse de la production russe risque en effet de ne pas être compensée par les autres grands pays pétroliers.
Alliés de l’Opep+
Inquiets de voir les acheteurs de brut au bord de la récession, ce qui réduirait la demande et risquerait de provoquer un surplus de pétrole sur le marché, l’Organisation des pays exportateurs de pétrole et ses partenaires (OPEP+), qui associe la Russie à l’Arabie saoudite et à 21 autres pays producteurs, a décidé de diminuer sa production de 2 millions de barils par jour.
Selon le porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov, « il y a eu des conversations avec un certain nombre de membres de l’OPEP+ » avant l’annonce faite par Moscou vendredi.
Et des délégués d’autres pays membres de l’OPEP+ ont affirmé à l’agence Bloomberg qu’ils ne compenseraient pas la baisse de la production russe.
L’idée que la Russie a décidé volontairement de produire moins ne convainc cependant pas tout le monde: « Nous estimons que la décision n’est pas complètement volontaire et que des facteurs de marché forcent la main à la Russie », qui peine à trouver des acheteurs, estime Giovanni Staunovo, analyste chez UBS.
Dans les deux cas, la conséquence reste la même: une hausse des prix qui pourrait selon lui être accentuée par la réouverture de la Chine et l’augmentation de la demande qu’elle devrait entraîner.
AFP