Le ministre des Affaires étrangères et de la Communauté nationale à l’étranger, Ramtane Lamamra, a accordé, un entretien à France 24 et Radio France International (RFI).
Dans cet entretien, le chef de la diplomatie algérienne a affirmé que les relations entre Paris et Alger sont « dans une phase ascendante ». « Les présidents Abdelmadjid Tebboune et Emmanuel Macron ont une excellente relation personnelle. Ils se téléphonent. Parfois, c’est annoncé et parfois, ce n’est pas annoncé. La communication entre les deux chefs d’Etat existe, elle cordiale et confiante », a indiqué M. Lamamra, en ajoutant qu' »elle ne suffit pas pour masquer l’existence de problèmes. »
« Nous sommes, aujourd’hui, je crois, dans une phase ascendante, laborieusement ascendante. Parce qu’il y a grand nombre de difficultés dans cette relation bilatérale. Singulièrement, lors qu’il s’agit, en ce qui nous concerne, de la protection et la préservation de la sécurité et de la dignité de nos compatriotes en territoire français. C’est un sujet auquel nous sommes particulièrement sensible. Il y a également d’autres sujets, j’allais dire, sont quantifiables et des solutions de compromis sont toujours possibles. Lors qu’il s’agit d’atteinte à la mémoire, à l’histoire, ou à la dignité du peuple algérien ou de compatriotes installés ou voyageant en France, ceci constitue, souvent, des motifs très sérieux des difficultés dans les relations bilatérales », a déclaré le MAE algérien, en espérant que les relations entre l’Algérie « aillent de mieux en mieux ».
M. Lamamra n’exclut pas que le président Tebboune accepte l’invitation d’Emmanuel Macron à se rendre à Bruxelles à la mi-février pour le sommet UE-UA.
Réduction des visas pour les algériens
Interrogé sur la réduction du nombre de visas accordés aux algériens par la France, et cette dernière affirme que l’Algérie refuse de son côté d’accueillir les algériens expulsables de France et qu’un compromis est-il envisagable sur ce dossier entre les deux pays, M. Lamamra a indiqué qu' »il faut, naturellement, que la loi soit appliquée, mais de manière non sélective et qu’elle puisse se reposer sur un minimum de respect de la dignité humaine ».
« Dans la discussion avec les autorités françaises, nous veillons à ce qu’il n’y ait pas de charter et à ce que les gens bénéficient des recours possibles devant les autorités françaises avant la reconduction aux frontières. Et en cela, les autorités algériennes veillents, véritablement, à ce que ces accords algéro-français soient exécutés, mais de manières convenable. Donc, il est faut de dire que nous refusons de recevoir nos compatriotes qui n’ont plus rien à faire en territoire français », a-t-il expliqué.
« Lors que certains annoncent publiquement qu’il faut faire du chiffre, c’est clair qu’il y a abus », a-t-il dit en réponse à une questionde savoir s’il y recours excessif de la France à expulsions.
La Mémoire
Interrogé sur la Mémoire, M. Lamamra a indiqué que « nous estimons que l’histoire doit être laissée aux historiens et que cela doit se faire dans la sérénité, et que cette appropriation par chacun des peuples concernés de sont histoire, devrait se faire, dans la mesure du possible, sans acrimonie et sans les accusations qui ne sont pas forcément avérées ».
A une question de savoir si l’Algérie attend un gest de la part de la France à l’occasion de la commémoration des Accord d’Evian, le chef de la diplomatie algérienne a répondu : « La cohérence de l’histoire voudrait que l’indépendance de l’Algérie, chèrement reconquise, s’accompagne de la réappropriation de tous les biens, matériels et immatériels qui sont les siens et qui ont été déplacés dont certaines autorités, certaines personnes physiques ou morales françaises, se sont appropriés. »
« Nous avons un canon à Brest, les archives, il reste même quelques crânes de héros de la résitance algérienne contre l’invasion française. On ce demande, d’ailleurs, si c’est vraiment civilisé que de garder dans des musées les crânes de résitants algériens dont on fait des trophées. Cela pouvait s’expliquer à l’époque de la montée du colonialisme, mais pas à l’ère des indépendances et de la souveraineté des peuples », a-t-il dit.
