Taïeb Hafsi, professeur titulaire en management stratégique international des organisations à l’École des Hautes Etudes Commerciales de Montréal (HEC) et membre de la Société Royale du Canada, a animé mardi à Alger un colloque sur l’économie algérienne et les moyens de développer l’entreprise qui est, selon lui, à la base de toute politique économique.
Dans son intervention, Pr Hafsi, qui animait la rencontre devant un parterre de chefs d’entreprises publiques et privées, au Centre international des conférences (CIC), à l’initiative de l’établissement de formation « Ramray School », spécialisé dans divers domaines d’apprentissage, sous le thème : « Construire l’entreprise et construire le pays », a exposé sa vision, au demeurant optimiste, pour l’Algérie de 2040, tout en mettant en exergue les mesures qui doivent être prises pou y parvenir.
« L’Algérie 2040 sera un pays développé, avec une production intérieure brute correspondant à 75% de celle de la moyenne européenne, utilisant deux plateformes de classe mondiale : l’énergie renouvelable et la logistique, avec des industries de bas de gamme technologique florissantes, des industries de haut de gamme en forte croissance et avec une agriculture moderne qui satisfait 70% des besoins alimentaires du pays.
Le pays jouera un rôle de premier plan comme intermédiaire entre les économies européennes et africaines », se projette Pr Hafsi qui espère qu’à cet horizon le pays sera « méritocratique », mettant l’accent sur l’éducation et la santé du citoyen moyen, valorisant la liberté d’entreprendre et l’encouragement des initiatives économiques par les entreprises et les citoyens.
« Ce sera un pays qui mettra l’accent sur la qualité de la vie, la protection du terroir et le bonheur du citoyen. Au plan organisationnel, l’économie, l’éducation et la santé seront décentralisées et sous la responsabilité des régions. L’Algérie arrivera en 2040 avec les ressources et l’ambition légitime de devenir l’un des pays les plus influents de la Méditerranée au plan économique », poursuit Pr Hafsi qui a, également mis en exergue les défis de gouvernance que rencontrent les entreprises dans un environnement où l’Etat joue un rôle central et évoque des pistes à même permettre la construction d’institutions amicale pour le développement économique.
Pour l’intervenant, les grandes difficultés de l’Algérie viennent surtout de sa « gouvernance défaillante qui génère des décisions opportunistes et populistes et empêche l’amorce d’un développement économique raisonnable ». « Les nuisances bureaucratiques sont des freins importants. La plupart des problèmes pour l’économie sont de natures institutionnelle et organisationnelle », relève Pr Hafsi qui estime que pour encourager le développement, « il faut agir sur les institutions et les structures ».
Taïeb Hafsi pense que la crise est une chance. Il estime que l’Algérien a besoin d’optimisme et donc d’une vision économique qui porte cet optimisme. Le conférencier a insisté sur la nécessité de mettre l’accent sur les principes de liberté, de justice et de fraternité, des valeurs qui sont chères à la population algérienne.
Taïeb Hafsi plaide pour la mise en place la structure économique nationale qui va faciliter les initiatives économiques, un État « bienveillant » pour l’entreprise. « La construction du pays se fait par ses entreprises », explique Taïeb Hafsi. « La décentralisation et la simplification sont des nécessités impérieuses. La liberté n’est pas seulement la liberté politique. C’est surtout la liberté économique. Pour que la liberté s’exprime, il faut de la connaissance. C’est là que la formation prend toute sa valeur. L’État, d’abord au niveau central, puis progressivement au niveau local, doit devenir un promoteur de formation managériale adaptée au développement économique », note Pr Hafsi qui, lors du point de presse qu’il a animé à cette occasion, estime que les élites doivent montrer le chemin « pour aller vers mieux et non de pointer la perfection ».
Lors de la rencontre, Pr Hafsi a évoqué deux exemples de réponses stratégiques, réussies, l’une en Algérie (RedMed) et l’autre internationale (Alibaba). D’après le conférencier, « il y a toujours un chemin à trouver pour que les entreprises grandissent face aux géants et créent de la richesse ». Il évoque, à ce propos, trois secrets : Une stratégie asymétrique contraire à celle des acteurs dominants, Construire un modèle d’affaires autour d’une compréhension plus fine des besoins du client et construire une organisation dynamique dans laquelle chacun est encouragé à contribuer à la stratégie.