Le président de la Chambre nationale d’agriculture, Mohamed Yazid Hambli, a relevé « une carrence importante en terme de ressources humaines dans le secteur agricole » en Algérie.
S’exprimant ce matin sur les ondes de la chaîne 3, M. Hambli a estimé qu' »avec tout ce qui se passe dans le monde, les changements climatiques, aussi le défi de la sécurité alimentaire, on est obligé d’aller vers une performance optimale pour notre agriculture ».
Il a plaidé pour une agriculture moderne, beaucoup plus technique, qui préserve la nature et durable, et ce, « à travers l’introduction de nouvelles techniques, l’utilisation des ressources hydriques d’une façon économique, l’utilisation de machines performantes, l’innovation ».
Et selon lui : « L’élément le plus important, afin de mettre en oeuvre toute cette politique, c’est de moderniser la ressource humaine, c’est la formation de cadres, des ingénieurs, des formateurs, des conseillers et des vulgarisateurs. » « Tout ça est très important pour mettre en oeuvre une politique et une vision globale d’une agriculture moderne et durable », a-t-il estimé.
M. Hambli a relevé qu' »on a cessé de former les techniciens et les techniciens supérieurs depuis longtemps, alors qu’il y a l’offre et le marché (agricole, ndlr) est demandeur ». Et d’insister : « Nous avons besoins de formateurs, de conseillers et de consultants en agriculture qui travaillent sur le terrain. Actuellement, il y a une carrence importante en terme de ressources humaines dans le secteur agricole.
« On ne peut pas aller loin sans la formation »
« Si on regarde les grands pays agricoles, ils ont gardé la formation et l’enseignement agricoles », a-t-il dit, en recommandant de « revenir sur la formation à travers le ministère de l’Agriculture », « redynamiser les instituts techniques, qui sont toujours sous tutelle du ministère », « la réforme en terme de formation et des programmes de formations et pégagogiques ». Pour lui, cela « est primordial et nécessaire actuellement, pour concrétiser la politique de l’Etat » dans le secteur.
« On a besoin d’outils pour concrétiser cette politique et cet outil important et incontestable c’est la ressource humaine », a-t-il indiqué, en citant la grande campagne d’investissement dans les parcours sahariens, à travers la création de grandes exploitations, qui nécessite des gens compétents pour un encadrement adéquat.
« Actuellement, on a lancé la grande campagne d’investissement dans les parcours sahariens, à travers la création de grandes exploitations, mais on n’a pas les gens qui vont encadrer, on n’a pas des techniciens et des ingénieurs », a-t-il expliqué, en indiquant qu' »on a surtout besoin de beaucoup de techniciens sépcialisés dans l’élevage, le machinisme agricole, l’arboriculture…etc. ».
« Il y a plus de techniciens et techniciens supérieurs. Donc, comment on va faire pour encadrer ces nouvelles exploitations et cette dynamique lancée par les pouvoirs publics? », s’est-il demandé, en soulignant que « ces deux dernières années, c’était des années de réformes en agriculture et qu’on a assisté à chaque fois qu’l y avait un Conseil des ministres, il y avait des points sur l’agriculture ».
« Il y a de grands chantiers ouverts par les pouvoirs publics, qui doivent être accomagnés par des réformes en terme de formation. On ne peut pas aller loin sans la formation, parce qu’actuellement, en parle de modernisation et de numérisation du secteur agricole, qui nécessitent aussi l’encadrement technique dont on ne dispose pas », a-t-il encore relevé.
S’adapter aux changements climatiques
Le président de la chambre nationale d’agriculture a expliqué qu’il faut qu’on s’adapte avec les changements climatiques qui touchent le monde entier. Et cela passera par la modernisation, l’optimisation et la protection de nos ressources à travers la protections des sols et aussi, la préservation de l’eai à travers la numérisation, la digitalisation, les systèmes d’irrigation et de contrôle des sols ainsi que des systèmes d’utilisation optimale des engrais et tout ce qui est mécanisation agricole, qui nécessite des machines spécifiques par rapport à la sécheresse de ces dernières années.