Situation au Mali
Le MAE algérien a laissé entendre que les vols militaires français en direction du Sahel que l’Algérie avait suspendus après la dernière brouille diplomatique sont en voie d’être rétablis. « Il s’agit d’une mesure technique qui n’a pas vocation à durer éternellement. La situatione est ce qu’elle est. Des ponts de la coopération algéro-française sont en train de se remettre en place, donc, cette question ne doit pas être traitée comme étant quelque chose d’éminemment politique », a-t-il dit, en ajoutant que « c’est une compréhension correcte de la dynamique de ce que j’appelle la phase ascendante de la relation algéro-française. »
Au début de l’interview, M. Lamamra s’es exprimé sur la situation au Sahel et particulièrement la situation au Mali. A une question sur la France et ses partenaires européens qui envisagent un retrait militaire et si ce retrait se confrime inquièterait-il l’Algérie, le ministre des Affaires étangères a répondu : « Nous sommes très attentifs à tout ce qui se passe dans la région. Nous considérons que l’Union Africaine, puis que nous sommes à Adis Abiba (Ethiopie), devrait disposer des moyens et faire preuve de la volonté politique nécessaire pour apporter des solutions africaines aux problèmes de l’Afrique. »
« A défaut, il est naturel que des solutions alternatives, comme celles qui ont prévalu jusqu’à présent puissent avoir lieu, de sorte que les groupes terroristes ne fassent pas qu’une bouchée de ce grand pays si névralgique et si important pour la paix et la sécurité de toute la région. J’espère qu’il y a encore de l’espace pour de la raison et pour des démarches qui puissent être respectueuses de la souveraineté nationale du Mali comme il se doit, et également qu’elle puisse laisser place à la communauté internationale pour qu’elle assume ses responsabilités sur la base du mandat du Conseil de sécurité des Nations Unies, du Conseil de paix et de sécurité de l’Union Africaine. Je veux dire, il y a des solutions autres que les faits accomplis », a-t-il expliqué.
Interrogé sur les informations selon lesquelles l’Algérie aurait laissé passer des avions militaires russes remplis d’hommes et d’équipements, M. Lamamra a indiqué que « si des avions russes, français, chinois ou autres survolent le territoire algérien cela ne constiuerait absoluement pas un événement de nature politique. » Et à la journaliste de RFI de le relancer : « Donc, il n’y a pas d’opposition de votre part à acheminer des troupes et du matériel russes, et éventuellement des mercenaires vers le Sahel? »
« Je ne suis pas sûr que la qualificationde ‘mercenaire’ soit consensuelle. Il y a d’autres points de vue pour décrire les personnels en question. Je ne dis pas que je préfère tel ou tel point de vue, mais en répondant à votre question qui porte ce nom, je ne voudrais pas que l’on comprenne que moi je le reprend à mon compte, d’autant plus que le gouvernement malien dit qu’il ne sagit pas de cela, le gouvernement russe non plus. En l’occurence, ce que je vous dis, ces des épiphénomènes par rapport au principe lui-même. Le principe c’est que l’Algérie n’est pas en faveur du déploiement de forces étrangères sur le continent africain tout en respectant le droit souverain des Etats concernés de faire appel à des formes d’assistance de la part de partenaires internationaux », a répindu le chef de la diplomatie algérienne.
Concernant la durée de la transition au Mali et la proposition algérienne d’une transition de 16 mois, M. Lamamra a rappelé que l’Algérie a fait cette proposition publiquement et le Conseil de paix et de sécurté de l’Union Africaine l’a adoptée formellement. « Dans cette décision qui entérine les sanctions imposées par la Cédéao (Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest, ndlr), le Conseil de paix et de sécurité indique que tant que les efforts algériens seraient en cours, il y aurait une sorte d’effet suspensif sur l’application des sanctions. Néanmoins, depuis que l’Algérie a fait ses propositions et que le Conseil de paix et de sécurité les a entérinées, nous attendons toujours que le gouvernement malien et les instances coméptentes dirigeantes de la Cédéao nous disent leur diponibilité à participer à un dialogue fraternel que l’Algérie est disposée à organiser », a-t-il dit.
Relations avec le Maroc
Sur les relations entre l’Algérie et le Maroc rompues depuis six mois et la crainte de conflit armé entre les deux pays, M. Lamamra a indiqué : « Il y a des problèmes dans la région. Et la solution à ces problèmes ne résde pas dans la fuite en avant, telle que celle qui consiste à inviter des dirigeants israéliens qui viennent à nos frontières menacer l’Algérie à partir du territoire marocain, ou celle qui consite à développer des slogans qui n’ont rien à voir avec la réalité et faire assumer cela par un appareil de propagande qui ne recule devant aucune calomnie. »
« Cette situation-là, c’est ce que nous vivons aujourd’hui, mais rassurez vous, l’Algérie ne fera la guerre qu’en légitime défense. L’Algérie a trop connu les affires de la guerre coloniale justement, pour souhaiter s’engager dans une confrontation armée avec un pays voisin. Il faut se demander si ceux qui développent une coopération militaire avec des puissances militaires étrangères n’ayant rien à voir avec la région nord-africaine, ne sont pas ceux qui parient sur le pire », a-t-il dit.