Face à cette sécheresse, il faut agir très vite, a estimé M. Hambli, qui a expliqué comment qu’on va s’adapter à cette situation de sécheresse. Il a cité l’utilisation rationnelle de nos ressources au niveau des zones sahariennes, parce qu’il y a de grandes surfaces et de l’eau. « On peut aller vers la rentabilité maximale. Pour le blé tendre, on peut faire du 100 et du 120 quintaux l’hectare, si on met un véritable itinéraire technique suivi par des techniciens et on peut le faire, parce qu’il y a des gens qui le font », a-t-il dit.
Appelant à multiplier les expériences et les success story, il a fait remarquer que même au nord du pays, il y a des agriculteurs qui réalisent des rendement de 40 et 50 quintaux l’hectare. A ce propos, il a cité la performance de la région de Constantine où les agriculteurs respectent l’itinéraire technique, utilisent beaucoup d’engrais et utilisent également des fongicides contre les maladies. « Constantine, à elle seule, utilse 50% des quantités importées de fongicides en Algérie, a-t-il fait savoir.
Le président de la Chambre nationale d’agriculture a souligné que l’Algérie ne dispose d’une industrie de machines agricoles moderne, donc, a-t-il poursuivi, il faut s’ouvrir vers monde pour importer de la science et de la technologie. « Je pense que la décision du président de la République de permettre aux agriculteurs d’importer du matériel agricole rénové, est très importante pour notre agriculture et les agriculteurs, afin d’introduire de nouvelles techniques et de la technologie », a-t-il estimé.
Evoquant les importations de produits alimentaires dont la facture est évaluée à 10 milliards de dollars, M. Hambli a indiqué que les céréales représentent 34% , le lait et dérivés arrivent en deuxième place avec 28%. « Pour nous, c’est une situation critique, par rapport à la somme qu’on est en train d’importer et par rapport aussi à nos énormes capacités », a-t-il commenté.
« L’agriculture algérienne peut être compétitive par la qualité »
« Le besoin, actuellement, c’est d’organiser, sécuriser l’exploitant agricole », a-t-il dit, en soulignant qu' »on ne peut pas mettre en place un programme ou une vision sans données e statistiques fiables et justes ». Dans ce sens, il a rappelé l’opération de recensement du cheptel lancée dernièrement par le ministère de l’Agriculture et du Développement rural.
M. Hambli a expliqué que dans la filière animale, la production ne concerne pas uniquement les viandes et de lait, mais, c’est tout un écosystème économique qui peut générer beaucoup d’argent pour le pays, avec notamment la peau, la laine. « C’est aussi notre souveraineté, la préservation de nos ressources », a-t-il dit.
« L’un des éléments les plus importants de notre sécurité alimentaire, c’est la préservation des ressources génétiques », a-t-il ajouté, en rappelant la création récemment de la Banque des semences, en plaidant pour la création d’une banque des gènes qui est « importante » puisqu’elle englobe tout ce qui est végétal et animal.
« Le rencensement du cheptel est très important pour la préservation de nos races. Nous avons de très belles races ovines d’une qualité importante à travers l’Algérie dispercées à travers les régions et, on a vu qu’il y a un mélange et un brassage de races qui va nous faire perdre ces races adaptées à des régions depuis des millénaires », a-t-il précisé, en relevant qu’il y a beaucoup de races qui ont disparu et d’ajouter qu’on ne va pas faire la même chose avec les races qui restent car, « c’est un patrimoine génétique pour les générations futures, pour notre souveraineté et aussi, pour la compétitivité de notre agriculture ».
« L’agriculture algérienne peut être compétitive uniquement par la qualité à l’international. Nous avons de la qualité. Il faut la préserver. Premièrement, avec des données fiables, le recensement, aller ensuite vers la valorisation, la sécurisation des exploitants et des éleveurs », a-t-il dit, estimant qu’il faut préserver la profession et les agriculteurs qui sont les acteurs de notre sécurité alimentaire.
Pour ce qui est du nombre d’agriculteurs en Algérie, M. Hambli a fait savoir qu’il y a 1,3 million d’adhérents à la Chambre nationale d’agriculture. Selon lui, il y a des gens qui activent en dehors de la Chambre mais ce sont de petits agriculteurs qui n’ont pas de papiers, qui sont en train d’être régularisés.